En cette période de trouble, la musique traverse les frontières et les murs

“Voilà ce mur
Qui sépare ta vie de la mienne
Ce maudit mur
Qui nous empêche de nous rapprocher
Ce maudit mur
Que je briserai un jour
Tu verras, mon amour,
Ce jour-là tu reviendras.”

La pared, bolero de Roberto Angleró.

Le 8 novembre 2016, Donald Trump a remporté, déjouant tous les pronostics, les élections présidentielles aux États-Unis d'Amérique. Parmi ses promesses de campagne, une a suscité confusion et indignation auprès de la population mexicaine en particulier, et latino-américaine en général : la construction d'un grand mur à la frontière entre le Mexique et les États-Unis. Ceci, selon Trump, aiderait à stopper l'immigration illégale et réguler le passage des “bad hombres” (violeurs et trafiquants de drogues) vers le territoire de l'Union américaine.

La construction de ce mur improbable n'est plus une simple promesse électorale. Au fil des jours, ce qui n'était qu'une lointaine possibilité semble se matérialiser avec l'arrivée du Président Trump à la Maison Blanche.

Alors que de telles décisions font l'objet de discussions au sein de la classe politique, trouvant un écho parmi les contestataires qui n'ont cessé de manifester dans les rues des États-Unis et des autres villes du monde, dans d'autres lieux, on n'arrête pas l'échange culturel. Cela s'est vu notamment à travers l'événement University of Michigan En Español: sounds of the Hispanosphere, (Université du Michigan en espagnol : sonorités de l'hispanosphère) organisé par le pianiste colombien César Cañón. Pendant une semaine, l'Université du Michigan a été la scène de concerts, de master classes et de conférences qui ont permis d'engager des échanges et de jeter des ponts entre les différents pays à travers la production musicale et culturelle d'Amérique Latine et d'Espagne. De la musique de compositeurs emblématiques de la région, comme Astor Piazzolla, Leo Brouwer, Manuel Ponce ou l'Espagnol Joaquín Turina, aux contemporains Ricardo Lorenz, Carolina Heredia, Edwin Guevara Gutierrez ou encore Marcos Balter, la manifestation a permis de réfléchir et d'écouter la voix et la musique qui résonnent aujourd'hui en cette époque de trouble.

Dans la vidéo qui suit, le duo Villalobos clôture son premier concert avec “Me duele el alma” du compositeur colombien Gentil Montaña :

Les participations du pianiste colombien Alejandro Roca, du duo Villalobos, du chanteur portoricain Ricardo Lugo et du violoncelliste vénézuelien Horacio Contreras, entre autres, ont fusionné avec la collaboration d'artistes et d'institutions des États-Unis comme le Khemia Ensamble, l'ensemble de musique baroque et le University Philharmonia Orchestra de l'Université du Michigan. C'est dans cet esprit collaboratif si proche de la musique que nous trouvons un bon exemple de ce qui rend plus forte une communauté : le respect et le travail en équipe. Cette initiative ne peut qu'avoir été perçue avec une sensibilité spéciale à la lumière des événements politiques de ces derniers jours, quand de plus en plus de frontières semblent s'élever, cherchant à faire de la différence un espace de la discorde.

Ear, Skin and Bone Riddles, du compositeur brésilien Marcos Balter, est l'une des œuvres exécutée par le Khemia Ensemble au cours de ce cycle de concerts de l'Université du Michigan à Ann Arbor.

Il est difficile de séparer la musique du moment où elle arrive. Peut-être parce que son immatérialité la rend perméable, parfois impertinente et toujours inquiète. C'est peut-être pour cela que, pendant que l'on discute de la possibilité de séparer les États-Unis du Mexique et de l'Amérique Latine, les sons ne cessent de se faufiler par les interstices d'un mur qui n'a pas encore été construit et qui, avant de poindre à l'horizon, est déjà entouré de part et d'autre.

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