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Un Ouïgour tente de sauver d'un camp chinois « la maman la plus extraordinaire du monde »

Catégories: Chine, Turquie, Droits humains, Gouvernance, Liberté d'expression, Manifestations, Médias citoyens, Advox

Mirchad Ghalip évoque la détention de sa mère dans la région autonome ouïgoure du Xinjiang, en Chine. Capture d'écran d'une vidéo postée sur YouTube le 25 mars 2019.

[Article d'origine publié le 31 mars 2019. Sauf mention contraire, les liens renvoient à des pages en anglais.]

Mirchad Ghalip, un Ouïgour né en Chine, a réalisé une vidéo poignante pour sauver sa mère de 58 ans, Zumret Awut [1], de ce qu'il appelle un « camp de concentration » chinois.

Ghalip pense que Zumret Awut fait partie du million et plus de prisonniers qui sont détenus au sein du système dystopique des « camps de rééducation » au Xinjiang. Il dit aussi ne pas savoir avec certitude si elle est toujours en vie.

Sa mère a été arrêtée en 2017. C'est l'année où sont entrés en vigueur des contrôles stricts de la population, décrétés par le nouveau secrétaire du Parti communiste de la région du Xinjiang, Chen Quanguo. La Chine prétend que ces « centres de formation professionnelle » sont fréquentés par des volontaires et qu'ils ont été créés pour lutter contre le séparatisme et le radicalisme religieux.

L'émouvante vidéo de Ghalip montre parfaitement que tout un chacun, même s'il n'a jamais rien fait pour attirer l'attention du gouvernement, peut se retrouver dans ces camps. Pour être considéré comme à « rééduquer », il suffit d'avoir des liens avec d'autres pays. Or Mirchad Ghalip et sa sœur font leurs études à l'étranger.

Dans la région du Xinjiang, ceux qui n'appartiennent pas à l'ethnie han sont principalement des Ouïgours. Ces mêmes Ouïgours représenteraient la majorité des prisonniers des camps chinois. Il y a peu, de nombreux Ouïgours vivant hors des frontières chinoises hésitaient pourtant encore à parler des souffrances de leurs proches au Xinjiang.

Le sort tragique des Kazakhes — le deuxième groupe ethnique non han — a réussi à attirer plus largement l'attention [2]. Le mérite en revient surtout aux activistes [3] du Kazakhstan, voisin de la Chine. La campagne #MetooUyghur [4] [fr] a fait beaucoup pour rompre ce grand silence ouïgour qui, selon les paroles de Ghalip, « est exactement ce que veut le Parti communiste chinois ».

Pour autant, les Ouïgours ainsi que de nombreux musulmans originaires de la région se plaignent toujours du manque d’efforts diplomatiques pour régler la question du Xinjiang. L'Organisation de la coopération islamique, qui regroupe 57 États musulmans, a ainsi « salué les efforts déployés par la Chine pour prendre soin de ses citoyens musulmans ». Une déclaration faite dans le cadre d'une résolution [5] adoptée lors du sommet des ministres des Affaires étrangères qui s'est tenu en mars. Voilà qui traduit de façon éclatante l'influence économique de la Chine sur les pays du monde entier.

Une diplomatie de cette nature ne laisse d'autre choix à Mirchad Ghalip et à ceux qui rencontrent les mêmes problèmes que d'élever la voix et de se battre plus âprement encore pour la liberté de leurs proches.

La base de données sur les victimes au Xinjiang [6] est la principale ressource anglophone consultable sur les victimes de la répression en cours dans la région autonome ouïgoure du Xinjiang.