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Pourquoi un débat si houleux sur le bronzage seins nus en Argentine ?

Catégories: Argentine, Censure, Femmes et genre, Liberté d'expression, Manifestations, Médias citoyens
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Zoom sur l'image créée par Pictonline. Publiée avec autorisation et distribuée sur ses réseaux sociaux.

Samedi 28 janvier, trois femmes ont fait scandale [2] en décidant de bronzer “sans le haut” sur la plage de Necochea, une cité balnéaire argentine de la province de Buenos Aires.

Selon les témoignages, quelques touristes installés à proximité, mals à l'aise, s'en sont plaint. Trois policiers se sont alors présentés pour demander à ces femmes de se couvrir les seins. Devant leur refus, un dispositif de sécurité impliquant un effectif de vingt policiers a été déployé pour les expulser de la station balnéaire.

L'affaire a pris des proportions démesurées à cause d'une vidéo [3] virale d'un passant publiée sur les réseaux sociaux :

De nombreuses réactions, actes d'oppositions et débats se sont déchaînés démontrant la sensibilité que révèle ce problème de sexualisation de la poitrine des femmes et de préjugés envers les mouvements féministes nationaux.

Après cette action policière, démesurée selon beaucoup, des utilisateurs de Facebook [4] ont lancé un appel au “tetazo” (coup de sein) massif à l'Obélisque de Buenos Aires. Celui-ci a été imité dans d'autres villes pour protester contre la police et l'humiliation à laquelle ces baigneuses ont été confrontées.

Par la suite, le juge de proximité de Necochea a rejeté [5] la plainte en dénonçant le fait qu'être une femme “sans le haut ne constitue pas un délit”. Le juge du tribunal correctionnel, Mario Juliano, a quant à lui saisi l'opportunité pour demander l'amendement du Code Pénal – considéré comme archaïque depuis les années 1970. Suite à ces nouvelles, de nombreux internautes ont exprimé leur mécontentement.

Débats houleux et échanges contradictoires n'ont pas cessé depuis. Dans le tweet et la publication sur Facebook de Pictoline [6] qui invitent au débat, les commentaires montrent la polarisation et l'agressivité que provoque le mouvement féministe :

Trois femmes expulsées d'une plage argentine parce que topless, et cette question revient : pourquoi est-ce oui pour les hommes et non pour les femmes ?

Par la suite, d'autres tweets et boutades sur l'incident, sa relation à l'égalité des sexes et la violence sexiste ont été publiés :

Lorsque vous pouvez être incarcérée pour avoir fait exactement comme un homme, il n'y a pas d'égalité.

N'oublions pas que les féministes sont contre les concours de beauté mais encouragent le #tetazo [12] [manifestation seins nus en protestation]. Apparemment, ce qui les dérange vraiment ce sont les jolies femmes.

Mes chères, être féministe c'est bien plus que de montrer ses seins. Simone de Beauvoir doit se retourner dans sa tombe.

Ces deux personnes ne sont pas nues. Toutes deux ont le torse nu. Aucune n'a enfreint la loi.

L'animateur de Radio Rivadavia AM690, Oscar Choy, essaie de présenter une perspective plus modérée et conciliante :

[Traduction] Peut-on y réfléchir EN SE RESPECTANT ?

Il ne s'agit pas des seins… ni du topless… mais de l'attitude !

Dans un lieu public… on respecte les normes de société. Ne vous comportez pas comme si vous étiez à la maison… ou dans votre piscine. Depuis longtemps on pousse les limites, les normes en provoquant… changeant… en allant toujours un peu plus loin.

En allant plus loin… on oublie l'Autre. L'AUTRE a son espace… son mode de vie… sa culture… ses croyances.

On provoque tout le temps… avec toutes nos envies. 

Reste à voir le résultat de l'appel du “tetazo” de mardi 7 février 2017. Pendant ce temps, les débats et discussions en ligne sur les droits des femmes et l'égalité des sexes ne cessent d'animer les réseaux sociaux et la rue depuis plus d'une semaine.