L'Université de Porto Rico (UPR) est en crise après des coupes budgétaires qui ont entraîné une vague de démissions des principaux administrateurs.
Mi-2016, le Congrès des États-Unis a adopté la loi PROMESA (Loi de supervision, gestion et stabilisation Économique pour Porto Rico), qui a créé le Comité de contrôle fiscal. Le Comité a ordonné au gouverneur Ricardo Rosselló de réduire le budget de l'UPR de 300 millions de dollars afin d'éviter de devoir emprunter plus d'argent.
En réponse, Celeste Freytes, présidente de l'UPR, et neuf des onze doyens de l'université ont démissionné de leur poste et ont signé une lettre commune qui qualifie les coupes de “draconiennes” :
Rechazamos que se sacrifique más a la UPR mientras otras corporaciones y estructuras gubernamentales no dan un paso al frente, ni se les exigen los recortes draconianos que se le han requerido a una institución que ha probado ser vital en el desarrollo de nuestro país. En el momento en que el país más necesita de su Universidad y de ampliar las oportunidades para que un mayor número de estudiantes puedan acceder a ella, le dan un golpe que amenaza su viabilidad. No es sensato ni justo que, en estos momentos, se amenace su existencia. Repudiamos la insistencia de pagar la deuda pública a expensas de la Universidad.
Nous refusons que l'UPR soit encore plus sacrifiée alors que d'autres corporations et d'autres structures gouvernementales ne font pas un effort, et on ne leur demande pas les économies draconiennes qui ont été demandées à cette institution, qui a prouvé qu'elle est vitale pour le développement de notre pays. Au moment où le pays a le plus besoin de son université et d'élargir les opportunités pour qu'un plus grand nombre d'étudiants puisse y accéder, on lui porte un coup qui menace sa viabilité. Il n'est ni sensé ni juste qu'on menace actuellement son existence. Nous rejetons l'insistance de payer la dette publique au détriment de l'université.
Les étudiants et les professeurs ont organisé des manifestations contre les mesures d'austérité imposées par le comité de PROMESA, et ils ont prévenu que des économies si drastiques mettent en danger les programmes académiques vitaux.
Quand les étudiants ont eu connaissance des démissions massives des principaux administrateurs de l'université, beaucoup ont commencé à publier leur numéro d'étudiant en ligne en signe de solidarité.
Dans Dialogue Digital, le journal d'information de l'université, Karisa Cruz Rosado a également publié son numéro d'étudiant, avec ses explications pour soutenir l'université contre les économies budgétaires:
801-03-XXXX: Fue en la Universidad de Puerto Rico (UPR) donde oí el ruido de mis cadenas. Donde me reconocí presa de mis deseos sin cabeza. Allí, en esos salones con hongo, caldo de cultivo para alergias crónicas, casa del terror para los asmáticos, descubrí la brevedad de la vida y cuán “mcdonalizados” estamos. […] Sin la UPR mi vida sería silencio. Sosa. Sin historia ni poesía. Sin pachanga ni francachela. Sin lucha ni resistencia. Dejar que los buitres se coman- vivo- el Alma de la Máter (madre) de Puerto Rico sería un crimen de alta traición. Porque quizá es ahí, en su lecho, donde único nos hemos acercado a la efímera sensación de libertad.
801-03-XXXX : C'est à l'Université de Porto Rico (UPR) que j'ai entendu le bruit de mes chaînes. C'est là que je me suis sentie prisonnière de mes désirs sans raison. Là, dans ces salons avec des champignons, bouillon de culture pour allergies chroniques, maison de la peur pour les asthmatiques, j'ai découvert la brièveté de la vie et combien nous sommes “mac donaldisés” […] Sans l'UPR ma vie serait silence. Sans saveur. Sans histoire, ni poésie. Sans danse, ni fête. Sans lutte, ni résistance. Laisser les vautours manger – vif – l'âme de la Mère de Porto Rico serait un crime de haute trahison. Parce que c'est peut-être là, dans son sein, et seulement là que nous avons approché l'éphémère sensation de liberté.
Mesures d'austérité et politisation menacent l'enseignement supérieur à Porto Rico
L'enseignement supérieur public Porto Rico a fait ses preuves comme la voie principale de la mobilité sociale pour beaucoup de diplômés, en grande partie grâce au fait que ses étudiants n'ont pas de dettes astronomiques, comme dans tant d'autres universités de nos jours.
Deux autres institutions publiques d'enseignement supérieur de Porto Rico sont également passés par des années de réductions budgétaires et de supervision politisée : le Conservatoire de musique de Porto Rico et l’École des arts plastiques et du dessin de Porto Rico.
Le gouverneur Rosselló a remplacé le conseil d'administration entier de l'École des arts plastiques et du dessin de Porto Rico et a imposé un nouveau recteur en décembre sans consulter la communauté académique, malgré les règles qui affirment que cette nomination ne peut se faire qu'après consultation du corps étudiant, du corps professoral et des administrateurs.
Rosselló a affirmé que sa décision faisait suite au rejet du conseil de Mónica Villaverde, que le gouverneur avait tout d'abord choisi comme rectrice. Ce renouvellement de l'institution a nécessité d'invoquer la Loi 3 (promulguée le 23 janvier 2017), qui octroie au gouverneur la capacité de renvoyer des directeurs de toute institution publique s'il a l'impression que la personne n'est pas en accord avec ses politiques fiscales.
De nombreuses voix inquiètes se sont fait entendre, arguant que la Loi 3 viole l'autonomie des universités et soutenant que celle-ci est vitale pour répondre aux normes d'accréditation internationale. L'administration de Rosselló a balayé ces craintes.
Il convient de souligner que le Conservatoire de musique de Porto Rico et l'École des arts plastiques et du dessin ont diplômé beaucoup d'élèves qui ont eu ensuite des carrières éminentes dans les arts, dans le pays et à l'étranger, ce qui a permis à ces deux institutions d'acquérir une grande renommée et d'inspirer d'innombrables Portoricains.
Malheureusement pour cet héritage, le climat politique actuel considère l'éducation publique comme une dépense inutile. Dans cette ambiance, surtout pour les étudiants des arts et lettres, les coupes budgétaires peuvent paralyser les futurs programmes éducatifs.
Cependant, si l'expérience sert d'indicateur, les Portoricains n'abandonneront pas leurs institutions d'éducation supérieure sans se battre.