Singapour est restée en retrait au moment de la crise des réfugiés rohingya alors que les dirigeants des pays voisins se rencontraient pour tenter d'apporter des solutions.
Les Rohingya appartiennent à une minorité de confession musulmane du Myanmar mais le gouvernement a refusé de les reconnaître en tant que citoyens. Ils sont depuis considérés comme des immigrants illégaux et placés dans des camps de réfugiés. Beaucoup ont fui vers les pays voisins à la recherche d'un toit et de travail. Le mois dernier, des bateaux de réfugiés rohingya ont été rejetés par plusieurs gouvernements d'Asie du Sud-Est, une décision qui a provoqué un tollé à l'échelle internationale.
Les milliers de migrants rohingya bloqués en mer ont contraint des pays d'Asie du Sud-Est à prendre des mesures tardives. La Malaisie, l'Indonésie et la Thaïlande se sont réunies pour discuter de la réponse à apporter à la crise, et la Malaisie et l'Indonésie ont finalement accepté d'accueillir provisoirement les réfugiés.
Le Premier ministre malais Najib Razak a également ordonné la mise en place d'opérations de recherche et de sauvetage pour localiser les bateaux des migrants:
I have further ordered @tldm_rasmi and APMM to conduct search and rescue efforts on Rohingya boats. We have to prevent loss of life.
— Mohd Najib Tun Razak (@NajibRazak) May 21, 2015
J'ai de plus ordonné à @tldm_rasmi [la marine royale malaisienne] et à l'APMM [agence malaisienne de police maritime] de mener des opérations de recherche et de sauvetage pour les bateaux rohingya. Nous devons prévenir les pertes de vies humaines.
Singapour a, pour sa part, déclaré être dans l'incapacité de recevoir le moindre réfugié. Le porte-parole du Ministère de l'intérieur a expliqué lors d'une conférence de presse qu'”en tant que petit pays doté d'un territoire limité, Singapour n'[était] pas en mesure d'accepter les personnes qui demandent l'asile politique ou le statut de réfugié, indépendamment de leur appartenance ethnique ou de leur lieu d'origine.”
C'est depuis longtemps la politique de Singapour en ce qui concerne les demandeurs d'asile. Un reportage tourné en 1978 montrait le Premier ministre de l'époque Lee Kuan Yew refusant d'accueillir des réfugiés vietnamiens. Il aurait déclaré : “Vous devez endurcir votre cœur ou vous serez saignés à mort.”
En 2012, 40 réfugiés rohingya sauvés en mer se sont vus refuser l'entrée à Singapour.
Glendon Giam de Singapour souligne l'ampleur des mesures prises auparavant par la cité-Etat pour empêcher les réfugiés d'entrer sur son territoire:
Timely reminder: in 1975, Singapore had “Operation Thunderstorm” to prevent South Vietnamese refugees landing, with lethal force authorised.
— Glendon Giam (@blueproto) May 14, 2015
Rappel utile: en 1975, Singapour a lancé l'”Opération Thunderstorm” pour empêcher les réfugiés vietnamiens d'accoster, autorisant à cet effet les actes de violence meurtrière.
Cependant, Karen Gwee a twitté que certains réfugiés vietnamiens avaient en réalité été acceptés en 1978:
Absolutely no reason for Singapore not to take in refugees – we did it in 1978 http://t.co/2X8jea8Mgq
— Karen (@karen_gwee) May 17, 2015
Absolument aucune raison que Singapour ne prenne pas de réfugiés – nous l'avons fait en 1978 http://t.co/2X8jea8Mgq
Ces demandeurs d'asile ont été hébergés dans un camp de réfugiés relativement bien entretenu, mais uniquement s'ils pouvaient s'installer dans un autre pays dans un délai de 90 jours.
Des photos de cette zone sont partagées sur Facebook par un ancien réfugié vietnamien, Lam-Khanh Nguyen.
La dernière crise a poussé certains Singapouriens à appeler le riche Etat insulaire à offrir un toit – même de façon provisoire – aux réfugiés en détresse.
Sur Facebook, Miak Siew s'interroge sur les dépenses prioritaires de Singapour:
Folks – you ask me if we host refugees where is the money going to come from.
i ask you – Where does the millions of dollars spent on fireworks for National Day every year come from?you are happy to burn millions shooting lights into the sky, but you are not happy saving lives? Says a lot about our priorities
Les gars – vous me demandez d'où va venir l'argent si nous recevons des réfugiés.
Je vous le demande – D'où viennent les millions de dollars dépensés chaque année en feux d'artifice le jour de la fête nationale?Ça vous plaît de brûler des millions pour des tirs de lumière dans le ciel mais ça ne vous plaît pas de sauver des vies? Ça en dit long sur nos priorités.
Dans le même temps, des Singapouriens approuvent l'approche non-interventionniste du gouvernement, car ils craignent que reloger les réfugiés n'épuise les ressources.
Wei Wen explique sur Facebook pourquoi il comprend la position du gouvernement:
The much bigger point is where does this all lead to? How will they eventually be resettled? Can they really assimilate and integrate into the society? Are we going to house them for decades and beyond? How long before our generosity is worn thin and we realize that there is no other option but continue? Look at the realities in all these options seriously and tell me that our government should not have the heart to protect the best interests of its people?
La question la plus importante est où tout cela nous mène-t-il? Comment [les réfugiés] seront-ils relogés en fin de compte? Peuvent-ils vraiment être assimilés et s'intégrer dans la société? Allons-nous devoir les héberger durant des décennies voire plus? Combien de temps avant que notre générosité ne s'érode et que nous réalisions qu'il n'y a pas d'autre choix que de continuer? Regardez sérieusement les réalités de chacune de ces options et dites-moi que notre gouvernement ne devrait pas avoir à cœur de défendre les intérêts de son peuple.
Quant au blogueur politique Alex Au, il propose que les pays déploient leur flotte vers le Myanmar pour intercepter les passeurs et les victimes du trafic d'êtres humains:
Patrolling about 300 – 400 km of coast is a lot easier than scouring half the Andaman Sea looking for smugglers’ boats. Picking people up before they get hungry or thirsty reduces the amount of costly medical intervention required.
The navies should intercept and check all boats leaving Burmese waters. Refugees or trafficked persons found on board should be removed and the boat seized. Traffickers and boat operators should of course be taken into detention.
Patrouiller le long de 300 – 400 km de côtes est beaucoup plus facile que d'écumer la moitié de la mer d'Andaman à la recherche des bateaux des passeurs. Recueillir les gens avant qu'ils n'aient faim ou soif réduit le nombre d'interventions médicales coûteuses à effectuer.
Les marines nationales devraient intercepter et contrôler tous les bateaux qui quittent les eaux birmanes. Les réfugiés ou les victimes du trafic d'êtres humains découverts à bord devraient être emmenés et le bateau saisi. Les trafiquants et les exploitants des bateaux devraient bien sûr être placés en détention.