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Peu après l'adoption le 12 décembre 2019 de l’amendement de la loi sur la citoyenneté, qui autorise l'entrée de réfugiés de six appartenances religieuses différentes en provenance des pays voisins (Afghanistan, Bangladesh et Pakistan), de violentes manifestations d'opposition à la loi ont eu lieu dans les états d'Assam, Tripura et Meghalaya au nord-est de l'Inde. Alors que la loi sur la citoyenneté est critiquée pour sa tendance anti-musulmane, la majorité de la population d'Assam s'y oppose par crainte qu'elle ouvre la porte aux réfugiés Hindous du Bangladesh, et que cela affecte la langue et la culture locales.
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Au moins trois manifestants sont morts sous les tirs suspectés de la police. Dans les grandes villes d'Assam et de Tripura, des manifestants ont allumé des flambeaux et mis le feu à des pneus et à des cartons. L'internet est bloqué depuis le 11 décembre dans l'Assam et le Meghalaya.
Why Guwahati exploded in protests – and what explains Assam's resistance to the Citizenship Billhttps://t.co/UQUWZO2Pn5 pic.twitter.com/suE322BAbX
— scroll.in (@scroll_in) December 14, 2019
Pourquoi les manifestations ont explosé dans le Guwahati – et ce qui explique la résistance de l'Assam au Projet de loi sur la citoyenneté
Indian state Assam is burning in the protest against #CAB. The media is forced by the govt to not provide any coverage to the protests what so ever. #CABProtests #AssamProtest pic.twitter.com/EzhnwIAlaZ
— Global Politics? (@Globalpoliticss) December 14, 2019
L’État indien d'Assam brûle sous les manifestations contre la CAB (Citizenship Amendment Bill – Projet de la Loi sur la Citoyenneté). Les médias sont contraints par le gouvernement à ne plus couvrir les manifestations.
Editors Guild of India seeks withdrawal of I&B Ministry's recent advisory asking all private TV channels to desist from showing content that could incite violence or promote “anti-national attitudes”. The advisory was issued in wake of violence in Assam against #CitizenshipAct
— Press Trust of India (@PTI_News) December 14, 2019
L'Association nationale des rédacteurs en chef demande le retrait de la récente recommandation du Ministère de l'Information et des Médias (I&B – Information & Broadcasting) demandant aux chaînes de télévision privées de s'abstenir de diffuser des contenus qui pourraient inciter ou promouvoir des “attitudes anti-nationales”. La recommandation a été émise à la suite des violences qui ont eu lieu à Assam [lors des manifestations] contre la loi sur la citoyenneté.
La loi amendée traite l'identification des réfugiés séparément selon leurs convictions religieuses. De nouvelles clauses ont été ajoutées à la Loi Citoyenneté de 1955 qui permet à l’État Indien d'accorder la nationalité à six communautés – Bouddhistes, Chrétiens, Hindous, Jaïns, Parsis et Sikhs – qui fuient les persécutions religieuses et ethniques des trois pays voisins. L'Assam est une province de 33 millions d'habitants où règne une grande diversité religieuse et ethnique, dont des peuples autochtones. Parmi les nombreux facteurs et incidents historiques qui ont conduit à ces manifestations, il faut compter l'Accord d'Assam, un protocole d'accord datant de 1985, qui a fourni le cadre de la prise en charge des immigrants en provenance du Bangladesh.
Qu'est-ce que l’Accord d'Assam?
L'Assam a connu une arrivée massive de réfugiés du Bangladesh depuis sa formation en 1947, puis des années 1950 jusqu'aux années 1980. De 1980 à 1984, le gouvernement indien dirigé alors par Indira Gandhi du Parti du Congrès National Indien (INC) s'est concerté avec ceux protestant contre ces arrivées. Après l'assassinat de Gandhi en 1984, le gouvernement indien conduit par Rajiv Gandhi a initié la mise en place de l'Accord qui a été signé en présence aussi bien du gouvernement fédéral que provincial et des représentants des syndicats. L'Accord a mis un terme au Mouvement d'Assam qui avait tenu six ans durant, aboutissant à l'identification et à l'expulsion des réfugiés en provenance du Bangladesh. L'Accord était clair sur le fait que tout réfugié, quelle que soit sa conviction religieuse, étant entré en Inde avant le 31 décembre 1965, obtiendrait la nationalité et que ceux qui seraient entrés après cette date se trouveraient en situation illégale. Les manifestations actuelles à Assam montrent aussi la présumée violation de l'Accord, étant donné que la nouvelle loi sur la citoyenneté légalise maintenant les réfugiés cités précédemment, mais entrés en Inde avant le 31 décembre 2014.
Qu'est-ce que le Registre National des Citoyens (NRC)?
Les tensions et les émotions sont déjà déjà très vives alors que l'Assam est en pleine procédure de mise à jour des registres de ses 33 millions de citoyens afin d'identifier et d'expulser les immigrés clandestins venus du Bangladesh. Près d'1,9 millions de personnes risquent aujourd'hui de devenir apatrides après avoir été exclues du Registre National des Citoyens de l'Assam.
Le NRC est un registre du gouvernement comprenant les noms et les informations pertinentes pour l'identification de tous les citoyens indiens.
Coupures d'internet dans l'Arunachal Pradesh, l'Assam et le Tripura
Les manifestations ayant sombré dans la violence le 11 décembre, les autorités locales ont ordonné la coupure du réseau internet dans l'Assam et le Meghalaya pour enrayer la propagation des rumeurs. Cela a également eu des répercussions sur les transactions en ligne et les connections internet via mobile.
Social media platforms like Facebook, WhatsApp, Twitter, and YouTube are likely to be used for spreading of rumors and also for transmission of information like pictures, videos and text that have the potential to inflame passions and thus exacerbate the law and order situation. – Officials in the state of Assam
Les plateformes de média sociaux tels que Facebook, WhatsApp, Twitter et YouTube sont susceptibles d'être utilisées pour propager les rumeurs, ainsi que pour transmettre des informations dont des images, des vidéos et du texte qui pourraient exacerber les passions, et par conséquent nuire au bon maintien de l'ordre public.
Mobile & broadband Internet services suspension extended for another 36 hours in #Assam under section 5(2) of the Indian Telegraph Act ? #CABProtests #CABPolitics pic.twitter.com/3Tana5oyRv
— Karma Paljor (@Karma_Paljor) December 14, 2019
Prolongation de 36 heures de la suspension des services mobile et internet à haut débit dans l'Assam en vertu de la section 5(2) de la Loi Indienne sur le Télégraphe ?
L'avocat en droits humains Arjun Sethi a critiqué cette coupure de réseau :
India leads the world in internet blackouts.
Right now, it’s blocked in four different states: Kashmir, Assam, Tripura & Arunachal.
We all know what fascist governments do in the dark. Don’t be a bystander; speak now & speak loudly.
— Arjun Sethi (@arjunsethi81) December 12, 2019
L'Inde est leader mondial des coupures d'internet. En ce moment même, l'internet est bloqué dans quatre états différents : Cachemire, Assam, Tripura & Arunachal. Nous savons tous ce que les gouvernements fascistes font dans l'ombre. Ne soyez pas spectateur; parlez maintenant et parlez fort.
La coupure d'internet dans l'Assam restera effective jusqu'au 16 décembre. L'observatoire NetBlocks, qui surveille ce phénomène dans le monde entier, a relevé une interruption des connections aussi bien mobiles que fixes, conduisant à un blocage de l'information et au dépérissement de la couverture médiatique et de la liberté d'expression. Il est important de noter que, depuis le 5 août, l'accès à internet est officiellement interdit dans les territoires de l'Union de Jammu et du Cachemire indiens (ancien État indien), après l'abrogation de l'article 370 de la Constitution indienne qui conférait à la région un statut particulier.
Le Bureau d'Information de la Presse en Inde a tweeté sur les implications du projet d'amendement de la loi sur la citoyenneté ciblant le nord-est de l'Inde:
Busting some #Myths : #Mythbusters focusing on North-Eastern India, especially #Assam, surrounding the #CitizenshipAmendmentAct. The 11-points address the most common misconceptions and fears in the region (1/2)
#CAB #CAB2019 pic.twitter.com/dJ35FKxcBZ
— PIB India (@PIB_India) December 14, 2019
Brisons quelques mythes: les Briseurs de Mythes se concentrent sur le nord-est de l'Inde, particulièrement la province d'Assam, à propos de l'amendement de la loi sur la citoyenneté. Les 11 points traitent des plus grandes peurs et idées reçues dans la région (1/2)
Au milieu de ce conflit, le Ministre en chef de l'Assam, Sarbananda Sonowal, a appelé le peuple d'Assam à maintenir la paix et l'harmonie. Le Premier ministre Narendra Modi a quant à lui partagé une vidéo sur Twitter promettant que les langues et les cultures autochtones du nord-est de l'Inde seraient respectées après l'entrée en vigueur de l'amendement de la loi sur la citoyenneté.