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Trois ans après, le mouvement libanais « Vous puez » trouve de nouvelles raisons de manifester

Catégories: Afrique du Nord et Moyen-Orient, Liban, Droits humains, Environnement, Manifestations, Médias citoyens

Manifestation anti-incinérateurs à Beyrouth, le 29 août 2018. Photo Hassan Chamoun, utilisation autorisée.

[Article d'origine publié le 10 septembre 2018] De nouvelles manifestations du collectif libanais « Vous puez » ont éclaté à Beyrouth après que les autorités ont annoncé [1] l’installation d’incinérateurs afin de résoudre la crise chronique des ordures que connaît la ville.

Les manifestants ont marché jusqu’au parlement libanais et aux bureaux du ministère de l’environnement le 29 août, jour du troisième anniversaire de ce mouvement né à Beyrouth et mené par la jeunesse beyrouthine. En 2015, « Vous puez » a mobilisé des milliers de personnes contre la mauvaise gestion des déchets par les autorités, dans les manifestations non partisanes les plus importantes au Liban depuis la fin de la guerre civile en 1990.

Les autorités beyrouthines ont d’abord révélé les projets concernant les incinérateurs en octobre 2016, à la suite d’une consultation [2] avec leurs homologues de Copenhague, considérée comme la capitale européenne la plus propre. Les Danois auraient recommandé l’usage d’usines de valorisation énergétique des déchets afin de remédier à la crise.

Cependant, plusieurs organisations de la société civile et scientifiques libanais ne sont pas satisfaits de cette solution. Ils soutiennent que les résidus de cendres posent de graves risques environnementaux dont la gestion est difficile et coûteuse.

Les résidents de Karantina, quartier industriel de Beyrouth qui possède déjà deux sites [3] d’élimination des déchets à ciel ouvert, figuraient parmi les plus farouches opposants à ces usines de valorisation des déchets. En 1997, avec l’aide de Greenpeace, ils avaient organisé une campagne acharnée, et finalement fructueuse, contre les projets des autorités de construire un incinérateur sur le territoire.

Vingt ans plus tard, le 30 août 2017, ils ont pris les rues à nouveau suite aux rumeurs comme quoi la région avait été choisie pour la nouvelle usine de valorisation des déchets. Le maire de Beyrouth, Jamal Itani, a cependant indiqué [4] que l’endroit n’avait pas encore été décidé.

L’une des autres voix à s’élever contre la solution d’incinération à Beyrouth est la Coalition de gestion des déchets [5], qui préconise des solutions durables au problème des ordures. Ils soutiennent que bien que des incinérateurs aient été déployés avec succès en Europe, le Liban ne possède pas les infrastructures nécessaires pour assurer leur utilisation en toute sécurité.

Le groupe a lancé une pétition [6] en février 2018 demandant aux autorités de développer des politiques de réduction des déchets, de mettre en place des programmes de recyclage et d’adopter des méthodes d’élimination conformes aux réglementations environnementales nationales et internationales. La pétition a regroupé 727 soutiens sur l’objectif des 50 000 fixé au départ.

De plus, un groupe d’universitaires de l’Université américaine de Beyrouth a tenu une conférence en mars 2017 et a présenté des preuves scientifiques contre l’adoption d’incinérateurs [7].

Au début de l’année 2018, Ziad Abichaker, éminent activiste environnemental et entrepreneur dans le domaine des déchets, a sorti un documentaire analysant toutes les menaces liées à l’incinération et les raisons pour lesquelles les habitants de Beyrouth s’inquiéter de son impact sur l'environnement et la santé des gens.