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De Téhéran à Manhattan, itinéraire d'un photographe de mode

Catégories: Afrique du Nord et Moyen-Orient, Amérique du Nord, Etats-Unis, Iran, Arts et Culture, Censure, Média et journalisme, Médias citoyens, Photographie, The Bridge
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Le photographe iranien Kouroush Sotoodeh avec les mannequins Allegra Dewi Carpenter et Eszter Boldov pendant une séance photo sur un toit de New York. Photo partagée par Koroush Sotoodeh, et utilisée avec permission.

[Tous les liens sont en anglais]

Si le photographe de mode Kourosh Sotoodeh [2] avait poursuivi son rêve dans son pays natal, l’Iran, il aurait probablement été arrêté par les services de sécurité au cours d’une répression [3]au sein de l’industrie de la mode, actuellement en pleine expansion – une répression qui, ces dernières années, a amené les autorités à qualifier les gens comme Kouroush de « photographes itinérants qui appâtent les filles [4] ». Depuis le début de l’année 2016, les photographes de mode ont été arrêtés en masse, ainsi que des mannequins et tous ceux qui travaillent dans les agences de mannequins.

Depuis qu’il a quitté la République Islamique d’Iran pour travailler dans une agence basée à Dubaï, en 2009 – l’année durant laquelle le gouvernement iranien a sévèrement réprimé les manifestants contestant la réélection de Mahmoud Ahmadinejad à la présidence – le photographe ne regarde plus en arrière. Koroush vit depuis à New York, où la liberté d’expression est autant une réalité qu’une compétition effrénée. « Les gens constituent le sujet de mes photos, il est donc normal pour moi de vouloir aller là où les gens disposent de davantage de liberté avec leurs vêtements, leur comportement, et leurs actes sociaux », explique-t-il pendant une séance photo dans un studio de Manhattan. En Iran, Koroush risquerait l’emprisonnement ou pire s’il venait à publier les clichés – ceux d’une mannequin partiellement dénudée – qu’il prenait le jour où je l’ai interviewé.

Tenter d’intégrer la ville où la compétition est la plus forte, particulièrement en ce qui concerne la mode, n’est pas chose aisée. Pourtant, à 38 ans, l’homme a déjà publié ses photos dans des magazines comme inCOVER et Harper’s Bazaar, et se sent comme chez lui. « Comme l’un des New-Yorkais que je préfère, [le comédien et humoriste] Louis C.K., je jette mes meilleurs travaux et je recommence jusqu’à créer de meilleurs clichés », affirme-t-il, alors qu’il change un objectif. « C’est la meilleure chose à faire ».

Alors que je discute avec Koroush pendant une de ses séances photos, nous évoquons les problèmes et opportunités présents dans l’industrie de la mode en Iran, et comment sa carrière a décollé dans la capitale mondiale de la mode, New York.

Omid Memarian (OM): Quand avez-vous débuté votre carrière de photographe ? Quand avez-vous quitté l’Iran et pour quelle(s) raison(s) ?

Koroush Sotoudeh (KS): I was interested in illustration from a very young age, but I started professional photography in March 1999. I was studying industrial design and naturally I spent most of my time at the Arts University where I learned more about photography and could see, enjoy and practice it. By “professional photography,” I mean the time I started earning a living through photography. It’s quite clear that back then I had a totally different concept and understanding of photography, compared to what I know now. Both my customers and I understood so little about it, so we thought we were doing fashion photography, but maybe it would be more accurate to say that I was engaged in some type of unusual portrait photography of subjects who liked to see themselves through my lens. Gradually, I gathered more experience and knowledge about the profession. After a modeling agency offered me a job in the field of fashion photography in 2009, I swiftly accepted the job and moved to Dubai.

Koroush Sotoudeh (KS): Depuis mon plus jeune âge, j’étais fasciné par l’illustration, mais j’ai commencé la photographie de façon professionnelle en mars 1999. J’étudiais le design industriel et naturellement, je passais beaucoup de temps à l’Université des Arts où j’apprenais énormément sur la photographie et où je pouvais voir, apprécier et pratiquer. Quand je dis « de façon professionnelle », je veux dire quand j’ai commencé à en vivre. A cette époque-là, j’avais une vision et une compréhension de la photographie complètement différentes, comparé à ce que je sais maintenant. Mes clients et moi en comprenions très peu de choses, nous pensions faire de la photographie de mode, mais il serait sans doute plus juste de dire que j’avais l’habitude de faire des portraits inhabituels de gens que j’aimais voir à travers mes objectifs. Progressivement, j’ai engrangé plus d’expérience et de connaissances sur ma profession. Suite à une offre que m’a faite une agence de mannequins en 2009, j’ai rapidement accepté ce job et j’ai déménagé à Dubaï.

Koroush

Kouroush photographiant le modèle Eszter Boldov. Photo partagée par Kouroush Sootodeh et utilisée avec permission.

OM: A quels problèmes deviez-vous faire face en tant que photographe de mode en Iran ?

KS: There are many competent and creative fashion designers and photographers in Iran, some of whom will go far in gaining widespread recognition. There is also a large group of Iranian youth who are interested in modeling and have the internationally accepted physical features needed for this profession. But for many reasons, including the Iranian laws and the Iranian market’s lack of contact with the international fashion scene, many of these talented people will have to be terribly lucky to find a chance to prosper in this field.

I can’t say whether fashion photography is allowed in Iran or not, because the law is silent on many different issues, and this leaves a lot of room for subjective interpretations. But I can say with certainty that there are no laws against taking photographs of people who are wearing beautiful clothes, therefore there shouldn’t be any problems. Or if there is a problem, I never saw any rules developed to tell me as a photographer what to do and what not to do in order to stay away from trouble. The silence of the law enables different organizations to act according to their own taste. Just like all the other artists in Iran who choose people as subjects, I had problems too, but my biggest problem was an occasional security threat to a profession based on arts and aesthetics—something I could never understand.

KS: Il y a de nombreux créateurs et photographes de mode compétents et imaginatifs en Iran, certains d’entre eux obtiendront une grande reconnaissance. Il y a également un grand groupe de jeunes Iraniens qui sont intéressés par le mannequinat, et qui possèdent les caractéristiques physiques internationales nécessaires à cette profession. Mais pour de nombreuses raisons, dont les lois iraniennes et l’absence de relation du marché iranien avec la scène internationale, la plupart de ces talentueuses personnes devront être particulièrement chanceuses si elles veulent prospérer dans ce milieu.

Je ne peux pas dire si la photo de mode est autorisée ou non en Iran, car la loi est silencieuse sur de nombreux problèmes, et cela laisse place à des interprétations subjectives. Mais je peux affirmer qu’il n’y a aucune loi contre le fait de photographier des gens qui portent de beaux vêtements, donc il ne devrait y avoir aucun problème. S’il y a un problème, je n’ai vu aucune loi me disant quoi faire ou ne pas faire en tant que photographe afin de rester en règle. Le mutisme de la justice permet à différentes organisations d’agir à leur guise. Comme tous ces artistes iraniens qui choisissent des gens comme sujets, j’ai également eu des problèmes, mais le plus gros d’entre eux était les menaces occasionnelles sur une profession basée sur les arts et l’esthétique – ce que je ne pourrais jamais comprendre.

OM: Quels sont les secteurs de la photographie de mode qui rencontrent le plus de soucis en Iran ?

KS: Generally, when men are subjects of fashion photography, there are fewer limitations, although we can’t say this is always the case. There are a lot of limitations for photographing women, some of which are based on laws, but laws do not set many of these limitations. I’m not talking about nude photography, which of course everyone knows is not allowed in Iran! But there is a lot of subjective interpretation and enforcement of limitations. These limitations are increased or decreased based on the views of the officials in charge of arts and culture. As a photographer, you never know which rules you have to follow in order to build a long-term plan of action for your professional development. It is natural to be fed up and to give up the profession altogether after a while.

KS: Généralement, quand les hommes sont les sujets de la photo de mode, il n’y a pas beaucoup de limites, bien que ce ne soit pas toujours le cas en réalité. Il y en a beaucoup plus lorsqu’il s’agit de photographier des femmes, certaines ayant été mises en place par la justice. Je ne parle pas des photos dénudées qui, comme tout le monde le sait, sont interdites en Iran ! Mais il y a une forte interprétation subjective et une application de ces restrictions. Celles-ci augmentent ou non selon la vision des officiels en charge des arts et de la culture. En tant que photographe, vous ne savez jamais quelles lois vous devez suivre pour construire un plan d’action à long terme pour votre développement professionnel. Il est normal d’en avoir marre et d’abandonner finalement la profession.

OM: Connaissez-vous des photographes ou des mannequins en Iran qui ont été forcés de faire autre chose, à cause de la pression exercée par le pouvoir ?

KS: Yes, I do. I know a lot of people who were very talented in their work, and after they were unable to pursue their field in Iran, they decided to emigrate, but the immigration wasn’t always a good decision for them. Sometimes they were unable to compete in the job market and ended up doing work other than photography. Their inability to compete was not necessarily a result of their lack of expertise, but due to the different language, their inability to relate to the new society’s social conditions, and the absence of any support. But the hardships of a life in diaspora should not cause disappointment and defeat.

KS: Oui, j’en connais. Je connais beaucoup de personnes très talentueuses dans leur domaine, mais qui ne peuvent poursuivre leur travail en Iran, et qui ont décidé d’émigrer, mais l’immigration n’est pas toujours la meilleure chose à faire. Parfois, ils sont incapables de se battre sur le marché du travail, et finissent par faire autre chose que de la photographie. Leur incapacité à se battre n’est pas nécessairement une conséquence de leur manque d’expertise, mais en raison des barrières linguistiques, de leur inaptitude à s’adapter aux nouvelles conditions sociales, et de l’absence de soutien. Mais les épreuves de la vie ne devraient pas provoquer de déception et d’échec.

Iranian models arrested in recent crackdowns.

Ci-dessus, quelques mannequins iraniens arrêtées lors de récentes répressions. Photo de la Campagne Internationale pour les Droits de l'Homme en Iran, utilisée avec permission.

OM: Pourquoi pensez-vous que les autorités iraniennes surveillent les mannequins et photographes iraniens, et essaient de contraindre votre travail ?

KS: I don’t believe there is total agreement between the government decision-makers in this or in similar areas. When the entire path of a profession is limited by subjective decisions, the atmosphere for growth in that profession shrinks, and as a photographer working in such an environment, you would feel at best just tolerated. If fashion photography in Iran were to move towards nude and erotic photography, it would have seriously violated the law and a crackdown would be expected, but I believe that even nudity has not been properly defined and there are no clear boundaries.

Are there any written procedures on how much of a woman’s hair can be shown in a photograph? Is it written anywhere that if a woman has plump red lips, she should not be the subject of a close-up shot? If I don’t know these boundaries, my job becomes very difficult. I believe even the authorities differently define these boundaries and they each have their own ideas about them. Ultimately, their biggest concern is if these activities violate Islamic culture. But the truth is that even in defining the boundaries of Islamic culture, there is no unified voice or understanding.

KS: Je ne pense pas qu’il y ait un accord entre les législateurs du gouvernement sur ce sujet. Quand toute la profession est entravée par des décisions subjectives, les conditions pour le développement de cette profession s’amenuisent, et quand un photographe travaille dans un tel environnement, vous vous sentez tout juste toléré. Si la photo de mode en Iran venait à se tourner vers la nudité et l’érotisme, vous violeriez sérieusement la loi et une répression serait inévitable, mais je crois que même la nudité n’est pas vraiment définie  et qu’il n’y pas de limites assez claires.

Y a –t-il des procédures écrites sur la façon dont les cheveux d’une femme doivent être montrés dans une photo ? Est-il écrit quelque part qu’une femme qui aurait les lèvres rouges et pulpeuses ne devrait pas être le sujet d’un gros plan ? A mon avis, les autorités définissent de façon différente ces limites et ont chacune leur propre idée sur la question. En fin de compte, leur plus gros problème est que ces activités puissent enfreindre la culture Islamique. Mais la vérité est que personne ne parle d’une seule voix quand il s’agit de définir les restrictions de la culture Islamique.

OM: Pensez-vous que les répressions continues à l’encontre des mannequins et photographes iraniens les empêcheront de poursuivre leurs carrières ?

KS: No. The industry will never stop. Clothes are one of the basic needs of human beings, no matter where people live. The fashion and clothing industry is very active in Iran and is naturally in need of promotion and marketing. Therefore, fashion photography, with all its limitations, will continue to exist, because the thinking behind this creativity is unstoppable. The thought process cannot be stopped and it will eventually find a way to be expressed. I think this situation is temporary and when something truly exists, it will have to be accepted. I hope laws are developed to define the boundaries, so everyone knows what is legal and what is illegal. The fact is that so much has been pushed underground, that there is now a huge underground world, bigger than the world above ground! This is why I think the ban needs to be re-thought. Can a world that is so extensive be marginalized?

KS: Non. L’industrie ne s’arrêtera pas. Les vêtements sont l’un des besoins basiques des êtres humains, peu importe où les gens vivent. La mode et son industrie sont très actives en Iran et ont naturellement besoin de promotion et de marketing. Par conséquent, la photographie de mode, avec toutes les restrictions qu’elle comporte, continuera d’exister, car sa créativité est sans limites. Le processus de réflexion ne s’arrêtera jamais et trouvera toujours le moyen de s’exprimer. J’espère que les lois sont établies pour fixer des limites afin que tout le monde sache ce qui est légal et ce qui ne l’est pas. Le fait est que le monde souterrain, dans lequel se déroulent beaucoup de choses, est bien plus grand que le monde visible.

OM: Qu’arrivera-t-il, selon vous, si les agents de sécurité se rendent compte qu’un photographe réalise des photos dénudées ?

KS: Again, this is where the outcome could be different due to the subjective nature of handling the issue. Like many other things that are considered a crime in Iran, you never know exactly what would happen if you pass this red light! Would you be fined $200, would you be imprisoned, or would you be deprived of your civil rights? I have no doubt that this type of photography is considered a crime, and all I can say is that you would have to be very fortunate to end the issue with a cash fine. When there are different types of pressure on ordinary photographers, I don’t even want to think about what would happen to someone who does erotic photography in Iran!

KS: Encore une fois, l’issue différera en fonction de la façon – subjective – de traiter le problème. A l’instar de nombreuses autres choses qui sont considérées comme un crime en Iran, vous ne savez jamais quand vous franchissez la ligne rouge ! Paierez-vous une amende de 200 dollars, serez-vous emprisonné, ou serez-vous déchu de vos droits civiques ? Je sais que ce genre de photo est considéré comme un crime, et tout ce que je peux affirmer, c’est que j’ai été très chanceux de m’en tirer avec une amende. Il peut y avoir d’autres formes de pression exercées sur les photographes ordinaires, alors imaginez ce que pourrait endurer quelqu’un qui fait des photos érotiques en Iran !

OM: Est-il possible de gagner sa vie comme photographe professionnel de mode en Iran ?

KS: If by “professional” you mean someone who makes a living this way, the answer is yes. If you go to Instagram right now and search for a few simple keywords, you would be able to find a lot of Iranian photographers and models in this field. As I said before, this chain certainly exists and is economically viable. But if the question is whether they have world-class quality or not, the answer is dependent on a lot of other factors. It depends, for example, on how well the artist can promote himself or herself. When everyone is trying to toe the line, so as not to cross the government red lines, they would undoubtedly have less publicity and this could lead to lower work quality and revenue for them.

KS: Si par “professionnel”, vous entendez quelqu’un qui construit sa vie en fonction de cela, alors la réponse est oui. Si vous allez sur Instagram et tapez quelques mots-clés très simples, vous trouverez de nombreux photographes et mannequins iraniens. Comme je l’ai déjà dit, cette industrie existe et est économiquement viable. Mais si la question est de savoir s’ils sont de classe mondiale, la réponse dépend d’un certain nombre de facteurs. Comme par exemple de la façon dont un artiste se promeut. Quand quelqu’un se rapproche dangereusement de la ligne rouge fixée par le pouvoir cette personne bénéficiera indubitablement de moins de publicité, ce qui l’amènera vers un travail de qualité moindre et des revenus plus faibles.

Iranian model Elnaz Golrokh (now based in Dubai) maintains a popular fashion and modelling Instagram page with over 800K followers.

Le mannequin iranien Elnaz Golrokh [5] (qui vit désormais à Dubaï) demeure une modèle populaire sur Instagram, dont le compte est suivi par plus de 800 000 abonnés.

OM: Avec l’émergence et la grande popularité d’Instagram, de nombreux photographes et mannequins ont commencé à montrer leur travail sur les réseaux sociaux et ont parfois jusqu’à un million de followers. Dans quelle mesure pensez-vous que les médias sociaux contribuent à la renommée de ce type de photographie ?

KS: Social media, and especially Instagram have been absolutely instrumental! I think that’s because Instagram communicates with image-seeking audiences and this brings people closer. Because social media is far-reaching, everyone has access to it and when a photographer uses this tool, through peer influence other colleagues and competitors also move to use that tool, and this is why a large group of Iranian photographers moved to Instagram, for example. Organizations that oversee internet access in Iran then scramble to find mechanisms for controlling these artists. But I believe that social media has catapulted people forward, and even if the censorship organizations are successful in pulling people back, the art of photography has been able to take a few steps forward in gaining new audiences.

KS: Les réseaux sociaux, et en particulier Instagram, ont une énorme influence ! Instagram communique avec un public qui cherche des images, et cela rapproche les gens. Les médias sociaux étant vastes, tout le monde y a accès et lorsqu’un photographe recourt à cet outil, cela incite ses collègues et concurrents à en faire de même, ce qui explique la forte présence des photographes iraniens sur Instagram, entre autres. Les organisations qui surveillent l’accès à Internet en Iran créent des mécanismes visant à contrôler ces artistes. Mais je crois que les médias sociaux poussent les gens à aller de l’avant ; et même si les organismes de censure parviennent à freiner les gens, l’art photographique permet de gagner de nouveaux publics.

Kouroush photographie un mannequin sur un toit de New York. Photo de l'auteur de l'article.

OM: Vous-même, ou les autres photographes, avez-vous déjà essayé de vendre vos photos à des publications hors d’Iran ? Ou vous concentriez-vous uniquement sur le marché local ?

KS: I think if you have professional ambitions, no matter what the profession, you always think about finding the best market and environment for your work. If you were a programmer in South Asia, you would for sure dream about working in Silicon Valley someday. If you were an Iranian soccer player, it is natural that your big dream would be to play in Spain’s La Liga. For me, the dream was to go wherever I could become a better and more experienced photographer. This is why I went to Dubai and now I am in the La Liga of photography in New York! As a photographer inside Iran, you may be able to send your photographs abroad, but the photos would have to be wildlife photography or social photography. The areas in which I was active hardly allowed me to be connected to the professional life outside Iran. This is why I had to move, so that I could strengthen my professional relationship with the international market. The subjects in my photography are people; therefore it is natural for me to want to go somewhere where people have more freedom with their clothes, conduct, and social acts.

KS: Si vous avez des ambitions professionnelles, quelque soit votre métier, vous cherchez toujours le marché et l'environnement les meilleurs pour votre travail. Si vous êtes un programmeur en Asie du Sud, vous rêvez forcément de travailler un jour dans la Silicon Valley. Si vous êtes un joueur de football iranien, votre plus grand rêve est naturellement de jouer au sein de la Liga espagnole. En ce qui me concerne, mon rêve était de me rendre là où je pourrais devenir un meilleur photographe, et où je pourrais gagner en expérience. C’est ainsi que je suis allé à Dubaï, et qu’aujourd’hui je fais partie de la Liga de la photographie à New York ! Lorsque vous êtes photographe en Iran, vous pouvez envoyer vos photos à l’étranger, mais elles devront représenter la faune et la flore, ou être de la photographie sociale. Les domaines dans lesquels je travaillais me permettaient difficilement de me mettre en relation avec la vie professionnelle en-dehors de l’Iran. C’est pourquoi je suis parti, afin de pouvoir renforcer mes liens professionnels avec le marché international. Les gens constituent le sujet de mes photos ; il est donc normal pour moi de vouloir aller là où les gens disposent de davantage de liberté avec leurs vêtements, leur comportement, et leurs actes sociaux.

Kouroush's editorial from inCOVER. Used with permission.

Couverture d'inCOVER réalisée par Kouroush. Utilisée avec autorisation.

OM: Que pouvez-vous faire à New York qui serait interdit en Iran ?

KS: I always considered myself a citizen of the world, not of a particular country. I believe that I have to live where the general public’s values are closer to mine. This does not necessarily mean that where I am is better or worse; it just suits me more. When a large part of my identity is comprised of being a photographer and my desire to illustrate, it’s not at all strange that I would feel more comfortable here professionally and personally. The most important thing for me is that this city’s tempo and dynamics totally match my energy level and every morning when I wake up, I’m in a race with my city, and I love this feeling a lot. Before I forget, of course, I should add that in New York no one investigates and measures the hair and figures of my models with a ruler and a magnifying glass!

KS: Je me suis toujours perçu comme un citoyen du monde, pas d’un pays en particulier. Je crois que j’ai besoin de vivre avec les valeurs qui sont proches des miennes. Cela ne signifie pas que l’endroit où je vis est meilleur ou pire ; il me convient seulement davantage. Quand une grande partie de mon identité est liée au fait d’être photographe et à mon désir d’illustrer les choses, il n’y a rien d’étrange à se sentir mieux ici, tant d’un point de vue professionnel que personnel. La chose la plus importante à mes yeux est que le tempo et la dynamique de la ville correspondent totalement à mon niveau d’énergie ; tous les matins, lorsque je me lève, je suis en compétition avec la ville, et j’adore cette sensation. Avant d’oublier, je voudrais ajouter qu’à New York, personne n’examine ni mesure les cheveux et les silhouettes de mes mannequins avec une règle et une loupe !

OM: Qu’aimeriez-vous accomplir à New York ?

KS: I definitely have some big dreams. I would like to be known as a New York photographer whose work has its own character and signature, and to show my view behind the camera to those in the fashion industry here. I hope next time we meet, my pictures do all the talking!

KS: J’ai de grands rêves. J’aimerais être reconnu à New York comme étant un photographe dont le travail possède sa propre personnalité et sa signature, et je souhaiterais montrer ce qui se cache derrière l’objectif, ici dans l’industrie de la mode. La prochaine fois que nous nous rencontrerons, j’espère que mes photos parleront pour moi !