En Thaïlande, manifestations contre un nouveau report des élections

Des manifestants à Bangkok critiquent la décision de reporter à nouveau les élections prévues le 24 février 2019. Photo de Prachatai, partenaire de contenus avec Global Voices.

La nouvelle d'un possible nouveau report des élections parlementaires a fait descendre les Thaïlandais dans la rue pour la première fois depuis qu'en décembre 2018 le gouvernement a levé l'interdiction des attroupements publics de plus de cinq personnes.

Le 6 janvier, des manifestants se sont retrouvés sur la passerelle de la station Monument de la Victoire du train Skywalk, pour condamner l'ajournement du scrutin. Puis environ 200 protestataires ont rejoint un rassemblement plus vaste le 8 janvier sur le carrefour Ratchaprasong dans le centre de Bangkok pour réclamer la publication d'un décret fixant officiellement la date et les préparatifs des élections de février.

Des chefs de partis politiques ont décrit la contestation comme étant le reflet du désir des Thaïlandais d'un retour à la démocratie.

Démocratie ajournée

L'armée thaïlandaise s'est emparée du pouvoir en 2014 et a institué un Conseil national pour la paix et l'ordre (acronyme en anglais NCPO) pour gouverner le pays. L'armée a emprisonné plusieurs leaders d'opposition, imposé de stricts contrôles sur les média, et mis hors-la-loi les attroupements de cinq personnes et plus dans les lieux publics.

Les militaires ont fait le serment de rétablir l'ordre civil et d'organiser des élections une fois les réformes politiques mises en place. Ils ont rédigé une constitution en 2016 qui stipulait la tenue d'élections tout en garantissait le maintien d'une place prédominante de l'armée à tous les niveaux de l’administration.

Le Général Prayut Chan-o-cha, président du NCPO et premier ministre, restait vague en répondant aux questions sur la date des élections. Mais en décembre 2018, son gouvernement confirma que les élections auraient lieu le 24 février 2019. Le gouvernement avait aussi abrogé l'ordonnance qui interdisait les campagnes politiques et les réunions publiques.

“Encore reportées. Le fils de p…”

Le 3 janvier, le Vice-Premier ministre Wissanu Krea-ngam annonça que les élections du 24 février pourraient être reportées afin de ne pas interférer avec les préparatifs officiels du couronnement du Roi Maha Vajiralongkorn, qui aura lieu le 4 mai. La monarchie est une institution révérée en Thaïlande, et le gouvernement applique une des lois de lèse-majeste les plus sévères du monde.

L'annonce de Wissanu a irrité un grand nombre de lycéens et leur a fait utiliser le hashtag Twitter #เลื่อนแม่มึงดิ (Luen Mae Mueng Di: Encore reportées, le fils de p…), pour exprimer leur frustration. Les étudiants ont aussi utilisé le hashtag #dek62 (Gosses de 2019).

Sur Twitter, un leader étudiant, a posté ceci sur son compte, comme le rapporte le site indépendant d'informations Prachatai :

This entire problem came about because Mr. Prayut is not a man of his word. Mr. Prayuth should at least come out and apologize to the kids.

Toute l'affaire est partie de ce que M. Prayut n'est pas un homme de parole. M. Prayut devrait au minimum venir s'excuser auprès des gosses.

L'annonce précédente que les élections auraient lieu en février avait déjà causé la modification des dates du Test d'aptitude générale et du Test d'aptitude professionnelle (acronyme en anglais GAT- PAT), que les étudiants passent à l'échelle nationale pour être admis dans les universités. Ajourner les élections reviendrait à bouleverser le planning du GAT-PAT et la préparation des étudiants à cet examen important.

Le Général Prayut a pris acte du sentiment des étudiants, qu'il a appelés ses ‘petits-enfants’ en les appelant à la patience et à la compréhension.

Des élections en mars ?

Le 11 janvier, quelques jours après les manifestations, Le Vice-Premier ministre Wissanu a fait l'annonce que les élections auraient lieu au plus tard le 11 mars.

Ce qu'il faut retenir de cette mise au point, c'est qu'il est déjà impossible de tenir les élections le 24 février. Le communiqué n'a pas non plus tenus compte des informations selon lesquelles le Département de l'Administration provinciale a sorti une circulaire donnant instruction aux officiers provinciaux d'état civil d'interrompre les préparatifs des élections.

Les activistes ont mis en doute l'engagement du NCPO à rétablir le régime civil puisque la junte reporte de façon répétitive l'échéancier électoral.

Dans le même temps, le Commandant en Chef de l'armée a accusé les opposants d'être ‘obsédés’ par les élections. Il a justifié que le gouvernement devait aussi donner la priorité au couronnement du Roi.

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