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Troubles au Myanmar, répression contre les opposants à un projet chinois de mine de cuivre

Catégories: Asie de l'Est, Myanmar (Birmanie), Environnement, Manifestations, Médias citoyens
Photo of Daw Khin Win which was  widely shared on the Internet. [1]

Photo de Daw Khin Win. Largement partagée.

Daw Khin Win, une femme de 56 ans du village Mogyopyin, centre du Myanmar, a été tuée par balle [2] par la police au cours d'un affrontement entre 60 villageois et une compagnie minière chinoise, le 22 décembre 2014. Une dizaine de personnes et deux policiers ont été blessés au cours de la confrontation. La violence s'est poursuivie le lendemain [3]faisant trois blessés supplémentaires.

L'incident est né d'une querelle lors de laquelle les villageois ont essayé d'empêcher la compagnie de clôturer un terrain près de la mine de cuivre Latpadaung, prenant en même temps un bulldozer de l'entreprise. Le conflit s'est intensifié [4] lorsque les locaux ont commencé à utiliser des lance-pierres et que la police a riposté avec force. 

La coentreprise minière de cuivre [5], fondée par la société chinoise Wanbao et l'Union of Myanmar Economic Holdings (UMEH), est l'un des projets d'investissement les plus controversés du Myanmar. En novembre 2012, une manifestation contre la compagnie minière a été violemment dispersée [6], faisant plus de 60 blessés dont des moines bouddhistes. Une commission d'état formée afin d'enquêter sur les faits a abouti [7] à l'obligation pour l'entreprise de verser une compensation financière aux propriétaires terriens locaux. Cependant, pour beaucoup d'habitants concernés par le projet, cette mesure est insuffisante. Ce sont les villageois ayant refusé la rémunération et d'abandonner leurs terres qui ont été impliqués lors du dernier affrontement.

Farmers lie in front of a bulldozer to protest the fencing of their land by a copper mining firm. Photo by Han Win Aung, The Irrawaddy Blog [8]

Agriculteurs essayant de bloquer un bulldozer lors de la manifestation contre la mise en clôture de leurs terres par une compagnie minière de cuivre. Photo de Han Win Aung, The Irrawaddy Blog

La mort de Daw Khin Win a entrainé la colère [9] de nombreux activistes qui soutiennent la position des villageois depuis 2012.

Moe Thway [10], un membre du groupe de jeunes pro-démocratie Generation Wave, s'interroge [11] sur le fondement des prétendues réformes politiques mises en oeuvre par le nouveau gouvernement myanmarais. (Attention — lien contenant des images susceptibles de heurter certaines personnes) :

Une agricultrice a été tuée par balle [sic] lors de la manifestation contre l'accaparement des terres pour le projet minier Lapadaung en Haute-Birmanie, près de Monywa. Plus de 20 paysans locaux ont été blessés [sic].

Que signifie réforme ?
Y a-t-il un réel changement ?

Nay Myo Zin, un ancien officier militaire et fondateur de l'Organisation pour le Développement Social au Myanmar, compare [12] le cas de Daw Khin Win avec une affaire distincte, celle de Ko Par Gyi [13], un journaliste mort durant sa détention par les militaires :

Ko Par Gyi a été secrètement tué mais quand l'affaire fut révélée [ils] l'ont justifiée en disant qu'ils l'avaient tué car il tentait de s'évader. Maintenant attendons de voir comment [ils] vont justifier la mort d'une agricultrice de Latpadaung. Les gens doivent surveiller, ils diront qu'elle a été tuée accidentellement ou alors afin de protéger l'aveugle bulldozer sans défense [sarcasme sous-entendu]. Tout le monde doit se rassembler afin de rendre justice. Sinon nous devrons vivre dans la peur que nous puissions connaître le même sort que Ko Par Gyi.

Moethee Zun [14], fondateur du Parti Démocratique pour une Nouvelle Société, a également condamné le gouvernement et incite [15] le peuple à demander justice :

Je dénonce l'acte du gouvernement qui a violemment dispersé les agriculteurs de Latpadaung. La cause de ces paysans est également la cause de chacun dans cette nation. Nous devons les aider. Ne soyez pas indifférents comme si cela ne nous concernait pas. La prochaine fois ce sera ceux qui sont indifférents [qui souffriront].

Audrey Gaughran d'Amnesty International a exprimé ses inquiétudes au sujet de [16] la gestion de la manifestation par la police :

Tout en étant conscients du signalement que certains manifestants ont jeté des pierres aux policiers, le recours à des armes à feu soulève de très sérieuses questions quant à la gestion de cette situation par la police.

 Maung Zarni, un analyste politique réputé, a appelé le peuple [17] à s'opposer aux activités de l'entreprise chinoise sans racisme. (Attention — lien contenant des images susceptibles de heurter certaines personnes) :

CHINE-#MYANMAR [18] le FRIC des mines tue. Boycottez #China [19], mais ne vous autorisez pas à devenir anti-Chinois #racist [20]pic.twitter.com/dIzzhRYLJ3 [21]

L'affrontement meurtrier entre la police et les manifestants à Mogyopyin va accroître la surveillance publique du gouvernement de Myanmar qui semble peu disposé à écouter l'insatisfaction croissante, avec un nombre de projets de développement en cours dans tout le pays.

Wanbao a condamné [23] l'assassinat de Daw Khin Win, que l'entreprise a appelée “un membre de la famille Latpadaung élargie” et a répété que les “extrémistes” et les “extérieurs” étaient la cause des violences dans la communauté. La société a souligné dans sa déclaration du 23 décembre que “la paix et un développement durable peuvent uniquement être atteints via un dialogue paisible”.