Les défis de l'immigration intra-américaine : la route Colombie-Chili

Muchos colombianos, como la familia Landázuri (arriba), huyeron de Colombia por amenazas. El hangout se centró en la ruta que emprenden miles de colombianos hacia Antofagasta, en el norte de Chile. Foto de Rodrigo Selles para CONNECTAS y Mercurio de Antofagasta.

Comme de nombreux Colombiens, la famille Landázuri (ci-dessus), a fui la Colombie suite à des menaces. Les discussions sur Google Hangout évoquent la route qu'empruntent des milliers de Colombiens jusqu'à Antofagasta, au nord du Chili. Crédit photo: Rodrigo Selles pour CONNECTAS et Mercurio de Antofagasta.

Global Voices Online, en association avec CONNECTAS, Agenda Propia, Útero.pe, Vice et El Mercurio de Antofagasta, a recueilli, via Google Hangouts, une série de témoignages sur les migrations entre pays des communautés latino-américaines, intitulée “Les défis de la migration intra-américaine“. Le premier échange, centré sur l'exode des Colombiens vers la ville chilienne d'Antofagasta, a eu lieu le 13 mars 2015.

Ces conversations recoupent plusieurs témoignages de migrants colombiens vivant au Chili, mais aussi d'experts intervenants sur les questions des migrations régionales ainsi que des journalistes suivant les histoires des déplacés sur le continent à la recherche d'une vie meilleure.

Les débats étaient animés par Robert Valencia, collaborateur de Global Voices, avec la participation de Javier El-Hage de la Fondation pour les Droits de l'Homme, Catalina Rojas et Jimena Araoz de Global Citizen – Service Jésuite pour les Migrants et Réfugiés et Cristian Asencio du journal El Mercurio à Antofagasta.

Le Hangout [visioconférence à plusieurs participants, NdT] complet peut-être vu dans cette vidéo Youtube:

Cette expérience est inspirée du rapport The New Latin Exodus, qui suit assidument les mouvements migratoires dans la région latino-américaine et qui cherche à le distinguer de ceux déjà étudiés. Une partie des échanges met en évidence les points communs entre les différents mouvements migratoires, tout en rappelant les caractéristiques particulières de l'intégration des groupes dans les régions. “Dans le monde, nous sommes tous des immigrés“, a déclaré El-Hage. “La possibilité d'émigrer n'avait jamais été réglementée ou interdite auparavant.”

Pour illustrer les nombreux défis de la migration, les participants ont raconté des anecdotes montrant de quelle manière leurs parcours ont pu être modifiés en fonction de l'évolution des législations et comment l'insécurité faisait partie de leur quotidien dans certaines régions traversées. La journaliste mexicaine Priscila Hernández Flores a donné son point de vue sur la situation au Mexique et en Amérique centrale :

Depuis la découverte d'une fosse commune avec 72 migrants dans le Tamaulipas, la route migratoire a été modifiée et les migrants centraméricains préfèrent choisir un itinéraire plus long, mais plus sûr (lorsque cela s'avère possible). La mise en place récente du programme Southern Border intensifie le contrôle des mouvements migratoires sur les routes et empêche désormais les migrants de monter à bord du train [également connu sous le nom de La Bête]. Auparavant, il était courant de voir des images de trains surchargés de migrants sur les toits des wagons […] Maintenant, avec la mise en place de ces programmes, il est devenu très difficile pour un migrant d'embarquer dans un train. En conséquence, le trajet s'effectue désormais à pied, et ce qui nécessitait auparavant trois heures de voiture ou de train, est maintenant fait à pied, ce qui a généré d'autres risques pour les migrants.

Le Hangout présente également le témoignage de deux migrants colombiens vivant à Antofagasta, débattant des avantages et des inconvénients de changer de pays et de repartir de zéro. L'un d'entre eux a souligné qu'au-delà des problèmes pour trouver un emploi à Buenaventura, la ville dont il est originaire, l'insécurité reste le problème principal dans son pays. Il a également exposé les difficultés à vivre au Chili en raison des préjugés contre les Colombiens, qui ont vu leur image écornée par des problèmes impliquant d'autres migrants colombiens: “nous payons tous pour la faute de quelques-uns”.

Central American

Des migrants d'Amérique centrale montent à bord du train surnommé “La Bête”, au Mexique. Photographie de Peter Haden, publiée sous licence Creative Commons.

Cristian Asencio, journaliste en charge de la collecte de témoignages, a expliqué qu'au moment de faire son reportage, les migrants se sont montrés peu coopératifs :

Il y a une certaine méfiance parce que certains reportages dans les médias méprisent l'immigration. [Ces reportages] stigmatisent les migrants et les considèrent généralement comme suspects.

Catalina Rojas, de Ciudadano Citizen, a expliqué que lorsqu'elle a commencé à travailler à Antofagasta il y a deux ans, ces thématiques “étaient très peu connues”. Sa collègue Jimena Araos a expliqué qu'il y a eu des tentatives d'amélioration, mais que la tâche n'était pas simple :

C'est une structure titanesque. Nous parlons de nombreux changements au bureau des migrations ainsi que d'une évolution du système de santé afin de garantir l'accueil des migrants. La volonté de changement est présente mais il reste beaucoup à faire.

La mise en place par les pays d'alliances économiques, telle que l'Alliance du Pacifique, créent de nouveaux défis et ont des conséquences sur les politiques de libre circulation et de disparition des frontières. Les participants conviennent que, dans le cas du Chili, des obstacles persistent à l'ouverture de ses frontières et pour l'intégration des migrants.

Il est probable que la population ait une réticence à ouvrir les frontières […] Ce qui est étonnant, c'est que les êtres humains ont des frontières alors que les modèles économiques n'en ont pas. En principe, l’Alliance du Pacifique devrait permettre aux personnes de circuler librement, mais dans pratique, cela n'arrive pas.

Les législations ne peuvent pas tout résoudre

En conclusion, les participants évoquent plusieurs solutions. Asencio et Araos ont convenu de la nécessité d'une évolution des législations, mais souhaitent aller plus loin. Selon eux, un travail de sensibilisation et d'éducation est nécessaire pour obtenir des analyses et des échanges responsables avec les médias :

 … il n'y a pas que la législation qui est importante, nous avons également besoin de changements culturels et cela ne se produira qu'avec l'éducation […] la façon dont l'immigré est présenté dans les journaux est fondamentale, il est donc nécessaire de travailler avec l'ensemble des acteurs impliqués...

Rojas affirme que pour que l'intégration fonctionne, il est nécessaire «de créer des espaces de rencontre entre immigrés et nationaux pour apprendre à se connaître». Enfin, El-Hage affirme que le processus d'intégration ne peut pas seulement concerner l'échange de marchandises. «Les gens doivent pouvoir décider d'où ils veulent travailler en fonction de l'offre et de la demande» ajoutant que dans tous les modèles, l'objectif principal doit être le respect des droits de l'homme, car selon lui, les motifs d'une immigration ne sont pas seulement économiques. Les migrations sont également motivées pour des raisons familiales, culturelles ou pour assurer sa sécurité personnelle.

Pour plus d'informations et pour poser des questions, les comptes Twitter Global Voices (@gvamericalatina) et CONNECTAS (@ConnectasOrg) sont à votre disposition. La discussion sera ainsi collectée via le hashtag #HangoutCONNECTAS. Au delà des questions, les propos recueillis serviront également de suggestions pour de futures discussions sur la migration latino-américaine dans la région.

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