Une Caraïbe, des Caraïbes ?

Le calypsonien Lord Nelson chantait « nous formons tous une famille ». Les Caribéens optimistes seront d'accord avec ces paroles, mais la réalité c'est que si on décrit les pays caribéens comme une famille, cela serait un ensemble complexe parce qu'il existe beaucoup de rivalités entre frères. Les blogueurs caribéens Geoffrey Philp (écrivain jamaïcain), Guyana Media Critic connue sous le nom de Living Guyana et Francis Wade (consulteur de gestion jamaïcain) ont partagé leurs points de vue personnel sur cette région complexe avec l'auteure.

Ce que signifie être caribéen

« Être caribéen signifie faire partie d'une des plus intéressante et involontaire expérience sociale du monde », déclare Geoffrey Philp, qui vit à Miami. « Dans cet archipel, nous avons un rassemblement de personnes qui viennent de partout dans le monde, qui essayent de vivre ensemble sans avoir recours au génocide…

« À Miami, nous essayons tous de bien nous entendre parce que nous sommes une minorité, c'est pour cela que nous y sommes obligés. Cela dit, lorsqu'une bagarre éclate, cela s'inscrit souvent dans la lignée des stéréotypes, qui sont en fait le résultat de ne pas penser par soi-même. Et certains ne veulent pas penser par eux-même ».

Living Guyana décrit les Caraïbes comme un « ensemble unique de personnes unies par une histoire commune, toujours plus et peut-être irréversiblement influencée par les Américains. »

« C'est un conglomérat qui résiste normalement au changement avec un besoin désespéré d'une véritable unification politique et économique. L'un des problèmes de la vie caribéenne c'est qu'en dépit de la nécessité évidente d'une véritable fusion politique et économique, il existe un niveau important de résistance dans certains endroits ». Même s'il faut admettre qu'il existe un point commun entre les amoureux du plaisir qui unit la culture et la vie sociale des Caraïbes, il existe également des différences subtiles qui définissent chaque îles de manière concrète, tel que la langue, la nourriture ou l'image de soi. « Mais dans le fond », affirme t-il, « nous sommes un village singulier unit par une histoire commune et inégalable ».

Pourtant, tout le monde n'adhère pas automatiquement au concept d'« une seule Caraïbe ». Pour que Francis Wade soit émotionnellement lié à cette notion d'« une seule Caraïbe », il a fallu la persuasion d'un ami Trinidadien que « nous étions tous un peuple des Caraïbes », et des vacances à Trinidad, qui lui étaient familières : « Ça ressemblait à la Jamaïque, on se sentait comme en Jamaïque ».

Il y a beaucoup de réponses à la question de l'identité caribéenne, comme l'ont découvert Caribbean Free Radio et la BBC.

Pour certains, l'identité nationale implique ses propres défis. Selon Living Guayana, être guyanais signifie « malheureusement, une discrimination inhérente à la fois à l'intérieur et à l'extérieur du pays. C'est être perçu comme désavantagé, mais c'est aussi faire preuve de diligence et de persévérance pour réussir. Cela signifie être résilient et plus ouvert à l'intégration des Caraïbes. Cela signifie être naturellement hospitalier et chaleureux. Ça veut dire être fier.”

Antilles versus Caraïbes

Beaucoup de gens utilisent les termes « Antilles » et « Caraïbes » de façon interchangeable. Mais la question demeure : existe-t-il une distinction entre les termes « Antilles » et « Caraïbes »? Living Guyana pense qu'il s'agit d'une « simple sémantique », tandis que Francis Wade utilise les termes de manière interchangeable : « Logiquement, je sais que Cuba, Haïti, la République dominicaine, la Guadeloupe et la Martinique sont des Caraïbes », dit-il. « Caraïbes signifie principalement un pays anglophone du bassin des Caraïbes, mais j'y inclus les Bahamas et le Belize, bien qu'ils ne fassent pas vraiment partie du bassin des Caraïbes ».

Geoffrey Philp, d'autre part, a une distinction claire sur les termes :

« Les Antilles désignent les anciennes colonies d'Angleterre, dont la plupart sont anglophones. Le terme « Caraïbes » désigne l'ensemble : anglais, français, espagnol, jamaïcain, l'archipel d'îles et les régions côtières de l'Amérique centrale et du Sud. On pourrait même étendre la définition à des endroits en Amérique du Nord comme Miami récemment colonisée et les anciennes villes de Louisiane et des Carolines ou de l'Amérique des plantations ».

Unité Caribéenne

Dans une publication de Global Voices intitulée Bombastic?, Janine Mendes-Franco écrit : « En tant que région, les Caraïbes réussissent assez bien à fonctionner quand il s'agit d'initiatives comme l'Université des Antilles et le cricket des Indes occidentales (malgré les récents événements concernant ce dernier) ». Francis Wade a tenté d'expliquer les attitudes jamaïcaines :

« En Jamaïque, on ne pense même pas à se battre. On veut juste faire notre truc. Nous aimons être ensemble quand ça marche, et nous aimons être séparés quand nous sommes séparés. La Fédération a échoué principalement parce que le Parti travailliste démocratique (DLP) considérait l'opposition comme un moyen de gagner les élections. S'ils avaient été plus intelligents, ils n'auraient pas tant forcé un référendum et l'histoire aurait été différente.

« Aujourd'hui, en raison du Marché et de l'économie uniques des Caraïbes (CSME), un plus grand nombre de Jamaïcains s'identifient comme étant des Caraïbes. Heureusement, de nombreuses entreprises des Caraïbes exercent leurs activités au-delà des frontières. Il s'agit de savoir quand il deviendra plus facile de faire des affaires, quand les obstacles seront levés. C'est une question de temps, et non pas de possibilité ».

Bien que Geoffrey Philp pense que les peuples des Caraïbes « ne veulent pas qu'ils travaillent (Fédération et CSME) », il est prompt à donner une vision optimiste de la capacité des peuples des Caraïbes à travailler ensemble.

« Quand nous sommes unis, nous sommes imparables », explique-t-il avec enthousiasme. « Regardez le travail de cette génération qui s'est battue pour l'indépendance sur un front uni au-delà des frontières nationales. Ils se sont effondrés une fois qu'ils ont obtenu l'indépendance, mais l'unité était énorme et sans pareil.

C'est une triste réalité que les humains se réunissent rarement, sauf pour combattre un véritable ennemi. Nous n'avons pas d'ennemis, alors nous avons décidé de nous suicider ».

Il y a ceux comme Don Mitchell du blog Corruption Free Anguilla qui attendent avec impatience de faire partie d'« une partie intégrante de la nation indépendante et souveraine connue sous le nom des Antilles ». Il décrit les Antilles comme « un pays qui est en train de naître. Il n'a pas encore de drapeau ni d'hymne national ».

Rivalité économique

Alors que Francis Wade a récemment blogué sur « certaines annonces importantes liées aux acquisitions dans la région des Caraïbes », Living Guyana pense que les difficultés des peuples des Caraïbes sont dues « aux différentes réponses à l'unification politique et économique et aux stéréotypes des uns envers les autres sans aucune initiative de la part de la CARICOM ou des gouvernements individuels pour y remédier ».

S'unir malgré les différences

« Mis à part quelques similitudes découlant de leurs histoires communes, un Trinidadien est différent d'un Barbadien, qui à son tour est différent d'un Jamaïcain », écrit Francis Wade. Définie par ses caractéristiques complexes, la marque caribéenne est une marque souvent utilisée par ses États. Pourtant, certains voient la nécessité de s'en éloigner lorsqu'elle est attaquée. Selon Barbados Free Press, « Quand vous vous êtes déclaré membre de la famille, la réputation de votre frère est la vôtre ».

Bien que les différences entre les peuples des Caraïbes puissent parfois créer des divisions entre eux, ils savent aussi se rallier les uns aux autres et se sentir fiers des réalisations des uns et des autres. Philp, Wade et Living Guyana sont tous d'accord sur le fait que les Caraïbes bénéficieront de la mobilisation des forces de leurs membres. En fait, Living Guyana prophétise cela :

« Les gouvernements des Caraïbes se retrouveront dans une situation où ils seront forcés d'officialiser et d'institutionnaliser les peuples des Caraïbes, par le biais des voyages, du travail, des affaires, du commerce, du sexe et des relations, et ils sont déjà sur la bonne voie ».

Le texte original [es] de cet article a été publié en mai 2007.

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