Après l'audience d'extradition de Julian Assange, une lame de fond de soutiens

Event in support of Julian Assange - Barcelona 24 February 2020

Evénement de soutien à Julian Assange (Barcelone, 24 février 2020) – Photo aimablement communiquée par le compte Flickr Assemblea Nacional Catalana (CC BY-NC 2.0)

L'audition de Julian Assange, le fondateur de Wikileaks, tenue en vue de son extradition vers les États-Unis le 24 février 2020 a fait converger beaucoup de monde, dans les rues et sur internet, en soutien à sa remise en liberté. Sur Twitter, Bean a résumé l'attitude de nombreuses personnes à travers le monde :

Ne soyez pas dupes : Julian Assange est un journaliste, pas un hacker, et les États-Unis veulent faire de son travail – le journalisme de sécurité nationale – un crime.

Assange trouve aussi des appuis significatifs du côté des journalistes de la presse traditionnelle :

1200 journaux de 98 pays. Nous exhortons tous les journalistes à s'exprimer pour défendre J Assange dans ce moment crucial. Temps dangereux pour le journalisme courageux.

Le contexte

Près de huit ans ont passé depuis qu'Assange s'est réfugié dans l'ambassade d’Équateur à Londres, et une année depuis son incarcération dans la prison britannique de Belmarsh pour non-respect de sa liberté sous caution.

En 2006 il avait lancé le site web Wikileaks, qui a publié des informations classifiées et fuitées du gouvernement étasunien et d'autres sources. Principaux exemples : les carnets de guerre d'Afghanistan et d'Irak, et les télégrammes de la diplomatie américaine. Assange a collaboré avec la lanceuse d'alerte de l'armée américaine Chelsea Manning sur ces fuites. Le procès en extradition est en rapport avec des charges de conspiration pour commettre une intrusion informatique et pour espionnage. Assange risque jusqu'à 175 ans de prison s'il est reconnu coupable de toutes les charges. Il a été accusé par le gouvernement américain de mise en danger de vies.

Héros ou scélérat ?

Assange est un personnage controversé pour nombre d'autres raisons. En 2010, la Suède a émis à son encontre un mandat d'arrêt international en relation avec des allégations d'agression sexuelle, une accusation aujourd'hui prescrite. En 2016, la publication des archives de courriels privés de Hillary Clinton a terni sa réputation aux yeux de nombreux progressistes, qui lui ont reproché d'avoir fait le jeu du président russe Vladimir Poutine et d'avoir aidé à l'élection de Donald Trump. Assange nie ces accusations.

Mais de nombreux internautes écartent les attaques contre Assange ou Wikileaks, et sont convaincus que l'essentiel ce sont les principes en cause, et non la personnalité d'Assange :

“Chacun a son point de vue sur Assange. Mais, honnêtement, notre point de vue ne doit pas être déterminant. Nous, le public, ne sommes pas au fait. Nous sommes facilement manipulés. Nous pouvons être dans l'erreur.”

D'autres refusent de le soutenir pour toute une série de raisons :

Assange ne mérite aucun respect, il l'a perdu quand il a aidé Trump à être élu.

Assange n'est pas un saint. Il a mis des vies en danger par ses actes. L'application de la loi est importante, à 100 %, mais n'oublions pas que la merde semée par wikileaks a mis des familles entières en danger dans des endroits comme l'Irak. Impardonnable.

Ancien ambassadeur d'Australie en Israël et aujourd'hui député de base pro-gouvernement, Dave Sharma a rejoint les multiples politiciens qui se désintéressent d'Assange. Greg Barns, un défenseur des droits humains et conseiller de l'équipe Assange, a récemment pris Sharma à partie :

@DaveSharma, il n'y a pas d'alternative à cette proposition. Assange doit être soutenu tout comme doivent l'être les autres Australiens détenus à l'étranger @AssangeCampaign Pour Sharma l'universitaire [de Melbourne] emprisonné [Kylie Moore-Gilbert, arrêté en Iran] mérite plus de sympathie qu'Assange

Il existe un petit groupe de députés pro-Assange dans le parlement fédéral australien. Le député d'opposition Julian Hill a soutenu ‘l'autre Julian’ dans un discours à la Chambre des représentants :

Ils emprisonnent et torturent Julian Assange pour le faire taire. Je me suis exprimé en faveur de ses droits aujourd'hui… et les lumières du Parlement se sont littéralement éteintes…

Campagnes #FreeAssange

Il y a eu une résurgence mondiale de rassemblements et manifestations de soutien. L'universitaire néo-zélandais Alex Hill est un militant qui coordonne Candles4Assange (Bougies pour Assange):

120 événements tenus cette semaine pour @DEAcampaign [Don't extrade Assange, la campagne officielle de Wikileaks]
avec plus de 35 événements EN CONTINU chaque semaine ou quinzaine à travers le monde (25 villes en Allemagne !)
24 février 2020 (37 villes dans 22 pays)

Les séparatistes catalans d’‘Assemblea Nacional Catalana ont posté une photo en haut de l'article sur Flickr, montrant une manifestation à Barcelone le 24 février. Extrait de la légende : “L’Assange va donar suport a l’autodeterminació de Catalunya: ara som nosaltres qui li’n donem!” (“Assange a donné son soutien à l'autodétermination de la Catalogne : maintenant c'est nous qui le lui donnons !”).

L'avocate guatémaltèque Renata Avila (membre de Global Voices) a rendu compte de la quatrième journée de l'audience, au sujet des questions posées par le traitement d'Assange par la justice :

Résumé du procès d'extradition d'Assange aujourd'hui : l'accusé ne peut pas “entendre” les arguments et la juge refuse d'y remédier : ce qu'il veut c'est juste être assis à côté de ses avocats. Raisonnable en gros. Elle a refusé. Elle a même menacé d'élargir la procédure. Procédure régulière ? ou procédure punitive ?

Dans la logique des allégations antérieures du Rapporteur de l'ONU sur la torture, Nils Melzer, qu'Assange “a été torturé et continue de l'être” dans la prison de Belmarsh.

Il existe de multiples pages Facebook, telles que Free Julian Assange et des dizaines de milliers de posts Instagram pétitionnant pour sa libération.

Tentative de suicide de Chelsea Manning

Entre temps, on apprenait que Chelsea Manning avait tenté de mettre fin à ses jours dans la prison étasunienne où elle est détenue, après avoir refusé de répondre aux questions d'un grand jury sur Assange :

Une information bouleversante. Chelsea Manning doit être libérée immédiatement !

Dans un développement ultérieur, un tribunal a ordonné sa remise en liberté et le grand jury a été dissous. Wikileaks a réagi :

Le grand jury sur WikiLeaks en fonction depuis + de 10 ans a été dissous. Chelsea Manning et Jeremy Hammond ont été libérés de ses machinations coercitives. A présent abandonnez toutes les charges contre Julian Assange et libérez-le.

Pétition en ligne

Phillip Adams de Brisbane a lancé une pétition en ligne en 2018, qui a recueilli plus de 365.000 signatures. Le texte demande à la ministre australienne des Affaires étrangères Marise Payne et au Premier ministre Scott Morrison de défendre Assange : ‘Julian Assange est un citoyen australien et comme tel il est de la responsabilité essentielle du gouvernement australien de [le] protéger et de garantir que ses droits fondamentaux ne soient pas enfreints, et à cette fin le gouvernement australien a échoué’.

Cet animateur radio, personnalité très en vue des médias du même nom est aussi du côté d'Assange, demandant à chacun d'en faire davantage :

Dans le magazine week-end de The Australian par Philip Adams : “C'est nous qui sommes coupables de trahison, la trahison de nos principes. Pas Julian Assange”.

L'audience d'extradition reprendra en mai.

Commentez

Merci de... S'identifier »

Règles de modération des commentaires

  • Tous les commentaires sont modérés. N'envoyez pas plus d'une fois votre commentaire. Il pourrait être pris pour un spam par notre anti-virus.
  • Traitez les autres avec respect. Les commentaires contenant des incitations à la haine, des obscénités et des attaques nominatives contre des personnes ne seront pas approuvés.