Cet article de Maria Murriel est paru initialement sur PRI.org le 24 août 2016. Il est publié ici dans le cadre d'un accord de partage de contenu.
Vous êtes assis dans un café à Palermo, un quartier de Buenos Aires. Vous n'entendez pas clairement la conversation des deux personnes à côté, mais vous arrivez à distinguer certaines phrases. Quelque chose comme, “Toi tu as cru que je n'avais rien de mieux à faire que d'être amoureuse de toi.”
Celle-ci a en réalité été entendue dans le métro. Mais lorsque Ezequiel Mandelbaum et Tatiana Goldman se trouvaient dans un café de Palermo, il y a environ 5 ans, ce qu'ils y ont entendu malgré eux était si captivant, hors contexte, qu'ils se sont tus.
Ils ont juste écouté.
“On ne comprenait pas vraiment ce qu'ils disaient,” dit Mandelbaum. “Mais c'était très divertissant.”
Nota Bene : Il est quasiment impossible de faire transparaître toute la saveur de ces phrases après traduction. Mais nous essayons de nous en rapprocher le plus possible.
Mais ce qui est ressorti de cette journée est plus que divertissant. La Gente Anda Diciendo (“Les Gens disent en marchant”) est un aperçu “anthropologique et espiègle” de la mentalité et du mode de vie argentins — en particulier de la capitale. Mandelbaum et Goldman reccueillent ces phrases de Buenos Aires, qui dévoilent l'humour pince-sans-rire, la franchise et l'attitude désinvolte qu'ont les locaux vis-à-vis de la vie et de l'amour (même les plus petits).
“A Buenos Aires, c'est facile [d'entendre des choses amusantes],” dit Mandelbaum. “Je ne sais pas si c'est parce qu'on parle souvent fort ou parce que nous ne sommes pas prudes. On peut se trouver dans un bus, et parler au gynécologue à plein volume… Les Argentins se font beaucoup psychanalyser, donc il est courant d'entendre quelqu'un en train d'analyser la vie de son conjoint.”
A l'origine l'idée était de prendre en note les phrases entendues à travers Buenos Aires et de toutes les réunir dans un livre. Après 9 mois à rassembler des phrases, Mandelbaum et Goldman ont décidé de les poster sur Facebook. Du jour au lendemain, des centaines de personnes se sont mises à les suivre, puis des milliers, et des dizaines de milliers.
Le charme de ces phrases est leur mordant, et les situations auxquelles elles font référence. Sélectionner les meilleures pour les ajouter au projet est tout un art.
“Quand on arrive à saisir un morceau de conversation on commence à s'inventer toute une histoire,” raconte Mandelbaum. “[Nous choisissons les] phrases les plus parlantes, celles qui éveillent notre imagination, qui sont drôles.”
Maintenant que ce sont les fans qui soumettent 100 pour cent des phrases, la partie la plus importante de cet art l'est encore plus : elles doivent être entendues puis écrites immédiatement.
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“On [sait lesquels sont inventés] par intuition,” avoue Mandelbaum, qui est un éditeur travaillant dans les relations publiques. “Il faut l'entendre et l'écrire tout de suite. Quand tu essaies de l'écrire plus tard, tu refais malgré toi la phrase dans ta tête.”
Ils ont parcouru l'Amérique de Sud en collectionnant les phrases, avec pour sponsor Motorola, ont publié 2 livres, et ont inspiré des émules dans d'autres villes et pays.
Et ce n'est pas fini : Mandelbaum dit que Goldman et lui espèrent que des écrivains seront inspirés par les fameuses phrases.
Avec des phrases comme celles-ci, ce ne sera pas difficile.