Aucun mot ne peut exprimer ma douleur et ma tristesse suite à l’attentat de Nice. Les victimes sont venues contempler le ciel et maintenant elles y sont. Ce ciel qui était si lumineux devient soudainement sombre et sanglant. Malheureusement encore une fois, la barbarie a frappé. Malheureusement encore une fois ces moments de joie et de gaieté sont transformés en moments de deuil. Malheureusement, encore une fois ces moments d’union et de réunion autour des mêmes symboles de la République et de la France des Lumières sont transformés en des moments de dispersion, de fuite, de crainte d’être touchés par ce symbole de haine, d’obscurantisme et de monstruosité pour lequel la valeur de l’être humain n’a aucun sens.
Je dois avouer que dans ces moments de deuil, ma plume me trahit et les mots manquent. Je me noie dans ce silence morbide depuis jeudi soir. Je suis devant ma page blanche sans rien écrire. Que des idées confuses traversant mon esprit. Que des sentiments embrouillés flottant dans mon cœur.
Néanmoins, je me permettrais de fournir quelques remarques fondamentales qui nous aideront peut-être à mieux comprendre ce qui s’est passé et à décortiquer les tristes événements de ce 14 juillet.
Pays d'origine
A la suite de ces événements meurtriers, les médias n'ont cessé de présenter l'assaillant comme un bi-national franco-tunisien. Ce dernier s'est avéré par la suite être un Tunisien domicilié et travaillant à Nice. A chaque attentat, ces médias mettent l'accent sur le pays d'origine des auteurs. Il faut juste rappeler que les précédents assaillants terroristes sont avant tout des Français, ils sont nés en France, ils ont vécu et ont grandi en France et ils ne connaissent de leur pays d’origine que le nom. Est-il nécessaire d'évoquer leur pays d’origine alors qu’ils sont des Français ?
Aujourd’hui je me permettrais de souligner que si vous voulez qu’on évoque le pays d’origine de ce meurtrier, je tiens à préciser que la Tunisie est considérée comme la France comme la première cible de l’Etat Islamique et depuis la révolution de 2010 elle a subi de nombreuses attaques terroristes. Souvenez-vous de celles du Mont Chaanbi, du Bardo ou de Sousse. Vous voyez, nous sommes donc tous la cible du même ennemi.
Discours constructifs contre l'idéologie de la mort
La fonction du journaliste suite à cet événement peut s'avérer très compliquée. Doit-il informer vite ou informer bien ?
En tout état de cause, le rôle des intellectuels de France et du monde entier est considérable puisqu'ils sont conduits à proposer des discours constructifs par lesquels ils sont censés s’imposer devant l’idéologie de la haine et de la mort qui emballent les petits cerveaux de nos enfants et de nos jeunes qui sont encouragés d’aller s’offrir eux-mêmes au martyre et qui sont entraînés dans un fanatisme qui voit dans la condamnation le plus beau du triomphe et dans les supplices une manière de volupté.
Je ne suis pas la mieux placée pour fournir des conseils et faire la morale à la classe politique, qui selon moi, doit agir de manière efficace en adoptant un seul et unique discours : celui de l’union nationale. Je pense particulièrement à Victor Hugo qui, après son retour de l’exil et à l’occasion de la proclamation de la IIIème République de 1870 prononce les vers suivants comme un leitmotiv :
Je ne vous demande qu’une chose, l’union ! Par l’union vous vaincrez ! […] Serons nous tous autour de la République, en face de l’invasion, et soyons frères , nous vaincrons. C’est par la fraternité que nous sauvons la liberté.
Il est temps de comprendre que le « logiciel » des terroristes a changé pour reprendre le terme de Gilles Kepel et celui des hommes politiques doit changer lui aussi. Invité sur France Inter le vendredi 15 juillet au lendemain de l’attentat au camion qui a coûté la vie à 84 personnes à Nice lors des célébrations du 14 Juillet, le spécialiste du djihadisme s’est attaqué au pouvoir politique en France, qui selon lui, se montre envasé dans ses “chamailleries” habituelles et incapable de faire face au terrorisme contemporain. Réfléchissons ensemble pour trouver les bons moyens pour « écraser cet infâme » qui menace notre civilisation, notre culture, nos arts et tout ce qui est de plus beau et plus noble en nous.
Rappelons-nous que nous sommes des humains
Loin de ces considérations et de ces acceptions qui nous tuent, nous déchirent et peuvent nous séparer, rappelons-nous juste que nous sommes Français, Tunisiens, Kényans, Égyptiens, Turcs, Libanais, Belges…. Rappelons-nous juste que nous sommes humains. Rappelons-nous seulement que la souffrance de la Marianne est la nôtre. Que le terrorisme et le fanatisme ne distinguent pas entre un blanc ou un noir, entre un musulman, un chrétien et un juif, entre un Français et un Tunisien, entre un adulte et un enfant. Le fanatisme n’a qu’une seule couleur le rouge. Les Français eux ont trois couleurs, le bleu, le rouge et le blanc. N’est-ce une vraie allégorie de diversité?
Je suis anéantie, je l’avoue. Encore une fois on a attaqué les valeurs de cette France noble et si grande par ses valeurs républicaines et universelles. La France de Montaigne, Voltaire, Montesquieu, Zola et Camus ne se résigne jamais et sa lumière ne s’éteint jamais.
Le 14 Juillet devient doublement symbolique aujourd'hui. D’une part, il est la commémoration de la Révolution française qui a libéré les Français des injustices, de la tyrannie et de l’obscurantisme religieux. D’autre part, il devient une date qui nous rappelle à chaque fois que nous devons tout faire pour éradiquer cette haine, ce fanatisme qui nous menacent et nous emprisonnent. Et comme l’affirmait Voltaire trois siècles auparavant :
Il est temps de briser ce joug infâme que la stupidité a mis sur notre tête, que la raison secoue de toutes ses forces ; il est temps d’imposer silence aux sots fanatiques gagés pour annoncer ces impostures sacrilèges, et de les réduire à prêcher la morale qui vient de Dieu, la justice qui est dans Dieu, la bonté qui est l’essence de Dieu et non des dogmes impertinents qui sont l’ouvrage des hommes. Il est temps de consoler la terre que des cannibales déguisés en prêtres et en juges ont couverte de sang. Il est temps d’écouter la nature qui crie depuis tant de siècles, ne persécutez pas mes enfants pour des inepties. Il est temps enfin de servir Dieu sans l’outrager.
Vive la France. Et vive l'Humanité.
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