
Des habitants de New Delhi manifestent contre la Loi sur la citoyenneté et contre le Registre national des citoyens. Image de DoiplomatTesterMan via Wikipedia, sous licence CC BY-SA 4.0
[Sauf mention contraire, tous les liens mènent à des sources en anglais]
L’article d'origine a été publié le 26 février 2020.
Depuis le 23 février 2020, le district Nord-Est de la capitale indienne est devenu le théâtre d'affrontements violents entre les manifestants des deux camps du débat autour de la Loi sur la citoyenneté. Cette situation qui perdure a maintenant dégénéré en émeute. Ces violences, qui ont coïncidé avec la visite officielle du président américain Donald Trump en Inde, ont entraîné la mort d’au moins 17 civils musulmans et hindous, dont un agent de police, et ont fait plus de 150 blessés. Un grand nombre de ces personnes ont subi des blessures par balle, qui, selon certains manifestants, auraient été infligées par des manifestants du camp adverse, soutenant la Loi sur la citoyenneté. Cinq stations de métro et certaines écoles sont toujours fermées dans le district Nord-Est de Delhi [fr]. Ces manifestations contre la Loi sur la citoyenneté (CAA) [fr] ont lieu, à la fois à l'échelle nationale et internationale, depuis décembre 2019.
Situation volatile
Le 22 février, environ 200 femmes se sont réunies près de la station de métro du quartier de Jaffrabad dans le district Nord-Est de Delhi pour entamer un sit-in contre le Registre national des citoyens (NRC) et contre la Loi sur la citoyenneté (CAA) [fr]. Les manifestantes ont bloqué l'entrée de la station de métro, ainsi qu'une rue adjacente. Cette démarche a été comparée aux manifestations pacifiques en cours à Shaheen Bagh, un autre quartier de Delhi. Les femmes qui manifestaient à Jaffrabad brandissaient le drapeau national de l'Inde et scandaient, devant la police, le slogan « Azaadi from CAA, NRC » (« Libérez-nous du CAA et du NRC »).
Security Update
Entry & exit of Jaffrabad have been closed. Trains will not be halting at this station.
— Delhi Metro Rail Corporation (@OfficialDMRC) February 23, 2020
Mise à jour sur la situation sécuritaire
L'entrée et la sortie de la station Jaffrabad sont fermées. Les trains ne marqueront pas l'arrêt à cette station.
Lire aussi : Malgré les critiques, un mouvement mené par des femmes en Inde maintient son combat contre la Loi sur la citoyenneté [fr]
Le nombre de manifestants a augmenté le 23 février lorsque Kapil Mishra, un responsable local du parti au pouvoir, Bharatiya Janata Party (BJP) [fr], a organisé une contre-manifestation en soutien à cette nouvelle loi sur la citoyenneté. Kapil Mishra aurait donné un « ultimatum » à la police de Delhi, leur demandant de dégager les routes bloquées par les manifestants.
A ruling party leader flanked by a senior police official issues an open warning. No one has acted against him -neither the police or his party. 24 hours later, violence in east Delhi spirals, the police seem adrift. #chronology https://t.co/dEYS9zMSjf
— Sreenivasan Jain (@SreenivasanJain) February 24, 2020
Un responsable du parti au pouvoir, flanqué d'un haut fonctionnaire de police, lance un avertissement direct. Personne ne s'est opposé à lui, ni la police, ni son parti. 24 heures plus tard, la violence dans l'est de Delhi redouble d'intensité, la police semble à la dérive.
Cela a conduit à des affrontements : les manifestants s'opposant à la Loi sur la citoyenneté ont été roués de coups et les deux camps se sont mis à se lancer des pierres. La police a repris le contrôle en utilisant du gaz lacrymogène.
Toutefois, les affrontements se sont poursuivis le lendemain et on a fait état de nouveaux actes de violence dans des quartiers proches à population majoritairement musulmane.
VIDEO : #Chandbagh
Delhi is burning, this is what the goverment wanted.Delhi is made into war zone by Rightwingers!
Sab yaad rakha jayega! #DelhiViolence #DelhiBurning pic.twitter.com/dnyTfCvusK
— CAA / NRC Protest Info. (@NrcProtest) February 24, 2020
VIDÉO : #Chandbagh
Delhi brûle : c'est ce que le gouvernement voulait.
Les gens de droite ont transformé Delhi en un champ de bataille !
Sab yaad rakha jayega! #DelhiViolence #DelhiBurning [Dehli brûle]
#DelhiViolence | Hindu mobs are throwing petrol bombs across the road at Muslim houses in Kabir Nagar.
LIVE updates: https://t.co/l0D8zN9XBn
— scroll.in (@scroll_in) February 25, 2020
#DelhiViolence | Des foules de manifestants hindous lancent des cocktails Molotov de l'autre côté de la rue sur des maisons appartenant à des musulmans à Kabir Nagar.
Informations actualisées en continu : https://t.co/l0D8zN9XBn
La journaliste Vijayta Lalwani raconte cette scène de violence dans un article publié sur le site d'information indien First Post :
As a shop was set ablaze in Delhi’s Maujpur area on Monday afternoon, a middle-aged man with a saffron tikka on his forehead repeatedly asked reporters to stop filming the arson. “Bade dinon ke baad Hindu jaaga hai,” he said. “Hindus have woken up after long.” He did not want to identify himself, other than as a supporter of the Citizenship Amendment Act. [..]
“Five police officials were filling stones in a battery rickshaw and sending it there [towards Maujpur Chowk],” said Kazim, a 30-year-old resident of Jaffrabad. “This is a conspiracy.” He alleged the police were on the side of the CAA supporters and were arming them for a future clash.
Lundi matin, alors que des manifestants mettaient le feu à un magasin dans le quartier de Maujpur à Delhi, un homme d'une cinquantaine d'années, arborant un tikka jaune safran sur le front, demandait à plusieurs reprises aux journalistes d'arrêter de filmer cet incendie volontaire. « Bade dinon ke baad Hindu jaaga hai » a-t-il dit. « Les Hindous se sont réveillés après un long sommeil. » Il n'a pas souhaité donner son nom, mais il s'est contenté de s'identifier comme un sympathisant de la Loi sur la citoyenneté.
« Cinq agents de police remplissaient un pousse-pousse électrique avec des pierres avant de l'envoyer là-bas [en direction de Maujpur Chowk] » a raconté Kazim, un habitant de Jaffrabad âgé de 30 ans. « C'est un complot. » Il a accusé la police d'être du côté des sympathisants de la Loi sur la citoyenneté et de leur fournir des armes en amont d'un affrontement à avenir.
Srishti Srivastavaun, un journaliste du site d'information indien The Wire, s'est entretenu avec un manifestant soutenant la Loi sur la citoyenneté et le Registre national des citoyens qui a avoué avoir brûlé un mausolée :
They (meaning the Muslims) have entered (India) only through the barbed wires. Just make a count of them. You know about Census; they should not be so many here. At least half of those who have been sitting (at the protest sites) have entered (India) through the barbed wires (meaning illegally).
Ils (à savoir les musulmans) ne sont entrés (en Inde) qu'en passant à travers les barbelés. Comptez-les. Vous connaissez le recensement : ils ne devraient pas être aussi nombreux ici. Au moins la moitié de ceux qui ont pris part aux sit-ins (sur les lieux des manifestations) sont entrés (en Inde) en passant à travers les barbelés (c'est-à-dire illégalement).
Lire aussi : Modi instrumentalise l'hostilité envers les immigrants bangladais en Inde pour justifier les changements de la loi sur la citoyenneté [fr]
Le 25 février, Al Jazeera annonçait qu'une mosquée avait été vandalisée. On avait également mis le feu à des magasins et à des véhicules, dont un camion de pompiers, à Jaffrabad et Maujpur.
Update Ashok Nagar, Delhi 6.00pm: A mosque has been vandalised by Hindutva terror forces, as they brazenly revisit their demolition tactics. We see complete inaction from @delhipolice, @HMOIndia , @PMOIndia and @arvindkejriwal.#DelhiRiots #DelhiBurning #DelhiViolence pic.twitter.com/jOsrAzVCP8
— Shaheen Bagh Official (@Shaheenbaghoff1) February 25, 2020
Mise à jour, Ashok Nagar, Delhi, 18h00 : Une mosquée a été vandalisée par des forces de l'Hindutva qui veulent répandre la terreur en revisitant avec impudence leurs tactiques de destruction. On constate une inaction totale de la part de @delhipolice, @HMOIndia, @PMOIndia et @arvindkejriwal.#DelhiRiots [émeutes à New Delhi] #DelhiBurning [Delhi brûle] #DelhiViolence
Very volatile in Yamuna Vihar. We’ve seen mobs of men carrying sticks and stones. There’s been arson. We were being stopped from filming. You can someone yelling that at the end of video. #DelhiBurning #DelhiViolence pic.twitter.com/5QrRnsieM5
— Yogita Limaye (@yogital) February 25, 2020
Situation très volatile à Yamuna Vihar. On a vu des foules constituées d'hommes portant des bâtons et des pierres. Il y a eu des incendies criminels. On nous empêchait de filmer. On entend quelqu'un crier cela à la fin de la vidéo. #DelhiBurning [Delhi brûle] #DelhiViolence
A Gurdwara has given shelter to Muslim families fleeing Hindutva mob in NE Delhi.
(Not giving exact location as it may endanger Sikhs as well. Will inform over DM if people may need to go there)#DelhiBurning
— Aditya Menon (@AdityaMenon22) February 25, 2020
Dans le nord-est de Delhi, des familles musulmanes fuyant la foule de manifestants de l'Hindutva ont trouvé refuge dans un gurdwara [temple sikh, ndt].
(Je ne donne pas l'endroit exact parce que cela pourrait aussi mettre en danger les sikhs. Je donnerai l'information par message privé si des gens ont besoin d'y aller) #DelhiBurning [Delhi brûle]
Le ministre en chef de Delhi, Arvind Kejriwal [fr], a condamné la violence et a lancé un appel au calme aux membres locaux de l'Assemblée législative et à la population. Il a également fait état d'un manque important d'agents de police pour faire face à la violence.
Les internautes ont partagé leurs opinions sur les réseaux sociaux :
No protester wants riots. No rioter wants protests.
— Hansal Mehta (@mehtahansal) February 24, 2020
Les manifestants ne veulent pas des émeutes. Les émeutiers ne veulent pas des manifestations.
Look at ‘em. How old they could be? The seeds of communalism & hatred sown by Hindutva terrorists, took them out on the streets with bludgeons! This brain-dead generation will decide who will rule our nation! Detox them, get them back, else we're doomed forever #DelhiBurning pic.twitter.com/PEJuejqHWZ
— Suvarna Haridas (@Suvarna_haridas) February 25, 2020
Regardez-les. Quel âge peuvent-ils bien avoir ? Les germes du communautarisme et de la haine semés par les terroristes de l'Hindutva, qui les a fait descendre dans la rue avec des matraques ! Cette génération en état de mort cérébrale décidera qui dirigera notre pays ! Envoyez-les en cure de désintoxication, ramenez-les à la raison, sinon on est perdus à jamais #DelhiBurning [Delhi brûle]
This is the most horrific video I have seen today. It's worse than actual murder when the ruling party's elected MLA is asking people to shoot in the middle of a riot.
Yes this is @BJP4India MLA abhay verma from Laxmi Nagar#DelhiBurning https://t.co/zyirEB503T— Preeti Sharma Menon (@PreetiSMenon) February 25, 2020
C'est la vidéo la plus horrible que j'ai vue aujourd'hui. C'est pire qu'un meurtre lorsqu'un élu du parti au pouvoir, membre de l'Assemblée législative, demande aux gens de tirer au milieu d'une émeute.
Oui, il s'agit de @BJP4India Abhay Verma, membre de l'Assemblée législative, originaire de Laxmi Nagar #DelhiBurning [Delhi brûle]
Sadly there is no happiness in the streets outside, as the CentralGovt condones violence unleashed by its own supporters, & the StateGovt wrings its hands helplessly, claiming that cheap water& electricity are more important than lives, principles or social harmony. #DelhiBurning https://t.co/9eevU7IJ6Y
— Shashi Tharoor (@ShashiTharoor) February 25, 2020
Malheureusement, il n'y a pas de bonheur dans les rues, alors que le gouvernement central ferme les yeux sur la violence générée par ses propres sympathisants et que le gouvernement local se tord les mains de désespoir, affirmant que de l'eau et de l'électricité abordables sont plus importants que des vies humaines, des principes ou l'harmonie sociale. #DelhiBurning [Delhi brûle]
Le site d'information First Post et le journal The Times Of India diffusent des informations en continu au sujet des manifestations.
Consultez le dossier spécial de Global Voices : Qui paie le coût du déclin de la démocratie en Inde? (en anglais).