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Un journal mexicain lance une édition en langue maya

Catégories: Bélize, Guatémala, Mexique, Ethnicité et racisme, Média et journalisme, Médias citoyens, Peuples indigènes
Imagen de la edición de La Jornada Maya publicada en Twitter por @YUCATANALMINUTO.

Photo de l'édition maya de La Jornada, quotidien du Mexique, publiée sur Twitter par @YUCATANALMINUTO.

La Jornada, l'un des journaux les plus importants du Mexique, a récemment lancé une édition en langue maya. Elle sera publiée quotidiennement à Mérida, la capitale de l'Etat de Yucatán au sud-est du Mexique.

D'après l'Institut national des statistiques et de la géographie du Mexique [1], le maya est la deuxième langue indigène la plus parlée au Mexique avec environ 800 000 locuteurs, précédée par le nahuatl. La plupart d'entre eux se trouvent dans les Etats mexicains de Yucatán [2]Campeche [3]Quintana Roo [4]Tabasco [5], et Chiapas [6].

L’institut [1] explique qu'au Mexique, environ 6,6 millions de personnes parlent une langue indigène, ce qui représentait 6.5% de la population en 2010. Ce chiffre est en diminution depuis 1930, quand il s'élevait à environ 16% de la population.

Le maya est également parlé dans des pays d'Amérique Centrale, à Belize et au Guatemala. Il fait partie de l'héritage de la culture maya, célèbre pour sa richesse littéraire et architecturale, comme le prouvent les structures de Tikal [7] au Guatemala et Chichén-Itzá [8] au Mexique.

Voici [9] comment La Jornada a présenté sa nouvelle édition en langue maya :

Con dos plataformas, una digital y otra de papel, la franquicia más reciente del periódico nacional La Jornada se publica con la intención de responder a las necesidades informativas de la sociedad yucateca, cambiante, diversa y culta, con todas las herramientas del periodismo.

Echamos mano de la noticia que no se conforma con la versión oficial, sino en presentar todos los ángulos de los hechos; la perspectiva editorial insistirá en dar voz a movimientos y actores sociales; la vocación del periodismo crítico; la crónica que narra hechos sin perder capacidad del asombro; el reportaje que profundiza y cuestiona; la entrevista que indaga y sostiene diálogos inteligentes y amenos con los actores políticos, sociales y culturales; el editorial, el artículo y la columna rigurosos e independientes.

Avec deux plateformes, l'une numérique et l'autre sur papier, la franchise la plus récente du journal national La Jornada est publiée avec l'intention de répondre aux besoins d'informations de la société du Yucatán, qui est diverse, changeante et éduquée, en utilisant tous les outils du journalisme.

Nous ne faisons pas conformer les informations à la version officielle, au contraire nous présentons les faits sous tous les angles ; la publication essaie de donner une voix aux mouvements sociaux et à leurs représentants ; la vocation de journalisme critique ; la capacité de donner des informations tout en créant l'étonnement ; le reportage qui approfondit et questionne ; l'interview qui va dans les détails et qui crée des dialogues intelligents et agréables avec des figures politiques, sociales ou culturelles ; la ligne éditoriale, l'article et la tribune rigoureux et indépendants.

Le site Chilam Balam [10] a questionné l'initiative de distribuer ce quotidien en langue maya :

Un periódico diario editado en lengua maya y en español, destinado a toda la Península de Yucatán… ¿Es esto en verdad posible? En un contexto donde la cultura maya se ha usado sólo para “vender” turismo, en un contexto social donde la gente la han avergonzado de declararse maya y las instituciones educativas menosprecian nuestra cultura y especialmente nuestro idioma ¿es esto en verdad posible?

Un quotidien en maya et espagnol, destiné à toute la péninsule de Yucatán. Est-ce vraiment possible ? Dans un contexte où la culture maya n'a été utilisée que pour “vendre” du tourisme, dans un contexte social où les gens ont eu honte de s'appeler mayas, et où les institutions éducatives dévalorisent notre culture et surtout notre langue, est-ce vraiment possible?

Sur l'importance d'avoir une publication en maya, le linguiste Enrique Martín Briceño explique :

Todavía hoy son muchos los que ignoran que el maya yucateco es un idioma –como el español, el náhuatl, el inglés y el chino– y que lo hablan más de 800 mil personas en Yucatán, Campeche y Quintana Roo. Muchos son también los que no saben que el maya peninsular es la lengua indígena mexicana con el mayor número de hablantes y que cuenta con una importante literatura colonial y una floreciente literatura contemporánea (el Premio Nezahualcóyotl de Literatura en Lenguas Mexicanas 2014 lo obtuvo la narradora maya Sol Ceh Moo).

Encore aujourd'hui, beaucoup ignorent que le maya du Yucatán est une langue comme l'espagnol, le nahuatl, l'anglais ou le chinois, et que plus de 800 000 personnes le parlent dans le Yucatán, le Campeche et le Quintana Roo. Beaucoup ignorent également que le maya péninsulaire est la langue indigène mexicaine avec le plus grand nombre de locuteurs, qu'il a une grande littérature coloniale et que sa littérature contemporaine est florissante (le romancier Maya, Sol Ceh Moo, a remporté le prix Nezahualcoyotl 2014 pour la littérature en langue mexicaine).

Il ajoute :

Así pues, en una región donde la lengua maya tiene tal número de hablantes –no se trata de una lengua minoritaria, sino de una lengua minorizada–, en una zona donde la cultura indígena tiene tal vitalidad –y no solo en el medio rural: Mérida y Cancún son en gran medida mayas–, la presencia del idioma y la cultura originarios no puede reducirse al ámbito familiar y a los contados espacios públicos que hasta ahora se les han otorgado.

Ainsi, dans une région avec un si grand nombre de locuteurs mayas, il ne s'agit pas de langue minoritaire, mais marginalisée. Dans un endroit où la langue indigène a tant de vitalité, et pas seulement dans les zones rurales (Mérida et Cancun sont en grande partie mayas), la présence de la culture et de la langue originaires ne peut pas rester réduite à l'environnement familial et aux quelques espaces publics qui lui ont été attribués jusque maintenant.

L'utilisateur Twitter Martin del Mar se réjouit de la diffusion du journal :

Le meilleur quotidien mexicain arrive dans la péninsule du Yucatán. La Jornada Maya sera diffusée à Mérida aujourd'hui. Félicitations !

Chakz Armanda a annoncé qu'il en serait un des contributeurs.

La Jornada Maya arrive à Yucatán, et j'y contribuerai régulièrement. Emparez-vous de votre exemplaire gratuit !

La version nationale de La Jornada est un tabloïd avec une position critique envers le gouvernement, toujours aligné avec le discours des partis politiques du pays qui s'identifient comme “de gauche”, parmi lesquels Parti de la révolution démocratique [16], et le plus récent Mouvement Régéneration nationale [17]. Clarin (Chili) et la BBC (Royaume-Uni) sont quelques unes des organisations associées avec l'édition nationale du journal.

Pour sa deuxième étape de distribution, La Jornada Maya prévoit d'atteindre les Etats de Quintana Roo et Campeche, au sud est du pays. En cas de succès, il s'agira alors d'une des initiatives les plus intéressantes entreprises pour préserver et rendre présente une langue amérindienne [18] risquant de tomber en désuétude et peut-être de s'éteindre.