Les images de personnes sans domicile en Iran qui cherchent abri dans des tombes vides hors de Téhéran scandalisent les utilisateurs des médias sociaux persans, et suscitent indignation et appels à l'intervention des pouvoirs publics.
Le tollé s'est intensifié quand le journal Shahrvand, une publication considérée comme proche du gouvernement réformateur de Hassan Rohani, a fait paraître un reportage sous le titre “La vie dans la tombe“.
Depuis que l'affaire est parue au grand jour, les Iraniens se sont enflammés sur internet. Un Twitteur anonyme appelé “Maktoub” a cité une parole devenue ironique du fondateur de la République islamique, l'Ayatollah Khomeini disant, “Je préfère les ‘habitants de taudis’ aux ‘habitants de palais'”. Une déclaration qui prend tout son sel dans la juxtaposition d'une image de sans-abri habitant une tombe, et de celle du mausolée à l'allure de palais, édifié avec l'argent public, qui abrite son tombeau.
” یک موی کوخ نشینان ” را به ” همه کاخ نشینان ” ترجیح میدهم (امام خمینی) pic.twitter.com/CbgNpBuoPY
— maktoub (@Pensylvani) December 27, 2016
Je préfère les ‘habitants de taudis’ aux ‘habitants de palais’ (Imam Khomeini)
Un post sur Instagram de l'artiste et caricaturiste iranien Bozorgmehr Hosseinpour (ci-dessous) a également retenu l'attention sur les médias sociaux persans. A côté de remarques polémiques sur la stérilisation des sans-domicile pour les empêcher de faire des enfants, Hosseinpour exprimait sa colère devant l'indifférence générale au problème actuel des sans-abri en Iran avant la publication des images virales de tombes.
Ça suffit ! Au lieu de perdre son temps en sentimentalité qui ne mène nulle part, et au lieu de paroles creuses et malavisées… réfléchissons à de bonnes solutions. Durant ces années amères, nous devons alléger un peu le poids qui pèse sur les enfants sans abri qui sont perdus et faibles…ceux qui sont malades et entrent dans le monde avec la maladie et le malheur. Nous devons expliquer la matière avec empathie et bonté, et les éduquer sur l'avenir de leurs propres enfants. Ces habitants de cartons (karton khab-ha) devraient être empêchés d'avoir des enfants pour qu'on puisse empêcher [qu'il y ait] de futures populations de ces personnes déplacées dans des cartons. Nous devons leur ordonner de cesser de reproduire davantage d'enfants sans abri qui grandiront dans le même état de pauvreté que leurs parents. Ce qui ne veut naturellement pas dire qu'il ne faut pas aider ces gens dans ces situations malheureuses. Le problème dure deuis des années de ces gens qui vivent sous les ponts, dans les égouts et les parcs, mais aujourd'hui ils n'obtiennent l'attention qu'à cause de leurs images dormant dans des tombes. S'ils dormaient dans l'égout ou sous le pont on ne parlerait pas d'eux. Dieu merci la tournure des événements fait qu'on a pris conscience de cette population et qu'on pourrait agir pour leurs vies et celles de leurs enfants. Vous qui criez maintenant pour leurs vies, où étiez-vous jusque là ? Si ces pauvres gens ne dormaient pas dans des tombes, vous ne sauriez sans doute rien d'eux. Et maintenant que croyez-vous qu'il arrivera ? On les jettera hors des cimetières. (…) #dormeurs_des_cartons
Le cinéaste iranien Asghar Farhadi, récompensé aux Oscars et au festival de Cannes, a été une autre voix remarquée à s'indigner contre le fait que des Iranians devaient trouver refuge dans des tombes pour survivre à l'hiver. Dans une lettre ouverte au Président Hassan Rohani, il a crié sa honte de son pays.
نامه #اصغرفرهادی به #حسنروحاني: pic.twitter.com/0Ytq5fjC8y
— امیر کلهر (@AmirrKalhor) December 27, 2016
la lettre d'Asghar Farhadi à Hassan Rohani
Le Président a aussitôt répondu, d'accord avec Farhadi que pareille situation était inacceptable.
روحانی در واکنش به نامه فرهادی: گورخوابی قابل تحمل نیست https://t.co/SVeLjRpK7N #BBCPersian #ایران #گورستان #روحانی pic.twitter.com/tItDxnriEL
— Fardad Farahzad (@BBCFardad) December 28, 2016
La réponse de Rohani à la lettre de Farhadi : dormir dans des tombes n'est pas acceptable #Iran #cimetières #Rohani
D'autres hauts responsables, comme le gouverneur de la Province de Téhéran (les photos virales ont été prises dans les alentours de Téhéran), disent que le problème des sans abris fait partie du problème plus vaste de la toxicomanie.
Certains se sont inquiétés que la soudaine attention publique aux tombes-abris n'expose ces individus à des mauvais traitements par l'administration, car les fonctionnaires s'efforcent de les chasser afin de résoudre en apparence le “problème des cimetières”.
Comme l'indique BBC Persian, Hashemi affirme que bon nombre d'individus que l'on trouve à la rue refusent d'aller dans les centres de désintoxication. Le gouverneur a aussi soutenu qu'aucun sans-abri n'était maltraité par les agents publics.
بسیاری از این افراد از رفتن به کمپها خودداری میکنند. برهمین اساس ممکن است هنگام جمعآوری مقاومتی از سوی آنها صورت بگیرد اما در مورد گورستان نصیرآباد به هیچ عنوان در جمعآوری آنها بحث کتک زدن تایید نمیشود.
Un certain nombre de ces individus refusent d'aller dans les camps. C'est pourquoi il se peut que pendant qu'ils étaient détenus il y a eu des résistances entre eux et les autorités. Mais dans le cas du cimetière de Nassir Abad il n'y a eu aucun signalement confirmé de blessés corporels quand ils ont été recueillis.