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Le Sri Lanka condamne l'attaque en bande de réfugiés Rohingya par des moines bouddhistes

Catégories: Asie du Sud, Sri Lanka, Action humanitaire, Catastrophe naturelle/attentat, Dernière Heure, Droit, Droits humains, Gouvernance, Guerre/Conflit, Manifestations, Médias citoyens, Réfugiés
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Des réfugiés Rohingya arrivés au Bangladesh après les récentes opérations militaires en Birmanie. Photo Syed Rajowan (এস রেজওয়ান). Utilisée avec autorisation.

Mardi 26 septembre, des émeutiers menés par un groupe de moines bouddhistes extrémistes ont forcé le portail et pénétré la maison d'accueil [2] enclose de plusieurs étages du Haut Commissariat aux Réfugiés (UNHCR) pour les réfugiés Rohingyas dans la capitale sri-lankaise Colombo, provoquant une large réprobation au Sri Lanka.

Les moines auraient menacé un groupe de 31 réfugiés Rohingyas dont 16 enfants et 7 femmes, qu'ils ont appelés terroristes. Les autorités ont rapidement escorté les réfugiés sous garde protégée et les ont réinstallés dans un lieu plus sûr.

Journaliste à la BBC, Azzam Ameen a tweeté :

31 réfugiés Rohingya à Mt. Lavinia vont être emmenés par la police au camp de détention de Boossa pour leur sécurité après que des émeutiers ont assailli leur refuge de l'ONU.

Le Sri Lanka est resté essentiellement silencieux au sujet de la récente crise des Rohingya [4] au Myanmar (Birmanie). Il y a à peine quelques jours que le premier ministre sri-lankais Ranil Wickremesinghe a annoncé [5] que le pays n'acceptera pas de Rohingyas en qualité de réfugiés et que les réfugiés déjà présents seront finalement réinstallés dans un autre pays.

Quelques centaines seulement de réfugiés Rohingya [6] se trouvent en ce moment au Sri Lanka, dont une majorité arrivée par mer et par air après les violences inter-ethniques au Myanmar [7] en 2012. D'autres ont été secourus [8] par la marine sri-lankaise en mai dernier sur les côtes nord du pays, et gardés dans un refuge de l'ONU à Mount Lavinia en attendant leur réinstallation.

Selon des récits [9] d'agences de presse internationales, le groupe nationaliste radical Sinhale Jathika Balamuluwa [10] a montré l’attaque en direct [11] sur sa page Facebook, suivie par plus de 30.000 abonnés. La vidéo montrait les moines et quelques civils entrant dans le refuge en scandant “Pas de terroristes dans ce pays”.

Un certain nombre d'autres images de l'attaque menée par les Bouddhistes contre les réfugiés Rohingya ont été postées sur YouTube par des utilisateurs comme sonakar.com  [12]:

Tous les réfugiés s'en sont tirés indemnes, mais deux policiers ont été blessés [13] et hospitalisés.

Le gouvernement de la Birmanie, pays majoritairement bouddhiste, ne reconnaît pas les Rohingya [14] au nombre des groupes ethniques du pays, et leur dénie la citoyenneté. On les décrit souvent comme la “minorité la plus persécutée d'Asie [15]”. Les autorités et les nationalistes bouddhistes considèrent les Rohingya comme des immigrants illégaux du Bangladesh, même si leurs racines dans l’État Rakhine (ou Arakan) remontent à plusieurs siècles.

Depuis août 2017, 400.000 Rohingyas [4] environ ont fui au Bangladesh à la suite des opérations militaires de l'armée birmane contre des insurgés appartenant à l'Armée du Salut des Rohingya de l'Arakan (ARSA). L'ARSA était accusée des attaques de plusieurs postes de la police et de l'armée, qui ont entrainé l'incendie de villages Rohingya et les attaques des civils.

Certains moines bouddhistes sri-lankais partagent les positions extrémistes de leurs homologues ultra-nationalistes birmans au sujet des musulmans minoritaires, et ont créé une page Facebook [16] pour les diffuser. Des Sri-Lankais ont aussi offert leur sympathie à la Birmanie sur la question particulière des Rohingya :

Le Sri Lanka [est] avec le Myanmar [Birmanie] dans la crise des Rohingya au Rakhine

Par contre, les attaques ont été fermement condamnées par le gouvernement sri-lankais. Son porte-parole Rajitha Senaratne a déclaré  [22]:

“This is not what the Buddha taught. We have to show compassion to these refugees. These monks who carried out the attacks are actually not monks, but animals.”

“Ce n'est pas l'enseignement du Bouddha. Nous devons montrer de la compassion à ces réfugiés. Les moines qui ont mené ces attaques ne sont en réalité pas des moines, mais des animaux.”

Et de déplorer à travers ce tweet d'Azzam Ameen :

2 millions de Sri-Lankais partis comme réfugiés dans d'autres pays, j'ai honte que nous ne puissions même pas prendre soin temporairement de 30 personnes” Le ministre Rajitha

Le ministre s'est engagé à prendre des mesures disciplinaires contre les policiers qui ont échoué à maîtriser l'émeute. D'autres hauts responsables ont fait connaître leur condamnation, mais les déclarations du Président et du Premier Ministre se font encore attendre :

La déclaration en anglais du ministre des Finances et des Média Mangala Samaraweera [24] sur les réfugiés Rohingya au Sri Lanka

Les simples citoyens ont eux aussi dénoncé les attaques sur les médias sociaux :

“Je condamne ces actions en tant que bouddhiste très fier de ce que le bouddhisme est une religion de non-violence et de Compassion”. Ma déclaration sur les réfugiés Rohingya au Sri Lanka.

Attaque et expulsion d'enfants et adultes Rohingya par des casseurs menés par des moines bouddhistes au Sri Lanka : HONTE au Sri Lanka, surtout aux bouddhistes, policiers et gouvernement cingalais

QUI est chargé du respect de la loi et de l'ordre au Sri Lanka ? Le ministre ou les voyous en robe safran qui attaquent les réfugiés Rohingya dans l'impunité ?

Le journaliste sri-lankais chevronné Latheef Farook a condamné [40] le silence du Sri Lanka sur la persécution actuelle des musulmans Rohingya en Birmanie :

Le Sri Lanka et son ministère des Affaires étrangères n'ont jamais manqué de condamner promptement les explosions et attentats dans les lointaines capitales occidentales, mais imposer par la terreur à un demi-million d'hommes, femmes et enfants de fuir leurs lieux de naissance depuis des générations plus près de chez nous dans notre voisinage asiatique, voilà qui ne heurte pas les consciences de la bonne gouvernance, des professionnels, des universitaires, de la société civile et des organisations féministes du Sri Lanka.

Sam Kosai, de Yangon, au Myanmar (Birmanie) a exprimé sa colère face au paradoxe [41] de violences bouddhistes contre les réfugiés Rohingya au Sri Lanka :

Nos frères du Sri Lanka se joignent à la Birmanie pour donner au bouddhisme honte et mauvais renom. Bravo ! Bien joué ! Être fasciste tout seul n'est pas drôle. Plus on est, meilleur c'est.