Le rêve olympique brisé d'une gymnaste de Trinité-et-Tobago

Screenshot of a YouTube video of Trinidadian gymnast, Thema Williams, practising at her coach John Geddert's gym in the United States.

Capture d'écran d'une vidéo YouTube montrant la gymnaste trinidadienne Thema Williams s'entraînant avec son coach John Geddert aux Etats-Unis.

La controverse entourant la représentante de Trinité-et-Tobago aux épreuves de gymnastique des prochains Jeux olympiques au Brésil aura comporté plus de retournements qu’un enchaînement de gym.

Petit récapitulatif : la gymnaste trinidadienne Thema Williams, initialement annoncée comme représentante de son pays pour les prochains JO lors du Test Event à Rio, a soudainement été remplacée par Marisa Dick, qui possède également la nationalité canadienne. Le comité de direction de la Fédération de gymnastique de Trinité-et-Tobago a évoqué cette décision comme étant dans le meilleur intérêt pour Williams, qui souffrait d’une blessure. Cette désignation semble en fait davantage liée à une photo d’elle seins nus, postée sur Instagram, qui lui a valu d'être convoquée devant une commission disciplinaire quelques semaines seulement avant ce revirement. Ironie du sort, une photo topless de sa rivale est apparue peu après sur Snapchat.

Nombreux sont ceux qui ont dénoncé le retrait forcé de Williams comme illégal ; en réalité, son avocat a tenté de contester cette décision avant que sa remplaçante ne débarque à Rio, sans succès. Depuis son retour prématuré, Williams et son équipe ont communiqué leur intention de poursuivre en justice la Fédération de gymnastique de Trinité-et-Tobago pour demander des « dommages et intérêts et des excuses pour tous les méfaits » perpétrés par la Fédération. Wired868, le site sportif qui a abondamment couvert les développements de cette affaire, mentionne :

According to Williams’ contract with the local gymnastics body, she could only have been removed from the competition by the head of delegation after consultation with her coach, Geddert, and relevant medical personnel.
Marquez [the TTGF president] confirmed at a press conference […] that the TTGF did not tick all those boxes but countered that the body was forced at act swiftly in the interest of the sport, after concerns about Williams’ health.

Selon le contrat liant Williams à l’instance locale de gymnastique, elle ne peut être exclue de la compétition par le chef de la délégation qu’après consultation de son entraîneur, Geddert, et du personnel médical compétent.
Marquez [le président de la Fédération de de gymnastique de Trinité-et-Tobago] a confirmé lors d’une conférence de presse […] que la Fédération n’avait pas rempli tous les critères mais qu’elle se devait de réagir rapidement dans l’intérêt du sport, en raison des inquiétudes entourant la santé de Williams.

Le site a également fait allusion à un conflit d’intérêts :

A posting on the International Gymnastics Federation (FIG) website, which was last updated in 2015, listed Dick’s coaches as Ovidiu Serban and Ricardo Lue Shue with Anita Pelletier as choreographer.
Lue Shue, who is the TTGF second vice president, and his wife, Donna Lue Shue, who is the assistant treasurer, were involved in the decision to replace Williams with Dick.

Un message posté sur le site de la Fédération internationale de gymnastique, mis à jour pour la dernière fois en 2015, fait apparaître Ovidiu Serban et Ricardo Lue Shue comme entraîneurs de Dick, et Anita Pelletier comme sa chorégraphe.
Lue Shue, deuxième vice-président de la Fédération de gymnastique de Trinité-et-Tobago, et son épouse Donna Lue Shue, trésorière adjointe, ont participé à la décision de remplacer Williams par Dick.

Dans son action en justice, Williams dénonce, entre autres, une violation de l’accord passé avec les athlètes, un traitement inéquitable, de la mauvaise foi, du favoritisme, et des dommages liés à ces abus. Ses avocats ont demandé à ce que sa sélection pour les prochains Jeux olympiques soit confirmée, que le Comité olympique de Trinité-et-Tobago déclare illégale l’action de la Fédération de gymnastique de Trinité-et-Tobago, et que les dommages causés puissent être pris en compte quant à la bourse attribuée par l’université du Michigan (que Williams a refusée afin de poursuivre son rêve olympique).

Pendant ce temps, le président du Comité olympique de Trinité-et-Tobago, Brian Lewis, a déclaré que l’organisation avait bien reçu confirmation de la Fédération de gymnastique locale que seule une place qualificative pour les JO était affectée à Trinité-et-Tobago. Depuis l’éviction de Williams du Test Event, la seule gymnaste éligible demeure Dick. La Fédération aura jusqu’au 9 mai pour sélectionner une représentante.

Cependant, lors d’une annonce qui aura surpris de nombreux internautes, le Comité olympique de Trinité-et-Tobago a proclamé que c'est Dick qui participerait aux Jeux de Rio.

Il était de notoriété publique que la gymnaste obtenant le meilleur score lors des Jeux du Commonwealth, à Glasgow, représenterait son pays à Rio. Et cette athlète était Williams. Dick avait-elle connaissance qu’il lui restait encore une chance de participer aux JO ? La Fédération internationale de gymnastique est-elle impliquée d’une façon ou d’une autre dans cette décision ? Williams a-elle encore une chance de représenter son pays à Rio ?

Les internautes se sont davantage inquiétés de savoir si Williams pourrait poursuivre ou non son rêve olympique – une lueur d’espoir demeurait encore. Wired868 a interrogé l’avocat canadien du droit du sport Emir Crowne, qui a déclaré :

‘There does exist a chance of Thema still going to the Olympics. There is a committee called the Tripartite Commission; and in every sport they deal with exceptions to the rule…The deadline to file that application was January 15. But they do allow late applications in exceptional circumstances. And I think it is safe to say that this is nothing short of exceptional circumstances.’

Il existe une chance pour que Thema puisse se rendre aux Jeux olympiques. Une commission appelée commission tripartite est chargée, dans chaque sport, de traiter les exceptions à la règle… La date pour demander un recours était le 15 janvier, mais cette commission autorise les demandes tardives lors de circonstances exceptionnelles. Et je crois que l’on peut dire qu’il ne s’agit rien de moins que de circonstances exceptionnelles.

La commission tripartite du Comité international olympique, accessible via le Comité olympique de Trinité-et-Tobago, constituait le dernier espoir pour Williams, jusqu’à ce que le président de l'instance trinidadienne révèle que :

The FIG [the international gymnastics body] has confirmed today that no name change or replacement is possible at this stage […] Any approach to the Tripartite Commission can only be made through the auspices of the TTOC with the endorsement of the Trinidad and Tobago Gymnastics Federation.

La Fédération internationale de gymnastique a confirmé aujourd’hui qu’aucune modification ou remplacement n’était possible désormais […] Seul le Comité olympique de Trinité-et-Tobago peut faire appel à la commission tripartite, avec l’approbation de la Fédération de gymnastique de Trinité-et-Tobago.

Quelques blogueurs, toutefois, restaient sceptiques quant à la possibilité que la Fédération de gymnastique de Trinité-et-Tobago assume réellement ses actes. Selon les dires du blog Square Peg :

It’s clear that – at best – the TTGF misstepped all over the place in their handling of this matter. They also misstepped in their assumption that this incredibly blatant… screwup… would go unnoticed by wider society. At this point, it would be less of an embarrassment for them to step down and avoid tarnishing T&T’s fledgling involvement in Olympic gymnastics any further.
Of course, that would require them to be more concerned with protecting the sport than with pushing their own agenda.

Il est évident que la Fédération de gymnastique de Trinité-et-Tobago a effectué de nombreux faux-pas dans la gestion de cette affaire. Ils se sont également fourvoyés en imaginant que ce plantage incroyablement flagrant passerait inaperçu auprès de la population entière. A ce stade, il serait moins embarrassant pour eux de démissionner et d’éviter de ternir l’implication naissante de Trinité-et-Tobago dans les épreuves olympiques de gymnastique.
Bien sûr, cela nécessiterait de se concentrer davantage sur la protection du sport que sur celle de leurs propres intérêts.

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