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Netizen Report : A qui le tour ? La crise politique au Venezuela crée une nouvelle vague de censure et de répression de la presse

Catégories: Amérique latine, Cuba, Inde, Nicaragua, Nigéria, Palestine, Venezuela, Censure, Droits humains, Liberté d'expression, Médias citoyens, Technologie, Advox

Une manifestante étudiante parle aux policiers de la Garde Nationale du Venezuela, durant les marches de 2014. Photo de Jamez42 via Wikimedia Commons (CC0)

Le Netizen Report de Global Voices Advox offre un aperçu des défis, des victoires et des tendances émergentes en matière de droits numériques à travers le monde.

La censure en ligne et la répression des usagers des réseaux sociaux atteint des proportions inégalées au Venezuela, où les citoyens continuent à manifester contre la situation désespérée de l’économie [1] et de lasanté publique [1] provoquée par la crise politique chronique dans le pays [2].

Il est devenu extrêmement difficile pour les journalistes [3] d'informer, car ils sont souvent accusés de “troubler l'ordre public” ou de “menacer la révolution”. Les utilisateurs des réseaux sociaux qui dialoguent activement avec un large public sur des questions civiques sont aussi ciblés.

A la mi-mai, le célèbre utilisateur de Twitter Pedro Jaimes, qui parlait du climat, de la météo et du trafic aérien à près de 80.000 abonnés, a disparu [4]. Peu de temps avant sa disparition, Jaimes avait publié un tweet sur le trajet d'un avion transportant le Président du Vénézuela Nicolas Maduro, une information accessible au public par le média en ligne Efecto Cocuyo [5].

Le 15 juin, plus d'un mois après sa disparition, Jaimes appela les membres de sa famille pour les tenir au courant de sa détention à l'intérieur d'El Helicoide [6], une installation militaire transformée en prison des services nationaux bolivariens de renseignement (SEBIN).

Pendant ce temps, il devient de plus en plus difficile d'accéder aux informations essentielles et aux plateformes de communications en ligne. Avec les réseaux électriques vacillants à cause du manque d'entretien [7] et périodiquement désactivés dans un effort d'économie d'énergie, l'accès à internet n'est jamais assuré. Et les systèmes de communication et d'information en ligne sont de plus en plus pour les Vénézuéliens le seul moyen d'échanger et d'obtenir une information indépendante de l’État.

Au début du mois de juin, les sites web de deux grandes entreprises de presse, La Patilla et El Nacional, ont été bloqués [8], de même que les points d'accès [9] au réseau Tor [10], qui permet aux internautes de contourner la censure en ligne. Les principaux sites web pornographiques [11] ont aussi été bloqués, dans ce qui peut ressembler à une tentative de test de la capacité de censure du pays. Dans certains pays, les mesures de ce genre ont été les précurseurs des actions de renforcement de la censure en ligne.

Agressions de journalistes palestiniens et saisie de leurs téléphones cellulaires

Le 19 juin des journalistes couvrant une manifestation pour les droits du travail à Gaza ont rapporté à MADA [12] (le Centre palestinien pour le développement et la liberté de la presse) avoir été agressés. Leurs téléphones portables et caméras ont soit été confisqués soit détruits par des hommes en tenues associés au Hamas, qui contrôle la bande de Gaza.

Lors d'une manifestation du 15 juin dans la cité de Ramallah en Cisjordanie, des journalistes ont rapporté que [13] les forces de l'ordre de l'Autorité palestinienne ont employé les mêmes méthodes pour les empêcher de filmer et de faire un reportage sur la marche.

Une étudiante nigériane suspendue pour s'être plainte de la médiocrité des infrastructures universitaires

Kunle Adebajo, étudiante en droit à l'Université d'Ibadan au Nigeria , a été suspendue pour deux semestres  [14]pour avoir rédigé un article jugé critique à l'égard de l'administration de l'Université. Le 20 Avril, Kunle Adebajo a exprimé ses opinions, “UI: l'Ironie des toits à la mode et des intérieurs moches [15]”, décrivant l'état déplorable de l'infrastructure des résidences étudiantes dans son université. Les administrateurs de l'Université ont alors convoqué Mme Adebajo devant un comité de discipline qui a qualifié  [16]l'article d'Adebayo de“grossier, insubordonné et diffamatoire” et prononcé sa suspension.

Dans un article pour Sahara Reporters, Fisayo Soyombo, un journaliste d'investigation primé et ancien élève de l'Université d'Ibadan, a qualifié la mesure disciplinaire [17] contre Adebajo “de grand coup porté contre la liberté de la presse.”

Les autorités cubaines confisquent la carte de presse d'un blogueur célèbre

Fernando Ravsberg, journaliste uruguayen installé à Cuba depuis la fin des années 1990, blogueur chevronné et ancien correspondant de la BBC, s'est vu refuser pour la première fois ses accréditations de presse [18] par les autorités de régulation des médias. Ravsberg s'était longtemps servi de ses revenus de journaliste étranger accrédité pour faire fonctionner son blog populaire “Cartas desde Cuba” (Lettres de Cuba), où il fait des commentaires critiques sur la vie publique et politique à Cuba, et où un seul billet compte régulièrement des centaines de commentaires de la part de ses lecteurs. Ravsberg s'est exprimé sur ce changement en ces termes [19] :

Over these past 10 years, they have tried to tame me with kind words of advice, hidden threats, with breaking my teeth [20], demanding that I be expelled from the country, and ‘warnings’ directed at my children. None of this has worked until now, but removing my foreign media credentials has allowed them to give Cartas a coup de grace.

Au cours des dix dernières années, ils ont essayé de m'amadouer avec des conseils formulés gentiment, des menaces voilées, en me cassant les dents [20], en exigeant que je sois expulsé du pays, et des ‘avertissements’ adressés à mes enfants. Rien de tout cela n'a marché jusqu'à présent, mais le retrait de mes accréditations de correspondant étranger leur a permis de donner un coup de grâce à Cartas.

Au Nicaragua, les forces pro-gouvernementales semblent vouloir modifier les noms des réseaux WIFI des gens

Avec les manifestations anti-gouvernementales [21] qui font toujours rage au Nicaragua, des centaines de personnes ont rapporté [22] en mi-juin que leurs SSID (noms de leurs réseaux Wi-Fi) avaient brusquement changé [23] en pleine nuit. Tous ceux qui ont signalé cela étaient des abonnés de Claro, une filiale du géant mexicain des télécommunications América Móvil.

Les réseaux WiFi ont été rebaptisés “QuitenLosTranques,” ce qui signifie “ArrêtezLesBarricades” — en référence à une tactique de protestation locale, le blocage des routes. Ce message a été utilisé en permanence, comme hashtag des réseaux sociaux, par les acteurs du gouvernement et les partisans en ligne. Des barricades ont été érigées à travers le pays dans le but de faire pression sur le Président Daniel Ortega pour qu'il quitte le pouvoir et protège les collectivités de la violence de l’État.

Un projet en Inde offre gratuitement des téléphones aux pauvres — mais ne garantit pas la protection de la vie privée

Une initiative d'accès à la téléphonie mobile  [24]offre des téléphones gratuits aux femmes chefs de ménage vivant sous le seuil de la pauvreté dans l’État de Chhattisgarh dans le nord-est de l'Inde. Bien que les téléphones soient remis sans aucune contrepartie financière, les gens qui participent au projet doivent fournir leurs numéros de carte d'identité nationale– associés au système d'identification national controversé Aadhaar de l'Inde [25] — et signer au gouvernement un document “de consentement d'utilisation de ces numéros Aadhaar.” Une étude menée par le site indépendant d'informations Scroll.in [24] a révélé que les participants n'ont pas été informés de l'utilisation que le gouvernement fera de leurs numéros Aadhaar.

Nouvelles recherches

 

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Ellery Roberts Biddle [29], Marianne Diaz [30], L. Finch [31], Oiwan Lam [32], Laura Vidal [33] et Sarah Myers West [34] ont participé à la rédaction de cette synthèse.