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Où va l'argent sale saisi par la police au Mexique, en Colombie et aux États-Unis?

Catégories: Colombie, Etats-Unis, Mexique, Economie et entreprises, Gouvernance, Médias citoyens
Las suntuosas fortunas confiscadas por instituciones de justicia en Colombia, México y Estados Unidos son reutilizados por distintos organismos y ven numerosos destinos en esferas públicas y privadas. Fotografía de Susana González Bloomberg vía Getty Images. Tomado por Univisión y republicada con permiso. [1]

Les immenses fortunes confisquées par les institutions judiciaires en Colombie, au Mexique et aux États-Unis sont réutilisées par divers organismes et trouvent de nombreuses destinations dans les sphères publiques et privées. Photographie de Susana González Bloomberg via Getty Images. Empruntée par Univision et republiée avec autorisation.

La version originale de ce reportage [2] a été réalisée par Mayra Rocha d'Univision, aux États-Unis et a été republiée sur CONNECTAS et par Global Voices dans le cadre d'un accord de partage de contenus.

“Tu  imagines avoir tellement d'argent que tu ne sais même plus combien tu en as?”. C'est ce que le leader colombien du cartel de Cali, Gilberto Rodríguez Orejuela [3], confiait à celle qui fut sa compagne pendant huit ans. Cette anecdote n'est qu'un aperçu de la portée économique du trafic de drogue, un commerce désormais géré par de véritables multinationales du crime.

En 2011 le magazine Forbes classait Joaquín “El Chapo” Guzmán [4], chef du cartel de Sinaloa, parmi les hommes les plus riches du monde et le second plus puissant du Mexique, avec une fortune estimée à un milliard de dollars. Aujourd'hui, ce capital s'élèverait à plusieurs milliards. Quant à Rodríguez Orejuela, le principal ex-leader du cartel de Cali, au moment de son arrestation en 1995, sa fortune dépassait le milliard de dollars, selon le ministère public colombien. De la même manière, le patrimoine de Pablo Escobar [5], le leader du cartel de Medellín, a été estimé entre 9 et 15 milliards de dollars.

Mais que deviennent ces fortunes quand les trafiquants sont arrêtés? Aux États-Unis, on privilégie l'unité ayant effectué la saisie. Dans un premier temps, l'argent retrouvé ou les biens confisqués sont confiés à un procureur qui détermine si les preuves sont suffisantes pour que l'affaire soit jugée. Une fois que l'origine illégale de l'argent est prouvée et que les victimes ont été indemnisées, le Département de la Justice, dans le cadre d'une loi appelée Distribution équitable de fonds, répartit l'argent restant aux services de police ayant participé à l'enquête. 

Dans ce reportage diffusé par le site d'information latino-américain CONNECTAS [6], l'inspecteur Rodolfo Rodríguez de la Police de Los Angeles commente ;

Por ley, 65 por ciento va al departamento que confiscó, 35 por ciento se divide entre el estado y los fiscales, para continuar operaciones antidroga.

Comme la loi l'indique, 65 pour cent revient à l'unité qui a fait la saisie, l'Etat et le ministère public se partagent 35 pour cent, pour continuer les opérations anti-drogue.

Dans une enquête réalisée par le Washington Post [7], des statistiques du département de la justice montrent que la Police de Los Angeles a reçu, entre 2001 et 2014, 18,4 millions de dollars grâce à ce programme, la Police de New York, 27 millions de dollars et le bureau du shérif de Los Angeles, 24,3 millions de dollars. Selon ce reportage, cet argent est réinvesti dans du matériel, de la technologie, des entraînements et des opérations pour continuer à combattre le trafic de drogue. Si les biens sont saisis lors d'une opération menée au niveau fédéral en collaboration avec des institutions comme le FBI ou la DEA, l'argent est placé sous la tutelle des Ministères des Finances et de la Justice et les biens et propriétés sont vendus aux enchères.

Cela fut le cas de la villa du “capo” colombien Pablo Escobar à Miami Beach, rachetée par un couple de Floride il y a plus de 20 ans pour moins d'un million de dollars. Un prix très bas pour une villa avec vue sur la mer.

Propriétés mises aux enchères et biens répartis entre les victimes

Au Mexique, qu'il s'agisse de maisons, de chevaux ou de grosses cylindrées, lorsque les biens ne sont pas réclamés, ils finissent aussi aux enchères. Selon Alonso Carriles, directeur du Service d'Administration et d'Aliénation de Biens (une dépendance du Ministère des Finances mexicain), quand des biens sont saisis, ils sont mis sous scellés et à disposition du procureur général jusqu'à ce que les procédures pénales contres leurs propriétaires soient ouvertes. La quantité d'argent sous scellés pourrait être supérieur à 330 millions de dollars.

Selon l'avocat pénaliste Gabriel Regino, des bâtiments, des terrains, des hôtels et des maisons peuvent être vendus aux enchères ; toutefois les maisons sont plus difficiles à vendre, en effet, acheter une maison dans laquelle a vécu un “capo” ou sa famille peut causer des problèmes à ses nouveaux propriétaires. C'est pour cette raison que le gouvernement mexicain a plutôt choisi de les louer à des organismes à but non lucratif.

En Colombie, une fois les biens saisis, commence une période pendant laquelle l'accusé peut défendre sa propriété. Si l'est prouvé que les biens ont été acquis de façon illicite, le Procureur Général en fait don à une entreprise administrant les biens du Fonds de Réparation des Victimes et de Lutte contre le Crime Organisé. C'est là que se sont retrouvés beaucoup de biens ayant appartenu à Pablo Escobar et à d'autres leaders des cartels de Medellín et Cali. C'est pourquoi le fils de Pablo Escobar a assuré publiquement que ni lui ni sa famille n'ont conservé d'argent ou tout autre bien issu du narcotrafic. Selon le fils de Pablo Escobar, tout est resté entre les mains du gouvernement. Selon ses dires [8], il n'a hérité qu'une montre de son père.

CONNECTAS [9]