La PDG de BlaBlaCar-Russie est désinvitée d'une interview par une télévision russe parce qu'elle est une femme

La silhoutte en carton d'Irina Reyder, la PDG de la filiale russe de BlaBlaCar dans les locaux de l'entreprise. Photo de la Page Facebook  d'Irina Reyder

Irina Reyder, la PDG de la filiale russe du service de covoiturage BlaBlaCar, dit qu'elle a été désinvitée d'un entretien avec Perviy Kanal, la Première Chaîne de télévision, qui est étatique, quand le responsable du programme s'est aperçu qu'elle était une femme.

Reyder a raconté l'incident sa page Facebook.  Elle dit qu'elle écoutait les échanges entre le réalisateur de la Première chaîne et un attaché de presse de BlaBlaCar et qu'elle a enregistré leur conversation :

Р (редактор передачи “Доброе утро”): Формат будет такой: корреспондент едет за рулем и берет интервью у вашего эксперта.

PR (PR – менеджер BBC): Да, отлично.

Р : А кто будет спикером?

PR: Наш генеральный директор Ирина Рейдер.

Р : Ой….у вас же был замечательный парень ..

С: Да, у нас был генеральный директор Алексей Лазоренко, а сейчас Ирина Рейдер.

PR : Да, я знаю, что в прошлом году у вас сменился генеральный директор. Но Ирина как спикер не подходит. Понимаете, у зрителя есть стереотипы… Ну, там, хороший юрист – это мужчина. Или автомобильный эксперт – мужчина, но не женщина. Может быть вы, Сергей, сможете дать нам интервью?

E (un rédacteur de la Matinale Dobre Outro) : Voici le format : notre journaliste conduit une voiture tout en interviewant votre expert.
PR (attaché de relations publiques pour BlaBlaCar) : Oui, parfait.
E : Et qui sera l'interviewé ?
PR : Notre PDG Irina Reyder.
E : Oh…. vous aviez un mec génial avant, non ?
PR : Oui, nous avions Alexeï Lazorenko comme PDG, maintenant c'est Irina Reyder.
E : Oui, je suis au courant du changement de dirigeants que vous avez eu l'année dernière. Mais Irina ne passera pas en tant qu'interviewée. Vous voyez, notre public a certains stéréotypes… Vous savez, un bon juriste, c'est un homme. Ou un spécialiste automobile, c'est un homme, pas une femme. Peut-être que toi, Sergueï, tu peux nous donner une interview ?

Quand Sergueï, le chargé de communication de Reyder, a dit au rédacteur qu'il n'y avait pas de spécialiste masculin dans l'entreprise, raconte-t-elle, il a promis de revenir plus tard après avoir consulté leur réalisateur. Ultérieurement, on a dit au représentant de BlaBlaCar que le format de ce reportage avait changé et qu'on allait plutôt interviewer les utilisateurs du service.

“Qu'en pensesz-vous ? Les nouveaux spécialistes seront-ils assez qualifiés ?” a demandé Reyder, sarcastique, à ses lecteurs.

Dans une réponse à TJournal, un média spécialisé dans la technologie et les médias sociaux, le service de presse de la Première chaîne n'a pas nié la véracité de l'échange, tout en insistant que son approche était non sexiste par essence. Cependant, leur explication n'offrait pas de justification suffisante à cette affirmation :

Два корреспондента — молодой человек и девушка – планируют продемонстрировать мужской и женский подход к экономии. При этом девушка советуется с мужчинами-экспертами, а молодой человек — с экспертами-женщинами. Поскольку девушка планирует экономить на поездках, ей предстоит разговаривать с представителем сервиса поиска попутчиков (да, по задумке этого сюжета, а не из-за гендерного неравенства, он должен быть мужчиной).

Deux journalistes, un jeune homme et une jeune femme, ont voulu démontrer la différence entre l'approche masculine et féminine de l'économie. La jeune journaliste interviewera des experts masculins, tandis que le jeune homme interviewera des femmes. Comme l'objectif de la journaliste est d'économiser sur les déplacements en voiture, elle s'adressera à un représentant du service de covoiturage (oui, à cause de la nature du sujet, et non à cause de l'inégalité hommes-femmes, ce devra obligatoirement être un homme).

La Première chaîne n'a pas expliqué en quoi l'approche d'une femme pour faire des économies est différente de celle d'un homme. Mais le public n'était pas convaincu en tout cas, et l'approche de la chaîne de télévision a suscité des critiques.

Irina Reyder, la PDG de BlaBlaCar, a déclaré qu'elle avait été désinvitée par le rédacteur en chef de l'émission “Bonjour” sur la Première chaîne quand ils ont appris qu'elle était une femme. C'est assez surprenant qu'il y ait encore ce genre d'insanité que nous ignorions encore de la part de la Première chaîne.

Malgré la vive colère soulevée en ligne contre la Première chaîne, la Russie est encore loin d'avoir fait entrer dans la réalité l'égalité des sexes. La Russie se positionne au 75e rang parmi les 149 pays étudiés dans le rapport de 2018 du Forum économique mondial sur les disparités mondiales de genre, marquant un bon score sur l'égalité d'accès aux soins de santé et à l'enseignement chez les femmes, mais manquant de dispositions légales pour la défense de leurs droits. Les féministes et militantes russes utilisent souvent les réseaux sociaux et la satire pour dévoiler les coutumes et les pratiques sexistes. 

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