Netizen report: la crise des réfugiés suscite des mouvements d'amour et de haine

Refugees at Keleti train station in Budapest, September 2015. Photo by Mstyslav Chernov via Flickr (CC BY-SA 4.0)

Des réfugiés à la gare de Keleti, à Budapest, en septembre 2015. Photo de Mstyslav Chernov, via Flickr (CC BY-SA 4.0)

Juan Arellano, Mary Aviles, Ellery Roberts Biddle, Sam Kellogg, Hae-in Lim et Sarah Myers West ont contribué à ce rapport.

Le rapport Netizen de Global Voices Advocacy donne un aperçu international des défis, victoires et tendances émergentes dans le domaine des libertés numériques .

[sauf mention contraire, tous les liens de cet article sont en anglais.]

La question du droit d'accès au numérique fait désormais irruption dans les histoires qui circulent sur ces réfugiés qui viennent en masse en Europe de l'Ouest, fuyant la Syrie et d'autres pays rongés par les conflits. L'accès aux réseaux de communication est en effet devenu vital pour ceux qui traversent des territoires inconnus à pied, et à qui les autorités d'Europe du Sud et du Centre font subir une pression grandissante aux frontières. Les applications de géolocalisation et de cartographie sont devenus aussi essentielles que les services de messagerie et les réseaux sociaux pour communiquer et échanger sur la stratégie à adopter.

En Hongrie, en Serbie et en Allemagne, des bénévoles locaux ont répondu à ce besoin en utilisant tous les moyens possibles pour procurer aux réfugiés des téléphones portables chargés, crédités et équipés de WiFi. Kate Coyer, une professeur de communication à l'Université d'Europe Centrale de Budapest, a travaillé avec des collègues et des amis pour mettre en place des points d'accès au WiFi dans les endroits où il y a le plus de passage, ainsi que des prises et des batteries de rechange pour les téléphones portables. Dans une interview avec le New Scientist, Kate Coyer déclare : “Je ne veux pas faire une hiérarchie des besoins humanitaires prioritaires, parce que l'un ne remplace pas l'autre, mais les besoins de communication sont de toute évidence vitaux et doivent être disponibles à tout moment.”

Les discussions en ligne à propos de l’afflux massif de personnes en Europe de l'Ouest sont devenues haineuses sur certains médias sociaux, et de nombreux politiques allemands, en réponse à leur travail d'accueil des nouveaux venus dans leur pays, reçoivent des menaces de violences, voire de mort. Le député allemand Ozcan Mutlu, d'origine turque, raconte qu'il a reçu un message disant : “Il est temps de réouvrir Auschwitz, Buchenwald etc. – c'est là que vous devez être, immondes turcs !”

Des tensions similaires se jouent sur Facebook, et l'entreprise est critiquée par des utilisateurs et des politiques qui estiment qu'elle ne fait pas tout ce qu'il faudrait pour modérer les propos haineux qui visent les réfugiés. Cette semaine, Facebook a annoncé sa volonté de travailler avec le gouvernement allemand, pour limiter les discours de haine et la xénophobie sur son réseau, après que le ministre de la Justice Heiko Maas a discuté de ce sujet directement avec les dirigeants de Facebook. Heiko Maas a annoncé la création d'un groupe de travail incluant Facebook, le ministère de la Justice, des fournisseurs d'accès à Internet, et d'autres réseaux sociaux qui travailleront ensemble à identifier le contenu haineux et à l'enlever rapidement des sites.

Les autorités attaquent l'ONG équatorienne de défense de la liberté de la presse

Fundamedios, une organisation qui se bat pour la liberté des médias équatoriens, est menacée de fermeture, car on l'accuse d'être devenue un parti politique. Le Secrétariat National de la Communication a entamé des procédures pour fermer l'ONG, lui laissant dix jours pour se défendre, avant une prise de décision finale. Le Président équatorien Rafael Correa est en conflit depuis plusieurs années avec les médias qui critiquent son gouvernement [français], et une loi très restrictive sur la communication, considérée par beaucoup comme la plus liberticide de la région, a été mise en place en 2013. “Non content de persécuter, harceler, donner des amendes et insulter les journalistes critiques de la presse privée, le gouvernement équatorien menace désormais de dissoudre la plus importante des organisations de défense de la liberté de la presse”, a réagi Carlos Lauria, coordinateur du Comité de Protection des Journalistes.

Des utilisateurs iraniens de Facebook condamnés à sept ans de prison

La cyber-militante iranienne Shahsavandi Shirazi figurait parmi huit autres militants, tous arrêtés en 2013. En 2014, Shahsavandi Shirazi a été condamnée pour insulte envers Ali Khamenei, le Guide suprême, et l’ ayatollah Khomeini, le fondateur de la République islamique, mais aussi pour conspiration contre l’État, et publication d'images pornographiques. La semaine dernière, elle a déclaré à la Campagne Internationale pour les Droits de l'Homme en Iran [français] que, durant toute la procédure judiciaire, il lui avait été interdit de voir un avocat, et qu'elle avait été interrogée sur sa vie privée et inculpée de crimes qu'elle n'avait jamais commis. Elle a également déclaré que les pages qu'elle administrait sur les réseaux sociaux n'étaient pas politisées, et étaient en fait plus proche du journalisme citoyen.

Un journaliste thaïlandais détenu au motif qu'il “dérange la paix et l'ordre” sur les médias sociaux.

Le grand journaliste Pravit Rojanapruk est détenu par l'armée thaïlandaise, car il aurait posté des informations en ligne susceptible de “déranger la paix et l'ordre”. C'est la deuxième fois que Pravit Rojanapruk, un reporter chevronné qui travaille pour le premier quotidien anglophone du pays, The Nation, est détenu par les autorités en Thaïlande.

Le parlement autrichien met en place un nouveau régime de surveillance

A la mi-octobre, le parlement autrichien votera la loi controversée “Staatsschutzgesetz,” ou Loi de Protection de l’État, dont le projet est de créer dix nouvelles agence de surveillance (une au niveau fédéral, neuf autres dans les états) et de leur octroyer de nombreux pouvoirs de surveillance des citoyens, mais en les encadrant très peu. La loi dit que toutes les données collectées via ce programme seront conservées dans la base de données centrale pour une durée de 5 ans. En outre, cette loi encourage explicitement la coopération avec les services de renseignement étrangers. Cette législation a été ébauchée suite aux attaques terroristes de Paris et Copenhague de ce début d'année, et suscite des réactions très critiques, tant des instituions autrichiennes que des citoyens. Une pétition en ligne contre cette loi “Staatsschutzgesetz” [allemand] a été lancée par le groupe AK Vorrat, et a déjà rassemblé plus de 12.000 signatures.

Les routeurs “onion” soutenus par les “rats de bibliothèque”

Les bibliothèques ont longtemps été des lieux de défense de l'accès libre à l'information et du droit à la vie privée, et se sont à l'occasion battues pour protéger le droit à la vie privée et à la confidentialité des habitudes de lecture de leurs utilisateurs. Mais cette bataille a récemment pris une autre tournure. Une bibliothèque du New Hampshire aux États-Unis, qui avait été la première au monde à se mettre sur le réseau de navigation anonyme Tor, autorisant ainsi ses lecteurs à utiliser Internet via ce réseau, a été contactée par le département de Sécurité Intérieure par l’intermédiaire de la police locale. Après une rencontre avec la police et des officiels de la ville, la bibliothèque a consulté son conseil d’administration a ce sujet. Le conseil d'administration a approuvé la réinstallation de Tor.

L’Internet Engineering Task Force [groupe informel qui élabore les standards d'internet] et l’Assigned Numbers Authority [organisation qui gère l'adressage IP d'Internet] ont mis en place des sites .onion en leur attribuant un statut de “domaine spécial”, autorisant les administrateurs de site sur les réseaux cachés de Tor à utiliser des certificats SSL et TLS. Le résultat devrait être une vraie amélioration de la sécurité sur les sites en .onion.

Bonnes nouvelles

Le Washington Post a annoncé la sortie d'une nouvelle série vidéo : “Menaces internationales à la liberté de la presse”, qui comprend des témoignages filmés de 30 journalistes, blogueurs, photographes et militants à travers le monde qui ont fait face à des menaces directes liées à leur travail. Endalk Chala et Ali Abdulemam, deux auteurs de Global Voices travaillant respectivement en Éthiopie et au Bahreïn, figurent parmi ces journalistes.

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