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Au Bangladesh, l'interdiction des rickshaws provoquent débats et manifestations

Catégories: Asie du Sud, Bangladesh, Développement, Droit, Droits humains, Environnement, Gouvernance, Histoire, Manifestations, Médias citoyens, Politique, Voyages
Rickshaw of Dhaka recorded at Guinness World Records 2015 making heading "most cycle rickshaw in one town". In Dhaka city about 6 Lac rickshaw available.15 million people are living in Dhaka city and 40% people travelling in the city by rickshaw. Image by blackthorne57 used under Creative Commons license (CC BY-NC 2.0). [1]

Rickshaws à Dacca. Image de blackthorne57 sous licence CC BY-NC 2.0.

Dacca, la capitale du Bangladesh, est aussi connue comme la capitale mondiale des rickshaws non motorisés [2], ou cyclo-pousses : les rickshaws font partie intégrale des trajets courts et réguliers de la ville depuis une cinquantaine d'années. Dacca est l'une des villes les plus densément peuplées au monde [3] et a du mal à faire face à la forte croissance de sa circulation. [4]

Depuis le 7 juillet 2019, les rickshaws sont interdits [5] d’accès sur trois artères principales de la ville, dans une tentative de réduction des embouteillages. Leurs conducteurs et quelques clients ont protesté [6], et cette décision a provoqué un débat sur les problèmes de circulation qui affectent la capitale et a remis en question l'absence d'alternative pour les passagers réguliers, qui utilisent les rickshaws pour se rendre à leur travail.

Écologiques, mais un cauchemar routier

On estime [7] à six cent mille le nombre de rickshaws à Dacca, bien que moins de cent mille possèdent une licence. Ils sont écologiques, lents, et moins sujets aux accidents. Mais le mélange de cyclo-pousses, rickshaws motorisés, motos, bus et voitures sur les routes rendent la circulation chaotique et imprévisible. Bien souvent, il n'existe pas de couloir séparé pour les rickshaws afin de séparer leur circulation plus lente dans les rues de Dacca.

[8]

Circulation de rickshaws à Dacca. Image de by Sandro Lacarbona sur Flickr. CC BY-NC-ND 2.0.

Les autorités ont donc interdit tous les véhicules non motorisés sur trois axes de circulation majeurs et ont décidé de les remplacer [9] en élargissant le réseau d'autobus.

Interdire les rickshaws, une solution ?

L'annonce a provoqué une controverse publique : plusieurs milliers de conducteurs de cyclo-pousses sont descendus dans les rues [11] pour protester tandis que d'autres ont exprimé leurs inquiétudes sur les réseaux sociaux. Les manifestants ont occupé les axes principaux de la ville pendant plusieurs jours, causant de sévères embouteillages qui se sont propagés dans les quartiers voisins.

La grève des conducteurs de cyclo-pousses contre l'interdiction.

L'interdiction des rickshaws dans certaines parties de la capitale Dacca fait descendre leurs conducteurs dans la rue pour protester, les routes sont bloquées et les gens qui doivent se rendre à leur travail en souffrent.

Les conducteurs de cyclo-pousses de Dacca manifestent pour protester contre leur interdiction sur les axes majeurs.

Les conducteurs expliquent [24] que l'interdiction a été approuvée sans leur fournir un programme de revenu alternatif ou compensatoire.

Les autorités imposent une interdiction sur les déplacements de rickshaws dans certains rues de la ville sans
1. Assurer un programme compensatoire approprié pour les conducteurs et leurs familles.
2. Offrir un mode de transport alternatif aux passagers […]

Outre les conducteurs, les propriétaires de rickshaws, qui gagnent leur vie en louant les cyclo-pousses, se sont joints aux manifestations et ont tenu des conférences de presse, posant un ultimatum pour le retrait officiel de l'interdiction [27]. Ils se plaignent de l'absence de dialogue avec les autorités, qui ont imposé cette interdiction arbitrairement.

Les passagers ont eux aussi exprimé leur frustration [28] quant aux difficultés auxquelles ils font face dans leurs trajets et suggèrent que d'autres mesures auraient pu être mises en place à la place (ou avant) d'imposer une interdiction inattendue. Par exemple, une voie dédiée aux rickshaws aurait pu être créée, ou un meilleur système de transports en commun, tout en limitant le nombre de voitures privées permis dans les rues.

Dewan Maruf Shuvo [29] écrit sur Facebook :

রিকশা বন্ধ হয়ে গেলে আমি চড়ব কিসে, এটা যেমন চিন্তার বিষয়। তেমনি এই লক্ষ লক্ষ মানুষের কর্মসংস্থানের কথাও চিন্তা করা লাগবে।

Si les rickshaws sont interdits, il va falloir que je trouve une alternative pour me rendre au travail. Et nous avons besoin de réfléchir à une source de revenu alternative pour ces centaines de milliers de personnes (les conducteurs de rickshaws).

Dans une discussion distincte [9], experts et urbanistes insistent sur le besoin d'un “système de communication intégré”, basé sur un transport multimodal, et affirment le besoin d'alternatives adéquates aux rickshaws en tant que système de transport en commun.

L'Institut des urbanistes du Bangladesh [30] a, lui, organisé une conférence de presse dans la capitale pour aborder collectivement les issues d'une telle interdiction. Les rickshaws représentent actuellement quarante pour cent des méthodes de transport de Dacca, et leur utilité contribue à leur popularité.

Although making roads off-limits to rickshaws can be a temporary remedy, traffic congestion will not ease up if the restriction is not imposed on private cars.

Même si rendre interdire l’accès des routes aux rickshaws peut être un remède temporaire, les embouteillages ne cesseront pas si aucune restriction n'est imposée aux voitures privées.

D'un autre côté, les supporteurs de cette décision ont mis en avant différents arguments sur les réseaux sociaux. Ainsi, Sumon Khan [31] écrit sur Facebook :

#রিকশা জাস্ট মেইন রোডে চলাচল নিষেধ করা হয়েছে। মেইন রোড থেকে ২৫/৩০ ফিট ভিতরে গলি রয়েছে সেখানে চালানো তো নিষেধ করে নাই। তাই না জেনে মন্তব্য, সমালোচনা করা ঠিক না।

Les rickshaws ne sont interdits que sur les axes majeurs. Il y a encore beaucoup de rues et de ruelles où ils peuvent encore exercer (pour des courtes distances). Donc informez-vous complètement avant de critiquer quelque chose.

Mohammad Tauheed [32], Senior Fellow de TED et coordinateur académique a l'Institut du Bengale [33] a cassé quelques mythes qu'il a lus sur les médias sociaux :

রিকশা মিথ

১. রিকশা জরুরি:
মোটেই না। ? হাঁটুন! ঢাকা শহরের সকল রিকশায় চড়া দূরত্বই হাঁটার যোগ্য দূরত্ব। [..]
২. রিকশা গরিবের বাহন:
রিকশা ভাড়া উবার প্রিমিয়ামের কাছাকাছি এখন [..]
৩. রিকশাওয়ালারা গরিব, অসহায়:
রিকশাওয়ালারা তেমন গরিব নয়। তাঁদের মাসিক আয় ২০ হাজার টাকার উপরে, যা অনেক চকচকে অফিসে নতুন যোগ দেওয়া স্নাতক বেতন হিসেবে পান না। [..]

Mythes autour des rickshaws:

1. Les rickshaws sont nécessaires :
Pas du tout ! Marchez ! Les courtes distances pour lesquelles vous prenez un rickshaw sont faisables à pied.
2. Les rickshaws font les navettes entre la maison et le travail pour les pauvres :
Maintenant, les tarifs des rickshaws sont proches de ceux de Uber Premium.
3. Les conducteurs de rickshaws sont pauvres et sans défense:
Faux. Ils ne sont pas si pauvres. Certains d'entre eux gagnent plus de 20.000 takas (211 euros) par mois, soit plus que le salaire du premier emploi d'un jeune diplômé.

Les autorités ont recommandé aux conducteurs de cyclo-pousses de cesser leurs manifestations et les ont invités à discuter. Ils ont aussi promis [34] de complètement supprimer les rickshaws de Dacca dans les deux prochaines années.

Les quelques vingt kilomètres du nouveau métro de Dacca [35] doivent ouvrir en 2021. Jusque là, la solution au complexe problème de circulation [36] de Dacca reste hors d'atteinte.