Rapport Netizen : le Kenya et le Mexique soupçonnés de manipulation sur Twitter

Nuée d'oiseaux. Photo de Christoffer A. Rasmussen, via Wikimedia. Domaine public.

Le Rapport Netizen de Global Voices Advocacy donne un aperçu des défis, des victoires et nouvelles tendances en matière de libertés numériques dans le monde.

Un bras de fer s'est engagé sur les médias sociaux en réponse à la grève nationale des médecins kényans qui protestent contre le non-respect de leur convention collective par le gouvernement. La grève paralyse le système public de santé et alimente la méfiance des citoyens à l'égard du gouvernement d’Uhuru Kenyatta, notamment suite aux allégations selon lesquelles des millions de dollars auraient disparu des coffres du Ministère de la Santé.

Bien que les médecins aient rallié l'appui d'une grande partie du public à leur cause, une série de messages calomnieux à leur égard a cependant circulé sur les médias sociaux. Des blogueurs locaux ont établi une étroite corrélation entre les comptes Twitter qui ont relayé des mots-dièse comme #GreedyDoctors, #MyBadDoctorExperience, et #DaktariRudiKazi [Docteurs, retournez au travail] et ceux qui font la promotion d'autres messages pro-gouvernementaux. Des experts des médias sociaux croient que les messages n'ont pas été diffusés par des citoyens ordinaires, mais plutôt par des « influenceurs » payés par le gouvernement. Certains ont laissé entendre qu'il pourrait y avoir des liens entre ces comptes et un groupe de 36 blogueurs très influents, prétendument engagés par l'Unité de communication stratégique présidentielle pour lutter contre les critiques du gouvernement en ligne.

Ces derniers jours, le mot-dièse #implementCBA, relayé par les usagers de Twitter partisans de la convention collective, a supplanté les mots-dièse tels que #GreedyDoctors.

Ce phénomène n'est pas propre au Kenya. En effet, avec ses récentes campagnes pro-gouvernementales en ligne, le Mexique semble avoir rejoint les rangs de pays comme la Chine et le Venezuela, qui ont l'habitude de promouvoir les intérêts de l'État sur les médias sociaux.

Plus récemment, dans la foulée des manifestations en ligne et sur les grandes routes déclenchées par la hausse du prix de l'essence en janvier, une série de comptes Twitter a tenté d'influencer les conversations et de délégitimer les manifestations en invitant les protestataires à participer à des activités illégales comme le pillage et le vol. De façon générale, le mot-dièse #SaqueaUnWalmart [« Pillez un Walmart »] a été inséré dans les conversations contenant le mot-dièse #gasolinazo, largement utilisé par les protestataires. Ces comptes ont également diffusé des images d'émeutes, qui se sont avérées mensongères puisque les photos représentaient en réalité des émeutes dans les rues d'Égypte en 2011.

En analysant les données de plus de quinze mille messages associés aux manifestations, les scientifiques de l'Université jésuite de Guadalajara ont remarqué que le mot-dièse #SaqueaUnWalmart a interrompu le flux des conversations, cherchant à attribuer des intentions malveillantes au mot dièse #Gasolinazo. Certains des comptes impliqués dans ces campagnes ont été identifiés comme étant des comptes automatisés ou des trolls ayant déjà été utilisés pour harceler et menacer des journalistes et des activistes sociaux.

Ces observations, qui s'ajoutent aux récentes allégations selon lesquelles des logiciels espions auraient été envoyés à des chercheurs et des fonctionnaires partisans d'une taxe sur le soda (signalées par le New York Times et analysées par le Citizen Lab), donnent à penser que les Mexicains qui défendent et expriment leurs opinions sur des sujets d'intérêt public sont de plus en plus menacés.

Le Venezuela bloque d'autres sites Web d'informations, y compris celui de CNN

Le 15 février, la version espagnole de la chaîne d'informations américaine CNN et son site Web ont été bloqués au Venezuela après avoir rapporté des allégations de fraudes de passeport.

CNN n'est pas seule dans cette situation : la chaîne mexicaine TV Azteca a également été retirée des ondes le 16 février. Le site Web de nouvelles et d'opinion publique Maduradas est, quant à lui, inaccessible sur les réseaux de la plupart des fournisseurs de service Internet (FSI) (y compris le fournisseur de l'État CANTV) dans sept provinces du Venezuela, et ce, depuis le 7 février. Ce site est reconnu notamment pour résumer les questions d'intérêt public qui sont débattues en ligne. Dans une déclaration publique, le président vénézuélien Nicolas Maduro a qualifié CNN d’ « instrument de guerre ».

Attaques d'hameçonnage au Qatar : les défenseurs des droits des migrants visés

Des chercheurs d'Amnesty International ont mis à jour une série d’attaques d'hameçonnage très sophistiquées visant à espionner les activités de journalistes, d'organisations syndicales et de militants des droits des travailleurs migrants au Qatar. Une proportion importante de ces migrants est originaire du Népal. La campagne semble avoir été orchestrée par un acteur affilié à l'État, bien qu'il n'y ait pour le moment aucune preuve qui permette d'identifier avec certitude le responsable. Les personnes ciblées étaient invitées à ouvrir des hyperliens qui semblaient provenir de fichiers partagés avec Google Drive et Google Hangouts, mais qui installaient en réalité des logiciels espions.

En Thaïlande, un avant-projet de loi permettrait au gouvernement de contrôler les médias

Les médias de Thaïlande préviennent qu'un avant-projet de loi pourrait accorder au gouvernement un contrôle absolu sur la presse. L'avant-projet de loi, curieusement intitulé « Protection des droits et de la liberté des médias : déontologie et normes professionnelles », exigerait que les journalistes obtiennent un permis pour l'exercice de leur travail. Il prévoit également la mise sur pied d'un Conseil national des médias professionnels où siégeraient principalement des représentants du gouvernement. Selon Chakkrit Permpool, ancien président du Conseil national de la presse de Thaïlande, « Ce genre de législation n'existe que sous les dictatures. Cela va à l'encontre de la nouvelle constitution, qui garantit la liberté de presse et la liberté d'expression. » Plus de trente médias ont signé une déclaration rejetant ce projet de loi.

Facebook entend lutter contre les fausses nouvelles en France

Facebook a annoncé une série de mesures pour contrer la propagation de fausses nouvelles en vue de l'élection présidentielle française qui aura lieu en avril et mai prochains. Un partenariat a été conclu avec huit médias qui auront pour mandat de vérifier les faits et filtrer les nouvelles qui seront signalées par les utilisateurs. Néanmoins, certains s'inquiètent de la pérennité de ces mesures, sachant qu'elles dépendent des ressources déjà limitées des salles de presse.

Des militants du secteur des technologies planifient une grève générale

Le 23 février, les entreprises et les organisations du secteur des technologies feront face à une grève générale, un Distributed Denial of Women [Déni distribué des femmes], visant à souligner l'importance des femmes et des transgenres dans le secteur des technologies. Pour appuyer cette mesure, l'Association pour le progrès des communications lance sa campagne « Réapproprie-toi la technologie », qui recueille les témoignages des gens du milieu ayant été victimes de discrimination basée sur le genre. Pour plus de détail, visitez cette page.

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