Birmanie : Bannir le mot “Rohingya” n'améliorera pas la situation de cette minorité

Loading a truck with Rohingya refugees. Photo by Steve Gumaer. Source: Flickr, CC License

Chargement d'un camion de réfugiés rohingya. Photo de Steve Gumaer. Source: Flickr, CC Licence.

Pour les organisations étrangères de défense des droits humains, les Rohingya font partie des minorités ethniques les plus persécutées dans le monde. Mais les autorités birmanes et les nationalistes bouddhistes se comportent à leur égard comme s'ils étaient des immigrants clandestins vivant dans l'Etat d'Arakan dans l'ouest du pays.

Le ministre des Affaires étrangères du Myanmar demande aux gouvernements des pays tiers de s'abstenir d'utiliser le terme rohingya car il est jugé insultant par de nombreuses personnes dans le pays.

Le mois dernier, l'ambassade des Etats-Unis au Myanmar a pourtant publié un communiqué pour exprimer ses condoléances aux familles des réfugiés rohingya ayant pris la mer qui ont péri lors d'un naufrage.

…we extend our condolences to the families of the victims, who local reports state were from the Rohingya community. Restrictions on access to markets, livelihoods, and other basic services in Rakhine State can lead to communities unnecessarily risking their lives in an attempt to improve their quality of life.

… nous présentons nos condoléances aux familles des victimes, qui selon les témoignages sur place appartenaient à la communauté rohingya. Des restrictions concernant l'accès aux marchés, aux moyens de subsistance, et autres services de base dans l'Etat d'Arakan peuvent amener des communautés à risquer inutilement leur vie pour tenter d'améliorer leur qualité de vie.

Ce communiqué a provoqué la colère des nationalistes bouddhistes qui ont organisé une manifestation devant l'ambassade des Etats-Unis. Ils portaient des banderoles avec des messages comme « Ceux qui utilisent le terme rohingya sont nos ennemis ! » et « Ne vous mêlez pas de nos affaires internes ! » .

Ils insistent sur le fait que les Rohingya devraient être appelés « Bengalis » puisque ce sont des « immigrants clandestins du Bangladesh ».

La majorité des Rohingya sont des musulmans qui vivent à la frontière entre la Birmanie et le Bangladesh depuis des siècles. Mais le gouvernement birman refuse aux Rohingya le statut de minorité ethnique nationale.

Depuis 2012, plusieurs affrontements entre groupes radicaux bouddhistes et musulmans ont entraîné le déplacement des Rohingya de leurs communautés. Certains ont fui en bateau vers les pays voisins d'Asie du Sud-Est tandis qu'un grand nombre d'entre eux a trouvé refuge dans des camps de fortune.

Dans un discours au Parlement britannique, le tout premier cardinal de Birmanie Charles Maung Bo a décrit les Rohingya comme étant « parmi les peuples les plus marginalisés, déshumanisés et persécutés dans le monde ».

Ses propos ont été rapportés par le site web World Watch Monitor :

They are treated worse than animals. Stripped of their citizenship, rejected by neighbouring countries, they are rendered stateless. No human being deserves to be treated this way.

Ils sont traités pire que des animaux. Déchus de leur citoyenneté, rejetés par les pays voisins, ils se retrouvent apatrides. Aucun être humain ne mérite d'être traité de la sorte.

Scot Marciel, le nouvel ambassadeur des Etats-Unis au Myanmar, a reconnu la position du gouvernement birman sur le terme rohingya mais a souligné que les communautés avaient le droit d'être appelées par leur nom.

La déclaration de Marciel a suscité des commentaires irrités d'internautes dans le pays bien que l'appellation rohingya n'ait pas été mentionnée par le représentant états-unien.

The Irrawaddy, un site d'information indépendant, a publié un éditorial sur le sujet.

Plutôt que de se disputer pour un terme, il a invité au dialogue entre bouddhistes et musulmans :

…rather than arguing over terminology, it is crucial to initiate a dialogue between the Buddhist majority and Muslim minority in Arakan State and negotiate a lasting solution, which would alleviate the everyday suffering of all communities in the impoverished state.

… plutôt que de se disputer autour d'un terme, il est crucial d'engager le dialogue entre la majorité bouddhiste et la minorité musulmane dans l'Etat d'Arakan et de négocier une solution durable, ce qui allégerait les souffrances quotidiennes de l'ensemble des communautés de cet Etat pauvre.

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