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La Bulgarie a un nouveau Président, le Premier Ministre devait-il démissionner ?

Catégories: Europe Centrale et de l'Est, Bulgarie, Dernière Heure, Élections, Gouvernance, Médias citoyens, Politique
Change of guard in front of the Bulgaria President's office in Sofia. Photo by Wikipedia user Apostoloff, CC BY SA. [1]

Relève de la garde à Sofia, devant le siège de la Présidence. Photo sur Wikipedia de Apostoloff, CC BY-SA.

La toute récente élection présidentielle et la décision subséquente du Premier Ministre Boïko Borissov de soumettre sa démission au parlement ont fait entrer la Bulgarie dans une zone de turbulences politiques.

La lettre de démission de M. Borissov est arrivée le 13 novembre, après que Tsetska Tsacheva [2], membre du même parti, Citoyens pour le développement européen de la Bulgarie (GERB), a été battue au deuxième tour de l'élection présidentielle par Rumen Radev [3], le candidat indépendant soutenu par le Parti socialiste bulgare.

Les médias occidentaux comme Reuters [4] et certains journalistes en Bulgarie qualifiaient M. Radev de “pro-Russe”.

Après avoir éliminé 20 autres compétiteurs, M. Radev prendra ses fonctions le 22 janvier de l'année prochaine. Ce qui laisse au Président sortant Rosen Plevneliev à peine 2 mois et demi pour former un nouveau gouvernement. Dans une lettre  [5]aux membres du gouvernement bulgare, le Premier Ministre Borissov a indiqué être prêt à rester à son poste jusqu'à la désignation de son remplaçant. M. Borissov a justifié son souhait de renoncer à ses fonctions comme une réponse nécessaire aux récentes élections, par lesquelles les votants ont clairement marqué leur mécontentement du cours actuel du gouvernement.

A côté de l’élection présidentielle de ce mois, la Bulgarie a aussi tenu un référendum [6] sur une éventuelle réforme du système électoral et des règles du financement des partis politiques. La faible participation n'a pas permis d'atteindre le quorum, mais les propositions ont reçu l'approbation d'une mince majorité et doivent encore être débattues à l'Assemblée Nationale.

Une analyse [7] publiée par le journal “Dnevnik” esquisse plusieurs scénarios différents qui pourraient se dérouler en Bulgarie après le changement d'équipe dirigeante. Le journal n'exclut pas une nouvelle crise politique nationale.

Le parlement a a accepté [8] la démission de Borissov le 16 novembre. Le président va maintenant proposer le poste de premier ministre à un membre du GERB, qui est le plus grand parti politique du pays. Le parti peut refuser. Une motivation plausible serait de renforcer sa popularité — le chaos politique qui s'en suivrait rendrait plus désirable son maintien au pouvoir. En cas de refus, l'offre irait au second parti en nombre au parlement. En cas de nouveau rejet dans le délai d'une semaine, le président peut alors faire l'offre à tout parti de son choix au parlement. Si ceci échouait à son tour, il devrait alors former un “gouvernement d'expédition des affaires courantes”, tout en convoquant des élections anticipées en mars 2017.

Bien que le parlement aie juridiquement la possibilité de rejeter la lettre de démission du premier ministre, M. Borisov a exclu [9] cette éventualité.

“Виждам много грешки, само че ние сме партия, която се учи от грешките си, вземаме си поуки”, добави лидерът на ГЕРБ като обяснение на решимостта си и бе цитиран от медиите на пресконференцията след изборите.

“Je vois de multiples erreurs, mais nous sommes un parti qui apprend de ses erreurs, nous retenons nos leçons”, a dit Borissov pour expliquer sa résolution, cité lors d'une conférence de presse après le scrutin.

Sa conviction a provoqué diverses réactions en ligne et dans les média, paniquées ou badines.

“Nous sommes dans une crise qui aurait pu être évitée”, a déclaré à la télévision nationale [10]  Nayden Zelenogorski, le co-président d'une coalition de centre-droit. Représentant d'un parti présent au parlement, M. Zelenogorski a mis en garde que le gouvernement ne pourra pas fonctionner pendant encore au moins six mois au vu des derniers événements.

L'homme politique et économiste Vladimir Karolev [11] s'inscrit en faux contre cette prédiction, et liste [12] sur Facebook une série de “déclarations politiques totalement inexactes de conseillers politiques et d'auteurs d'analyses dans les médias”.

Les internetautes bulgares sont nombreux à estimer que la tournure des événements ne doit rien au hasard. Dans un billet sur Facebook [13], Ianna Georgieva explique :

Защо всички си мислят, че Борисов се прави на сърдито дете след изборите. Не мисля, че е толкова глупав и още повече обиден, мисля че ако искаше да спечели президентките избори не това щеше да избора му за президент и вицепрезидент. Мисля че това е добре премислена загуба.

Pourquoi est-ce que tout le monde pense que Borissov se comporte après l'élection comme un enfant en colère ? Je ne pense pas qu'il soit aussi sot et fâché qu'il veut le faire croite. Je pense que s'il avait voulu que son poulain gagne l'élection présidentielle, il aurait choisi un autre président et vice-président. Je pense que c'est une défaite bien calculée.

Jeni Koleva a tweeté [14]ses observations sur l'humeur générale des gens :

L'humeur post-électorale, dans la queue pour embarquer dans l'avion : pour tous, Radev président c'est ok, mais ils demandent pourquoi Boïko a démissionné…

“RobotPanda,” un autre usager de Twitter, s'étonne qu'un membre du GERB démissionne du poste de premier ministre pour la deuxième fois en quatre ans :

Le GERB démissionne pour la deuxième fois en quatre ans. Ceux qui votent pour eux aux élections ne doivent pas être fute-fute.

Un autre citoyen bulgare, Vladimir Loukov, a ironisé sur Facebook [16] sur ce que sera le prochain épisode, et ce que les expatriés et retraités bulgares peuvent attendre de l'avenir :

Добре, нов президент – е, и…
Добре, предстоят пак избори, ново правителство – е, та…
Трите милиона прокуденици ще се върнат ли в България?…
Двата милиона старчоци ще заживеят ли в тиха радост покрай внуците си?…
Трите милиона и нещо наемници ще получават ли някога “европейски” заплати?
….

Bien, un nouveau président, et…
Bien, de nouveau des sondages, un nouveau gouvernement, et, alors…
Les 3 millions de Bulgares expatriés vont-ils tous rentrer en Bulgarie…?
Les 2 millions de personnes âgées vont-ils passer leur vie en paix entourés de leurs petits-enfants…?
Ou les 3 millions de paires de bras recevront-ils des salaires “européens ?

Le musicien populaire et candidat-maire Ventsi Mitsov a plaisanté le 14 novembre :

Да ви кажа снощи правителството подаде оставка и мен ме заболя зъб.
Тази вечер от 18 часа съм на зъболекар.
НЯМА НИКАКВА СТАБИЛНОСТ ВЕЧЕ!!!

Il faut que je vous dise, hier le gouvernement a démissionné et j'ai eu une rage de dents.
J'avais ce soir-là un rendez-vous chez le dentiste à 18 heures.
IL N’ A PLUS DE STABILITÉ NULLE PART !!!