Après l'attaque de Nice, l'impact sur le secteur touristique se fait déjà sentir

Un lieu de recueillement improvisé sur la Promenade des anglais, après l'attaque terroriste meurtrier du 14 juillet 2016. Photo de l'auteur

Un lieu de recueillement improvisé sur la Promenade des anglais, après l'attaque terroriste meurtrier du 14 juillet 2016. Photo de l'auteur

L'attentat du 14 juillet, n'a pas seulement plongé Nice dans l’angoisse et l’horreur, elle a aussi impacté négativement un secteur touristique déjà en ballotage. Le choc économique ne sera pas comparable à ceux des autres villes touristiques frappées récemment par le terrorisme telles que Grand-Bassam en Côte d'Ivoire, Sousse à Tunis et Charm el-Cheikh en Egypte mais mais cette tragédie porte certainement un coup dur à un secteur en difficulté en France.

Nice et ses environs tirent d'importants revenus du tourisme. Tout ce qui peut affecter négativement ce secteur a de sérieuses conséquences sur les activités économiques de la région. Après Paris, Nice est la ville la plus visitée de France.

Selon les données de l’Office de tourisme, en 2015, la ville de Nice a attiré 40 % des 5 millions de touristes qui ont visité la Côte d’Azur, générant près de 1,5 milliard d’euros de retombées économiques annuelles. Le secteur touristique représente 40 % du PIB de la région et emploie 119 000 salariés. Rien que la taxe de séjour lui a rapporté en 2014, la somme de 33 millions d'euros.

Le site de référence touristique industrie-hoteliere.com rapporte que:

Le président du syndicat des hôteliers Nice Côte d'Azur, Denis Cippolini évoque « de nombreuses annulations » et il considère que « la saison d'été et celle d'hiver vont être impactées avec des conséquences sur l'emploi ».

Pour les professionnels du secteur des industries hôtelières de la Côte d’Azur, l'enjeu va bien au-delà de la seule saison touristique estivale 2016. L’ensemble des hôteliers, restaurateurs et cafetiers s’accordent à dire que l'impact sera aussi ressenti aux villes alentours comme Cannes, Antibes/Juan les Pins ou Monaco, tant la Côte d'Azur est perçue, notamment à l'international, comme une seule et même destination. ….

Avec la répétition des attentats meurtriers sur le sol national depuis le début de l’année 2015, les professionnels du secteur du tourisme constatent un recul sensible de la fréquentation hôtelière, notamment de la clientèle en provenance des Etats-Unis, du Moyen-Orient et d’Asie.

Cette crise arrive au moment où grâce au championnat européen de football des nations de l'Euro2016, le tourisme commençait timidement à se reprendre après le choc provoqué par les attentats à Paris en 2015. Touriscope, le site de l'Observatoire du Tourisme de la Côte d'Azur relève ainsi que:

Le rebond est encore plus net sur le chiffre d’affaires généré par cette clientèle, dont la dépense remonte à près de 200€/jour (124€ l’an dernier sur la même période). Dans les hébergements marchands, l’hôtellerie 2-3* et les résidences de tourisme souffrent d’un certain déficit de la demande Loisirs (-5 points d’occupation en Mai), mais la tendance apparaît bien meilleure dans l’hôtellerie 4-5 étoiles

Sur ce segment, la fréquentation en nuitées est restée stable aussi bien en Mai que sur les 5 premiers mois de l’année

La progression des étrangers en 4-5 étoiles (+4%) a compensé la baisse des nuitées françaises. Sur le seul segment Luxe, le revenu par chambre disponible (RevPar) progresse de 8.5% sur les premiers mois de l’année, à 182€ HT (hôtellerie urbaine).

L'impact économique va bien au-delà de la ville de Nice. Le site 2012un-nouveau-paradigme.com donne des chiffres sur les pertes à la bourse des valeurs de Paris:

À Paris, le secteur du tourisme et du transport était sous pression, sanctionné par les investisseurs. Un peu avant 10 heures, le groupe hôtelier AccorHotels perdait 3,39% à 37,29 euros, le loueur de voitures Europcar 3,60% à 7,25 euros et le groupe aérien Air France-KLM 2,05% à 5,88 euros. Eurotunnel perdait 0,73% et ADP 0,43%. Globalement, l'indice européen du tourisme et du transport, parmi les plus fortes baisses sectorielles, abandonne 0,66%.

Le secteur du tourisme «devrait subir de plein fouet les conséquences des atrocités commises à Nice, zone très touristique en cette période estivale», prévient le courtier Aurel BGC, rappelant que «le tourisme pèse plus de 7% du PIB français». Le courtier souligne que le secteur «commençait tout juste à relever la tête en France, en particulier après un Euro de football qui s'est déroulé sans incidents notables (à l'exception des batailles entre hooligans à Marseille) et avait, d'après les échos transmis par la presse, permis de relancer les réservations de dernière minute dans le pays».

14th July, Nice

14 Juillet (2014), Nice, France. Sur la plage au bas de la Promenade des Anglais, une soirée en famille. Liberté, Fraternité, Egalité! Photo sur Flickr de Michael Foley (CC BY-NC-ND 2.0)

Mais la France n'est pas le seul pays affecté par ses attaques au niveau touristique.

Mohamed Rial, blogueur marocain sur le tourisme au maroc, exprime ses craintes sur l'amalgame qui pourrait être fait à cause de l'appartenance religieuse ou l'origine maghrébine du terroriste. La crainte générée par ses crimes pourrait produire des effets collatéraux qui affecterait des villes touristiques comme Marrakech :

Mais les effets des attentats seront aussi collatéraux pour une ville comme Marrakech, dont le cœur de l’activité économique n’est autre que le tourisme. Quoi de plus normal pour une destination dont l’Hexagone constitue le premier marché pourvoyeur, avec 40% des flux. Depuis 2012, la ville ocre, tout comme Agadir, souffre d’un désamour des touristes français, qui s’accentue d’année en année. En raison, justement, de ces attentats et des amalgames qu’ils suscitent dans l’esprit des voyageurs.

D’après le dernier rapport annuel du Syndicat français des entreprises des tour-opérateurs (Seto), l’un des premiers fournisseurs de voyages à forfait (vol+séjour) pour le Maroc, la clientèle du business français du voyage se réduit comme peau de chagrin. En juin dernier, les premières tendances pour la saison estivale affichaient un recul de 38% pour le Maroc au profit du Portugal, des Baléares et de l’Italie.

C'est dans un climat de plus en plus tendu que le gouvernement a approuvé la prolongation pour 6 mois de l'état d'urgence. Le Collectif “Nous ne céderons pas” explique sur le site europe-solidaire.org les conséquences de cette mesure et tire la conclusion suivante:

Alors que le dernier rapport parlementaire sur l’état d’urgence a montré la portée limitée d’un régime qui se voulait d’exception, la France va donc s’installer de façon durable dans une situation qui marginalise chaque jour davantage le rôle du juge judiciaire, garant des libertés individuelles, au profit du seul pouvoir exécutif. Nous savons, aujourd’hui, que l’état d’urgence a été utilisé pour autre chose que la lutte contre les actes de terrorisme, notamment pour empêcher des manifestations et assigner à résidence des militants politiques sans que tout cela ait le moindre rapport avec la lutte contre les actes de terrorisme.

 

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