Quand l'ex-président iranien mal réélu Ahmadinejad fait la leçon à Trump

Ahmadinejad donne des conseils à Donald Trump dans une lettre ouverte. Image : compte Telegram de Mamlekate.

L'ex-président iranien Mahmoud Ahmadinejad, dont le fait le plus notable a été la réélection entachée d'irrégularité, ce qui a déclenché le Mouvement vert de 2009, s'est fendu le 27 février d'une lettre ouverte de conseils au président américain Donald Trump.

La lettre s'ouvre sur une dua (ou invocation islamique), souhaitant une prompte venue du Mahdi (le sauveur de l'Islam dans les écritures des chiites). Ahmadinejad, un habitué avoué des missives aux présidents des USA, affirme ensuite à Trump qu'il voit dans son élection un changement dans l'immobilisme américain.

Plus loin, il invite Trump à respecter les autres nations, à adhérer à la diversité et à mettre fin aux politiques agressives de domination envers les autres pays :

۲- متاسفانه دولت های متوالی آمریکا ، خود را برتر از دیگران پنداشته ، پیشرفت این کشور را در عقب نگه داشتن دیگران ، برخورداری و رفاه مردم آمریکا را در فقر دیگران ، عزت و بزرگی آن را درتحقیر دیگران و امنیت آمریکا را در ناامنی دیگران جست و جو کرده اند.

اگر همه دولت های دنیا از همین منظر به عرصه بین المللی بنگرند و بر همین مبنا عمل کنند، نتیجه چه خواهد شد؟ باور من این است که مردم آمریکا نمی توانند با این سیاست ها و عملکردها همراهی کرده و به دنبال تحقیر و فقر و ناامنی دیگران و تصرف ثروت آنان باشند.

هرگاه مردم آمریکا از ورای فضای غبار آلود رسانه ای ، از این سیاست ها و رفتارها مطلع شده اند، بلافاصله آن را محکوم کرده و از عاملان آن ها اعلام برائت کرده اند.

اگر به دنبال اصلاح اساسی و ماندگار هستیم ، باید به همه ملت ها و فرهنگ ها ، اراده و منافع آنان احترام بگذاریم. باید در شادی ملت ها شاد و در غم آنان شریک باشیم. باید به دنبال برابری و برادری میان ملت ها باشیم و به حقوق ملت ها احترام بگذاریم و از برتری جویی و تلاش برای سلطه بر دیگران خودداری نماییم.

Malheureusement, les administrations américaines successives ont adopté l'arrogance envers les autres, cherchant le progrès du pays en freinant celui des autres, en poursuivant l'enrichissement et le bien-être des Américains aux dépens de la pauvreté des autres, en quête d'honneur et de grandeur par l'humiliation des autres, et de la sécurité pour les USA par l'insécurité des autres… C'est ma conviction que le peuple américain ne peut pas soutenir de telles politiques et comportements, et ne peut poursuivre l'humiliation, la pauvreté et l'insécurité des autres, et ne peut pas s'emparer de la richesse d'autrui… Pour poursuivre des réformes fondamentales et durables, il faut respecter toutes les nations et cultures, ainsi que leur volonté et intérêt. Il nous faut mettre en commun le bonheur des nations tout comme leur chagrin. Il nous faut rechercher l'égalité et la fraternité parmi les nations et respecter les droits des nations, et aussi éviter l'arrogance et les tentatives de dominer autrui.

Ce n'est pas la première fois qu'une personnalité iranienne de premier plan critique publiquement l'aspect discriminatoire des politiques de l'administration Trump, comme la très controversée interdiction de voyage contre sept pays majoritairement musulmans (dont l'Iran). Le Guide Suprême, l'ayatollah Khamenei, avait précédemment décrit Trump comme “faisant le travail à notre place en révélant [le] vrai visage de l'Amérique.”

Les médias sociaux iraniens débordent de commentaires sur la lettre d'Ahmadinejad depuis sa publication.

Ahmadinejad ne se satisfait apparemment pas des 8 ans de dégâts qu'il a causés à l'Iran et écrit à Donald Trump

Depuis l'élection de Trump, de nombreux Iraniens ont offert leur compassion aux Américains, faisant le parallèle entre les huit années de médiocre gouvernance sous Ahmadinejad et l'administration Trump (voir 4:04 sur la vidéo parodique “Amérique d'abord… et l'Iran ?”).

Un message qui a cartonné sur Twitter en persan relevait l'étrange graphomanie de l'ex-président :

Cet intérêt à écrire des lettres aux présidents des USA et d'autres pays n'est pas normale…

Une allusion aux autres missives d'Ahmadinejad à des chefs d'Etat du monde, comme celle qu'il a adressée à l'ex-président américain Barack Obama en 2016 où il lui reprochait de n'avoir pas tenu ses promesses de réparer les liens avec l'Iran :

It is with great regret that your explicitly announced undertakings … including your public as well as written announcements to mend ties with the Iranian nation, and to make compensation for about sixty years of oppression and cruelty by different American governments against the Iranian nation, were never fulfilled.

Il est très regrettable que vos actions explicitement annoncées… y compris vos annonces publiques et écrites de réparer les liens avec la nation iranienne, et de d'indemniser les soixante années d'oppression et de cruauté [infligées] par différents gouvernements américains à la nation iranienne, n'aient jamais été suivies d'effets.

La lettre ci-dessus a suivi l'application de l'accord nucléaire iranien, signé sous la direction d'Obama aux Etats-Unis et du président iranien modéré Hassan Rohani. Ahmadinejad faisait allusion à la décision injuste selon lui d'un tribunal américain jugeant que les avoirs iraniens gelés aux USA devaient être versés aux familles des victimes de l'explosion de la caserne du corps des Marines au Liban en 1983, qui avait tué 241 militaires américains. Le Hezbollah libanais, milice et parti politique chiite largement soutenu et financé par le gouvernement iranien, était l'auteur de l'attentat.

La lettre de 2016 se voulait un dénigrement des succès de l'administration Rohani dans l'aboutissement d'un accord nucléaire, succès populaire dans tout l'Iran en ce qu'il allégeait le poids des sanctions et ouvrait la porte à de nombreuses opportunités économiques. Les sanctions nucléaires contre l'Iran s'étaient intensifiées sous la présidence d'Ahmadinejad, tandis que les négociations entre l'Iran et les autres pays concernés étaient restées en panne sous sa houlette.

Cette lettre cette fois à Trump n'est peut-être autre qu'une nouvelle manœuvre de l'ex-président pour tenter d'affaiblir son successeur, surtout à l'approche de l'élection présidentielle iranienne de mai 2017. En septembre 2016, Ahmadinejad annnonçait ne pas vouloir participer à la course, après avoir été averti par le Guide Suprême que sa candidature causerait une polarisation et des divisions dommageables dans la société iranienne. Également interdit de candidature à sa réélection en 2013, Ahmadinejad avait fait campagne pour son ancien chef de cabinet, Esfandiar Rahim Mashaei. Ce dernier n'avait toutefois pas réussi à figurer sur la liste finale des candidats à la présidence arrêtée par le Conseil des Gardiens. On s'attend à ce qu'en 2017 Ahmadinejad s'engage de façon similaire pour son ex-vice président, Hamid Baghaei.

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