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Chia-Yu Chang/Conny: “Bien que Taiwan et la Chine populaire partagent des cultures similaires, je m’identifie comme taïwanaise.”

Catégories: Asie de l'Est, Chine, Médias citoyens, GV Community Blog


Photo faite à Colombo, Sri-Lanka, à l'occasion de la conférence Global Voices

Global Voices en français s'est entretenu avec Chia-Yu Chang connue également comme Conny, traductrice du français vers le mandarin sur son expérience avec GV et bien plus encore!

Global Voices (GV): Qui es-tu Conny?

Conny: Je m’appelle Chia-Yu Chang, ou bien Conny. Je suis Taïwanaise qui travaille maintenant à l’Industrial Technology Research Institute (l’ITRI) sur des projets gouvernementaux pour établir l’écosystème taïwanais de startups.

GV: Ton nom est  Chia Yu Chang, quel est le lien avec Conny?

Conny:Je ne sais pas depuis combien de temps, c’est devenu une habitude à Taiwan de donner un nom anglais aux enfants. Nos parents ou les enseignants du primaire nous donnent un nom anglais quand on commence à apprendre la langue d'anglaise. Le nom “Conny” est celui que ma mère m'a donné. Il ne se termine pas avec “ie” de façon traditionnelle mais avec la lettre “y” en raison des initiales de mon chinois, “CY” . Tu peux considérer Conny comme mon surnom.

GV: Raconte-nous comment tu as découvert Global Voices, et ce qui t’y a attirée?

Conny:C’était en septembre 2016, quand j’ai surfé sur Internet sur quelques actualités des Jeux Olympiques et trouvé un article sur le coureur éthiopien Feyisa Lilesa écrit en chinois sur la site de Global Voices, avec une photo d’étudiants faisant un X [1] avec leurs bras croisés. Cet article, différemment des médias taïwanais qui ne signalent que l’incident, donnait le contexte de la protestation de l’ethnie Oromo. Et puis, j’ai trouvé que le site de Global Voices couvrait un large éventail d'informations que les médias taïwanais négligeaient depuis longtemps et fournissaient de nombreuses versions en plusieurs langues sur chaque article. Ça m’a motivée à participer pour traduire les articles en chinois afin de contribuer à enrichir le contenu des médias taïwanais.

GV: Tu as un attrait particulier pour le français, comment l’expliques-tu?

Conny:Je suis attirée par le français grâce à la bande musicale de “Roméo et Juliette”, qui m’a donné ma première impression sur le français comme une langue d’élégance. Après je suis entrée a l’université, j’ai réalisé que, dans le domaine de la politique que j’étudiais, beaucoup de termes anglais avaient une origine française, ça a stimulé mon intérêt à mieux connaître cette langue.

GV: Quels sont tes domaines d'intérêt?

Conny: Ma spécialité est l’administration publique, qui se concentre sur l'élaboration des politiques sociales. Ce qui m'intéresse le plus ce sont les affaires internationales, des médias et de la communication.

GV: Comment vois-tu le futur des relations entre La Chine de Pékin et Taiwan?

Conny: Bien que les deux états partagent des cultures similaires, je m’identifie toujours comme taïwanaise. Pour moi, c’est clair qu’il y a deux régimes qui appliquent deux constitutions différentes à travers le Détroit depuis 1949. Le problème c’est que, techniquement, la guerre civile n’est jamais finie. Les deux côtés n’ont jamais signé un traité de paix sous n’importe quelle forme que ce soit ou commencé officiellement des pourparlers de paix.

J'espère vraiment qu'une certaine forme de négociation de paix puisse être entamée le plus tôt possible pour résoudre le problème une fois pour toutes. Dans une négociation, il y aura toujours des compromis, donc le seul problème sera de savoir comment Taiwan peut garder sa propre autonomie.

La Présidente actuelle de Taiwan, Tsai Ing-wen, du Parti démocrate progressiste (PDP) ou Minjindang, est considérée généralement comme favorable à l'indépendance de la Chine continentale par le Kuomintang (KMT). D'autre part le gouvernement de Beijing cherche à réduire l'espace vital international de Taïwan pour l'empêcher d'accéder à l'indépendante, et ainsi les relations inter-détroit deviennent tendues.

La majorité des citoyens taïwanais préfèrent le statu quo, ce qui veut dire que le gouvernement exerce un contrôle complet sur toutes les affaires publiques de l'île tout en ne revendiquant pas l'indépendance. Ceux qui veulent devenir indépendants ou faire partie de la Chine “immédiatement” ne sont qu'une petite minorité.

Pour moi, cette île est déjà un état indépendant qui a sa propre constitution et ses propres normes. Je préférerais fortement que les choses restent comme elles sont actuellement, après toute négociation et que nous puissions continuer à avoir de vraies élections et des droits de choix garantis

GV: Y a-t-il beaucoup de taïwanais qui pensent la même chose que toi?

Conny:La plupart d'entre nous considérons que Taïwan est et doit être reconnu comme un pays. Les médias appellent la génération née après 1980 “la génération de l’indépendence naturelle” (天然獨). Ce terme veut dire que cette génération croit que Taiwan est déjà un pays indépendant, sans d’ailleurs que cela veuille dire qu’elle soit nécessairement le mouvement pour l’indépendance. Souvent ces gens veulent garder le statu-quo actuel.

Cependant, un sondage mené plus tôt cette année indique que la confiance de cette génération s'est affaiblie à cause de la récession économique à Taïwan et la montée économique de la Chine. Le sentiment de l'appartenance à la nationalité “taïwanaise” a même atteint son niveau le plus bas depuis cinq ans.

Après #CongressOccupied [2] qui a vu le dimanche 30 mars 2014, environ 500 000 Taïwanais provenant de tout le pays se joindre à un rassemblement sur Ketagalan Boulevard à Taipei pour soutenir  les manifestants qui occupaient le Parlement en signe de protestation contre la négociation secrète d'un accord commercial avec la Chine, je pensais que de plus en plus de gens seraient conscients de la valeur de la vie que nous avons aujourd'hui.

Les médias et les programmes scolaires organisés par le ministère de l'Education ont mis beaucoup d'efforts pour renforcer la conscience de l'appartenance à une identité taïwanaise. Cependant, selon un sondage effectué plus tôt cette année, cette identité nationale taïwanaise s'estomperait au profit de l'appartenance chinoise.

De plus en plus de gens ne sont pas contre l'idée de faire partie de la Chine.

GV: Y a-t-il des liens entre ton activité pour GV et celle dans la sphère professionnelle?

Conny:Il y a bien sûr un lien entre ma participation aux activités de Global Voices et ma sphère professionnelle, qui consiste à l'élaboration des politiques publiques. GV me permet de me connecter avec le monde pour connaître plus les contextes des autres régions du monde.

GV: Quelles langues pratiques-tu?

Conny:Je parles chinois/mandarin, taïwanais, anglais, et français.

GV: Un souhait par rapport à ce que publie GV ?

Conny:J’espère que les sujets que GV publie resteront inclusifs. C’est la valeur qui m’a attirée en premier lieu et c’est celle que je promeus tout le temps dans GV. Je crois que c’est un moyen d’attirer plus de lecteurs à long terme.