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Gwen Rakotovao: “La danse et l’art, des vecteurs pour promouvoir le vivre ensemble”

Catégories: Afrique Sub-Saharienne, Madagascar, Arts et Culture, Education, Femmes et genre, Good News, Jeunesse, Médias citoyens
Gwen Rakotovao, NYC 2013 avec sa permission

Gwen Rakotovao, en représentation (avec son autorisation)

La température est agréable pour un soir de Février à Paris.

Le rendez-vous avec Gwen Rakotovao [1] est donné dans un restaurant du 14 ème arrondissement  où le gérant est toujours de bonne humeur. Il nous salue avec allégresse et nous demande si on souhaite un apéritif. Des chansons malgaches remplissent la salle d'une musique douce mais enlevée. Gwen [1]arrive à grand pas et avec un grand sourire. Elle s'excuse pour son léger retard et explique qu'elle vient juste de finir une répétition importante pour son prochain spectacle avec un chorégraphe d'origine nigériane. Sa carrière de directrice artistique, de chef d'entreprise, de mannequin et d'auteur de livres pour enfants se déroule à 100 km/heure et l'ont déjà emmenée à voyager sur les cinq continents.

Gwen a l'habitude de vivre à toute vitesse comme son parcours déjà riche en accomplissements l'atteste. Issue d'une famille malgache installée en Normandie, Gwen veut très tôt croquer la vie à pleines dents. Enfant, elle voulait devenir avocate puis le virus de la danse l'a emporté.

A 17 ans, avec son bac scientifique en poche, Gwen part rejoindre l’Institut de formation professionnelle Rick Odums [2] à Paris pour faire de la danse son métier. Elle s'envole ensuite pour New-York où elle intègre la prestigieuse école “‘Alvin Ailey American Dance Theater”. Même si elle n'a pas vraiment le temps de se poser, Gwen a accepté de répondre aux questions de Global Voices sur sa vision de son rôle en temps qu'artiste dans un monde qui n'arrête pas de changer.

Gwen Rakotovao sur scène avec son autorisation

Gwen Rakotovao sur scène avec son autorisation

Global Voices GV:  Tu es une une danseuse, chorégraphe, mannequin et auteure. Tu as vécu 8 ans à New York où tu as créé ta propre compagnie compagnie de danse, la Gwen Rakotovao Company. Quand tu fais le bilan de tout ce que tu as déjà accompli à ton jeune age, tu n'as pas un peu le tournis ? Qu'est ce qui te donne la motivation de toujours avancer aussi vite ?

Gwen Rakotovao GR: Il est vrai que j'ai une belle carrière et que j'ai accompli beaucoup de choses mais je reviens rarement sur le passé. Le métier de danseuse et chorégraphe comporte des incertitudes et je préfère rester concentrée sur le présent et le futur proche. En tant qu’artiste, j’ai beaucoup de messages que j’aimerais faire passer et c’est ce qui me motive à me lever le matin, à continuer quand des obstacles surviennent.  Ce sont les changements que je voudrais voir opérer dans le monde et l’envie de poser ma pierre à l’édifice qui me motive à créer, danser, écrire etc…

Gwen nous rappelle qu'elle vient d'une famille d'artiste. Le chanteur Bekoto du groupe malgache mythique Mahaleo est de sa famille. Voici une vidéo prise lors d’ un festival de danse à New York où la Gwen Rakotovao Company dansent sur un air composé et chanté par Bekoto, Lendrema :

GV:  Tu travailles en ce moment en collaboration avec un chorégraphe nigérian. Quel regard portes-tu sur l'évolution de la danse en Afrique et quels sont les points forts ou les particularités que les novices ignorent sur la danse africaine?

GR: L’Afrique est un continent qui comporte tant de nombreux pays, de cultures diverses et donc de danses et des personnalités différentes qu’il est difficile d’en faire un résumé en quelques phrases.
Une chose est sûre c’est qu’en Afrique aujourd’hui, il y a de nombreux jeunes artistes très talentueux qui veulent pousser et opérer un changement pour participer au rayonnement du continent. Et c'est toujours un plaisir de les rencontrer et d'échanger avec eux.

GV:  Le style de ta compagnie de danse est inspiré de différentes danses de toutes les cultures. Est ce que ce thème de la diversité est quelque chose que tu mets en avant par choix, une manière de faire l'éloge du multiculturalisme?

GR: Plus qu’un choix, c’est l’affirmation de ce que je suis. Je suis née en France de parents malgaches. De ce fait j’étais destinée à représenter le multiculturalisme. Mon côté New-Yorkais n’a fait qu’enrichir ce trait multiculturel qui est en moi. Ce n’est pas forcément évident d’assumer une triple culture dans ce monde où il est bon d’appartenir à un groupe de peur d’être rejeté par les autres. Et depuis très jeune, j’ai dû faire ce choix de respecter ce que je suis c'est-à-dire un être humain avec des cultures différentes. Et je prends plaisir à représenter cette idée même si ce n’est pas tous les jours une mince affaire.

GV:  “L'Amour, La Liberté” est le titre d'une de tes chorégraphies. Tu es aussi fondatrice d'un programme destiné aux enfants défavorisés et orphelins du centre Ketsa de Vontovorona. On peut dire que tu es une personne engagée. Quels sont les thèmes sociaux qui te passionnent et quel serait le rôle de la danse dans notre société actuelle?

GR: La danse, j’irai même jusqu’à dire l’art en général, sont des vecteurs culturels primordiaux pour opérer des changements et jouent un rôle important dans notre société. Je pense que chaque artiste a comme mission de faire passer des messages. Le mien est simplement de lancer des messages d’espoir pour un monde meilleur. J’espère qu’un jour enfin, malgré nos différences nous puissions vivre ensemble. C’est une utopie mais c’est ce que je défends et c’est pour cette cause que je m’engage.

GV:  Il y a-t-il une partie de Gwen que le grand public ne connaît pas et que tu aimerais partager ?

GR: Je pense que l’interview le résume bien mais Gwen est une grande rêveuse (elle sourit).

GV: Merci Gwen et bon courage pour tous tes projets !

Un grand merci à Patrick, aka Pitchboule [3], qui a facilité cette rencontre et cet entretien.