Les électeurs de Trump font le bonheur sur Twitter de la chef-propagandiste russe

Photo: Gage Skidmore / CC 2.0

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Alors que le monde est aujourd'hui sous le choc du stupéfiant renversement par Donald Trump de la course présidentielle étatsunienne, les Russes regardent l'Amérique avec la confiance retrouvée que les années de bataille contre la domination des médias libéraux de l'Occident sur les flux mondiaux d'information ont fini par payer.

En la matière, il n'y a probablement pas plus heureux que Margarita Simonyan, la rédactrice en chef de RT (anciennement “Russia Today”), le principal organe de propagande du Kremlin, dont la raison d'être est de faire passer la vision du monde de Moscou aux auditoires de l'étranger.

Sur Twitter, Mme Simonyan a d'abord suivi l'élection comme tout un chacun en se reposant sur les prédictions des sondeurs, qui s'attendaient à une victoire de Hillary Clinton. Un des premiers tweets de Simonyan le jour du scrutin déclarait simplement la mort de la démocratie.

Requiem pour la Démocratie

A mesure que la victoire de Trump gagnait en certitude, le ton de Simonyan sur Twitter virait du désespoir au ravissement. Elle s'est même mise en quête d'un drapeau américain, qu'elle promettait de fixer à sa voiture, dans son empressement à faire honneur à une élection qu'elle décrivait quelques heures auparavant comme l'acte de décès de la démocratie.

Aujourd'hui je veux circuler à travers Moscou avec un drapeau américain à la fenêtre de ma voiture. Si je peux trouver un drapeau, joignez-vous à moi. Aujourd'hui ils l'ont mérité.

En somme, aujourd'hui je vais rouler comme ça : à une fenêtre notre drapeau, à l'autre le drapeau américain. Je symbolise le chewing-gum de l'amitié entre les peuples. En acompte.

Et ce n'est pas sa dette de deux caisses de bière—apparemment le prix d'un pari perdu sur Clinton—qui aurait pu refroidir l'enthousiasme de la rédactrice en chef.

Je viens juste de me rendre compte que j'y ai perdu deux caisses de bière !

Comme beaucoup d'observateurs aux USA et ailleurs dans le monde, Mme Simonyan a interprété la victoire de Trump comme un puissant rejet du statu quo américain et de décennies de ce qu'on appelle le ‘consensus de Washington’ s'agissant de la politique étrangère des USA.

Pour Simonyan, la preuve est là qu'une majorité d'électeurs américains sont dégoûtés et las des médias classiques, du multiculturalisme, de la liberté du commerce et des interventions à l'étranger.

Corbyn. Le Brexit. Trump. Encore des questions ? Le monde en a par-dessus la tête de l'establishment, de ses mensonges, de l'arrogance de ses médias mensongers.

Quand les médias et le pouvoir sèment pendant des années des valeurs auxquelles la société n'est pas prête, en expliquant à la société qu'elle est trop figée, c'est Trump qui est le vainqueur.

Les gens sont fatigués de la guerre. Les gens sont fatigués des média. Les gens sont fatigués du libéralisme agressif. Les gens sont fatigués des immigrants. Bons ou mauvais, ce sont les faits.

Implicite dans les satisfecits de Simonyan sur Twitter, est l'idée que RT, son média à elle, est aussi gagnant, parce qu'il offre la perspective anti-establishment qui semble avoir prévalu dans cette élection américaine.

Des soutiens fervents de Hillary Clinton ont aussi endossé l'idée que des agents russes comme Simonyan ont une responsabilité dans la victoire électorale de Donald Trump.

Ainsi, Michael McFaul, ancien ambassadeur des Etats-Unis en Russie et énergique champion de la campagne Clinton, a crédité Moscou d'avoir manipulé les Américains pour qu'ils votent Trump. Sur Twitter, McFaul a facétieusement félicité divers individus liés au Kremlin, sans oublier Simonyan, qui a promptement repris à son compte le message.

Bravo Poutine – Simonyan – [le magazine en ligne] Spoutnik – Jirinovski – Maria Katasonova. Victoire !

Quand elle regarde l'avenir, Simonyan a d'évidentes grandes espérances quant à ce que le président Trump pourra faire pour améliorer les relations russo-américaines, avec plusieurs concessions géopolitiques à Moscou impensables si Hillary Clinton l'avait emporté mardi.

Si Trump reconnaît que la Crimée est nôtre, annule les sanctions [économiques], s'accorde avec nous sur la Syrie et libère Assange, je prends ma retraite. Car le monde sera merveilleux.

Alors, “Requiem pour la Démocratie” ? Simonyan trouve que sur ce front les nouvelles sont bonnes :

Max Seddon : Alors, hier à peine vous disiez que la démocratie était morte. Elle est revenue à la vie ?
Margarita Simonyan : Elle est ressuscitée ! :-)

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