[article d'origine publié le 13 août 2018] Plusieurs images et vidéos partagées en ligne montrent que pendant et après les élections législatives du 25 juillet 2018, des animaux ont été torturés par des militants pakistanais cherchant à transmettre de clairs messages politiques.
Des animaux vêtus aux couleurs d'opposants politiques ont été peints, battus ou tués au coeur d'une campagne déjà bien marquée par la violence. Différents attentats à la bombe visant des rassemblements politiques ont en effet coûté la vie à plus de 150 personnes en amont du vote du 25 juillet.
Les sondages électoraux promettent actuellement une majorité de sièges au parti Pakistan Tehreek-i-Insaf (“Mouvement du Pakistan pour la Justice”, PTI), qui vaincrait ainsi les anciens dirigeants de la Ligue musulmane du Pakistan-Nawaz (PML-N). Cela devrait propulser le fondateur du PTI et ex-joueur de cricket Imran Khan au rang de Premier ministre.
Dans une vidéo [Avertissement : contenu violent ou explicite] devenue virale sur les réseaux sociaux le 27 juillet, un chien enveloppé dans un drapeau du PTI se fait tirer dessus à trois reprises par un homme portant le drapeau du Parti Qaumi Watan (QWP), apparemment entouré d'autres partisans du candidat perdant.
Face à la colère des internautes, la police de la province de Khyber Pakhtunkhwa a réagi et arrêté deux suspects dans la ville de Bannu – où la vidéo a été tournée – puis a rendu publique la confession des deux hommes.
Responding within 12 hours, #Bannu Police worked throughout the night to arrest 2 culprits at 6:45am involved in torturing, killing the animal and making video of it. #KPPolice thanks Social Media users for raising the issue. pic.twitter.com/0SDSYEgAu9
— KP Police (@KP_Police1) July 28, 2018
La police de Bannu a répondu dans les 12 heures et travaillé toute la nuit pour finalement arrêter à 6h45 les 2 coupables, accusés d'avoir torturé et tué l'animal et d'en avoir fait une vidéo. La police de KP remercie les internautes d'avoir dénoncé cet acte.
Adoptée en 1890, la Loi sur la prévention de la cruauté envers les animaux au Pakistan avait justement été amendée un peu plus tôt cette année, permettant de sanctionner les coupables par des amendes plus élevées et jusqu'à trois mois de prison ferme. Ces nouvelles sanctions ont donc pu être appliquées pour la première fois dans le cadre de cette affaire.
Depuis, le candidat perdant – dont la photo se trouve sur le drapeau porté par les tireurs – a publié une vidéo (en pachtou, langue parlée par 15 % de la population pakistanaise) dans laquelle il condamne cet acte et affirme qu'il n'est en aucun cas lié aux hommes présents dans la vidéo.
Il a également soulevé l'idée que cette dernière ait pu être tournée par ses opposants pour le discréditer et a demandé qu'une enquête soit menée à ce sujet.
QWP candidate from Bannu in his video message said that the forceful change in the elections result and rigging hasn't made him as upset as that video by unknown cruel person shooting a dog with PTI flag pretending yo me his supporter. https://t.co/lSYiowwniF
— ارشد آفریدی (@Arshad_Afridi) July 27, 2018
Dans son message vidéo, le candidat du QWP de Bannu a déclaré que l'évolution surprenante dans les résultats d'élections certainement truquées ne l'a pas autant affecté que la vidéo de cet anonyme cruel qui tire sur un chien portant le drapeau du PTI et prétend être l'un de ses partisans.
Sur une autre photo qui a également tourné sur Twitter, on peut voir un homme tenir une corneille par les pattes au milieu d'une foule célébrant la victoire locale du PPP :
The anti PPP politician Arbab Rahim, is called “black crow” by PPP supporters due to his dark complexion.
In these photo PPP supporters are celebrating PPP's win by killing/torturing the crow. @imtiazchandyo pic.twitter.com/FFhA8QKB7T— Qadeer Sarki (@QadeerSarki1) July 27, 2018
Arbab Rahim, l'homme politique anti PPP, est appelé “Corneille noire” par les partisans du PPP parce qu'il a le teint foncé. Sur cette photo, des militants célèbrent la victoire du PPP en tuant/torturant une corneille.
A Karachi, des gens ont écrit le nom d'un concurrent politique sur un âne et battu l'animal. Grâce aux vives réactions des internautes, une équipe de la Fondation pour le Sauvetage des Animaux a pu intervenir et a accueilli l'âne dans son refuge, où il a été nommé Héros.
With the upcoming elections looming upon us, no one is spared from the wrath of this time…not even the most helpless of animals. This is a hate crime. A #donkey beaten to pulp, punched in the face and abdomen several times, nose broken, kicked all ove.. https://t.co/OIKM2oRSuu pic.twitter.com/it2Fgct9DT
— ACF Animal Rescue (@ACFAnimalRescue) July 16, 2018
A la veille des élections, personne n'est à l'abri… pas même le plus vulnérable des animaux. Cet acte est un crime de haine. Un âne battu jusqu'au sang, frappé à la tête et dans l'abdomen à plusieurs reprises, le museau cassé, roué de coups jusqu'à ce qu'il s'effondre
Malheureusement, l'âne n'a pas survécu à ses blessures.
Our Hero just passed away.
He was doing a lot better until yesterday, he managed to stand up on his own, eat powdered food although he had a broken jaw, and drink water on his own. He had been on IV drips, multivitamins and antibiotics. His external wo.. https://t.co/phhh7DKwiR pic.twitter.com/6MEI0Xitvy— ACF Animal Rescue (@ACFAnimalRescue) July 23, 2018
Notre Héros vient de nous quitter.
Il allait bien mieux depuis hier, il avait réussi à se lever tout seul, avait mangé de la nourriture en poudre malgré sa mâchoire cassée et réussi à boire par lui-même. Il était sous perfusion, multivitamines et antibiotiques. Ses blessures externes guérissaient.
Beaucoup de personnes ont réagi avec colère sur les réseaux sociaux devant toute cette cruauté à l'encontre des animaux. L'avocat Yasser Latif Hamdani a ainsi tweeté :
I would be incredibly proud of this country if the Chief Justice of Pakistan for once did the right thing and took Suo motu notice of the cruel inhumane killings of animals during and after this election campaign.
— Yasser Latif Hamdani (@theRealYLH) July 28, 2018
Je serais terriblement fier de ce pays si, pour une fois, le juge en chef du Pakistan prenait la bonne décision et réagissait de son propre chef face aux tueries inhumaines d'animaux pendant et après cette campagne électorale.
Durant les précédentes élections, en 2013, un tigre blanc que l'on faisait régulièrement défiler lors des rassemblement organisés par Mariam Nawazz – la fille de Nawaz Sharif, chef du PML-N – est mort d’épuisement par la chaleur.
Cette année encore, le candidat du PML-N a fait défiler un lion dans sa circonscription pendant les élections, suscitant de nouvelles critiques.
Dans une interview accordée à Global Voices, Naeem Abbas, responsable du plaidoyer à The Brookes Pakistan, réfléchissait aux raisons pour lesquelles les agresseurs ne sont pas punis :
Animals have always been abused but this is the first time police have taken action in an animal abuse case. Also, we have a culture in which if someone is caught they get away by paying a bribe.
Les animaux ont toujours été maltraités mais c'est la première fois que la police réagit dans une affaire de mauvais traitements envers des animaux. Et dans notre culture, le coupable qui se fait prendre s'en sort en versant un pot-de-vin.