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Arrestation et prison pour un journaliste et un militant au Liban

Catégories: Afrique du Nord et Moyen-Orient, Liban, Censure, Droit, Liberté d'expression, Médias citoyens, Advox
Un tableau de l'humoriste jordanien Wael Shateely critiquant la répression de la liberté d'expression dans la région. Les citations disent: "Il est préférable de garder le silence", "opprimez-vous vous-memes  avant que vous soyez opprimé", "Laissez la responsabilité aux fonctionnaires," et "Les pensées éclairées causent des maux de tête." Source: www.sha3teely.com

Un tableau de l'humoriste jordanien Wael Shateely critiquant la répression de la liberté d'expression dans la région. Les citations disent: “Il est préférable de garder le silence”, “Opprimez-vous vous-mêmes avant que vous soyez opprimé”, “Laissez la responsabilité aux fonctionnaires,” et “Les idées brillantes causent des maux de tête.” Source: www.sha3teely.com

Deux utilisateurs libanais de Facebook se sont retrouvés condamnés à des peines de prison pour les commentaires qu'ils ont publiés sur le site.

Le 6 octobre 2015, le militant politique M. Michel Douaihy a été libéré après une détention de neuf jours pour une publication sur Facebook [1]. [1] Dans son billet, il avait critiqué ce qu'il a décrit comme un traitement de faveur accordé au salafiste M. Ahmad Al-Assir lors de son arrestation. Le libanais Ahmad Al-Assir [2] [fr] a été arrêté à l'aéroport international de Beyrouth, le 15 août, après une cavale de deux ans. Il est entré dans la clandestinité après avoir créé une milice armée à Saïda, dans le sud du Liban en ordonnant à ses hommes d'ouvrir le feu sur un poste de contrôle de l'armée libanaise en juin 2013. Il essayait d'aller au Nigeria via le Caire, en utilisant de faux papiers d'identité palestiniens. La façon dont M. Al-Assir avait été “choyé” lors de son arrestation a été critiquée, parce qu'il n'avait pas été battu, comme les autres militants qui sont parfois maltraités.

Douaihy (à gauche) et Nazzal. Les deux images prises à partir de Facebook.

Douaihy (à gauche) et Nazzal. Les deux images prises à partir de Facebook.

Le bureau de la Sécurité générale est l'organe officiel du gouvernement qui a arrêté M. Douaihy, en l'accusant d'incitation aux tensions inter religieuses et de diffamation. [3] Ce sont les mêmes accusations qui ont provoqué la condamnation du journaliste M. Mohammad Nazzal du journal Al-Akhbar [4]. Ce journaliste a été condamné à six mois de prison et au paiement d'une amende de 633 dollars.

Bien que M. Douaihy ait été libéré, il a été inculpé en vertu de l'article 386 du code pénal libanais qui criminalise la diffamation contre le président, les fonctionnaires et des particuliers. M. Douaihy a été condamné à deux mois de prison. Toutefois, cette peine a été effacée par les neuf jours de détention préventive qu'il avait déjà passés en prison et par une amende de 200 USD.

 

Une copie de l'acte d'accusation de M. Michel Douaihy

Une copie de l'acte d'accusation de M. Michel Douaihy

 

Les utilisateurs de Twitter ont lancé le hashtag [5] #FreeMichelDouaihy pour attirer l'attention sur son cas. Ses partisans ont également utilisé le hashtag  [6]Article 13 [6] [fr], en référence à l'article 13 de la Constitution libanaise qui garantit la liberté d'expression et la liberté de presse “dans les limites fixées par la loi.” La loi libanaise sur la presse (écrite en 1962 [7]) [8] n'octroie aucune protection explicite aux journalistes ou blogueurs. Parallèlement à  cette campagne en ligne, les amis et la famille de M. Douaihy ont protesté [9] dans sa ville natale Zogherta, au nord du Liban.

“En images, les protestations à Zogherta contre l'arrestation de Michel Douaihy.””

Depuis 2009 [fr], [15] plus de 15 blogueurs et / ou militants ont été arrêtés au Liban, interrogés et menacés à cause de leurs écrits en ligne. Mohamad Najem, un défenseur des droits humains et co-fondateur libanais de Social Media Exchange de Beyrouth, a tweeté en soutien à Michel Douaihi:

Je ne connais pas Michel, mais tout le monde a le droit d'exprimer librement ses opinions sur Facebook ou par tout autre canal #Free_Michel_Douaihi #Beirut

La journaliste Lara Saker a tweeté:

Aujourd'hui, c'est Douaihi Michel, à qui le tour demain?

De même que M. Douaihy, le journaliste Mohammad Nazzal [20] [fr] a été condamné par contumace à six mois de prison assorti d'une amende de 633 dollars pour un billet qu'il a publié sur Facebook il y a deux ans qui contenait la phrase: “le niveau du système judiciaire est aussi bas que mes chaussures” ( #  (‫#‏القضاء_وصرمايتي_سوا‬) [21] ce qui a été interprété comme une calomnie et une diffamation. M. Nazzal a tweeté à propos de la condamnation:

Mon avocat m'a dit, aujourd'hui, que le tribunal pénal de Beyrouth m'avait condamné à 6 mois de prison par contumace … PARFAIT! :)

Les journalistes et les blogueurs du Liban et du Moyen-Orient ont exprimé leur soutien  [23]à Nazzal sur les médias sociaux:

أنا لست صحافية، وبغض النظر عن موافقتي أو رفضي للعبارة التي أوردها الزميل محمد نزال، أرفض تكميم الأفواه، وأطالب بإسقاط الدعوى المرفوعة عليه. وأؤكد على حريته الكاملة في التعبير عن رأيه، من دون تعريضه لأي ملاحقة أو سجن. فإذا كان هاشتاغ ‫#‏القضاء_وصرمايتي_سوا‬ [24] عقابه السجن، فلنسجن كلنا معاً. ‫#‏كلنا_محمد_نزال‬ [25]‫#‏القضاء_مش_قدر‬ [26]‫#‏مع_حرية_التعبير‬ [27]

Je suis journaliste, indépendamment de mon opinion sur le status de mon collègue Mohammed Nazzal, je refuse toute limitation à la liberté de parole et je demande que la plainte déposée contre lui soit abandonnée dès que possible. Et l'assurance de sa liberté d'exprimer son opinion, sans s'exposer à des poursuites. Si un simple billet sur les médias sociaux peut conduire à des poursuites contre son auteur, poursuivez-nous tous. .#We_All_Are_Mohammd_Nazzal #With_FreeSpeech

Le journaliste Ramez El Kadi a tweeté cette déclaration qui a été largement partagée:

Je suis journaliste, indépendamment de mon opinion sur le status de mon collègue Mohammed Nazzal, je refuse toute limitation à la liberté de parole, et je demande que la plainte déposée contre lui soit abandonnée dès que possible

Le journaliste Ghassan Saoud a publié sur sa page Facebook une déclaration en soutien à M. Nazzal, qu'il a décrit comme un journaliste qui n'a jamais été corrompu ou compromis. M. Saoud a souligné que cette attaque contre M. Nazzal allait au-delà d'une attaque contre la liberté d'expression, c'est une attaque personnelle et politiquement orchestrée contre lui et le genre de journaliste qu'il est.

محمد نزال صحافي لم يرتشي يوماً، ولو بكرافات أو كارت حفلة فنية أو حسم هون أو هونيك..محمد نزال صحافي لم يكتب يوماً مقال ت…

Posted by Ghassan Saoud [30] on Wednesday, October 7, 2015 [31]

Mohammed Nazzal est un journaliste qui ne s'est jamais vendu ou compromis.