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Après avoir récemment confirmé le second cas de COVID-19 du pays, le ministère de la Santé de Trinité-et-Tobago a tenu une conférence de presse dans l'après-midi du 14 mars 2020 pour informer les citoyen·ne·s sur la situation et les mesures d'atténuation actuellement mises en place.
Le ministre de la Santé, M. Terrence Deyalsingh, a qualifié de « forte » et de « décisive » la réponse du gouvernement à la situation du COVID-19, notamment depuis l'application de la première restriction de voyage le 30 janvier. Le ministre a ajouté que les deux hôpitaux principaux désignés pour traiter les personnes atteintes de cette maladie étaient Caura (réputé pour sa spécialisation dans le traitement des troubles respiratoires) et Couva, situé au centre de l'île de Trinité. M. Deyalsinghi a également expliqué que si le nombre de cas venait à augmenter, l'hôpital d’Arima, situé dans le nord du pays, serait à même d'assurer une prise en charge supplémentaire.
La directrice médicale du pôle spécialisé dans les maladies thoraciques de l'hôpital de Caura, le docteur Michelle Trotman, a signalé que l'état de santé de l'homme de 52 ans qui avait été identifié comme le cas initial de COVID-19, s'améliorait ; les médecins s'attendent à ce qu'il se rétablisse complètement. Bien que le pronostic du second patient soit plus sérieux, l'homme de 66 ans est apparemment en phase de rétablissement.
Expliquant que le virus se propage par l'accès aux muqueuses situées dans les yeux, le nez et la bouche, le docteur Trotman a réaffirmé à la population la nécessité de la vigilance sur le lavage des mains et la limitation des contacts sociaux : « Si le virus ne peut pas rentrer, alors cela ne peut pas devenir une maladie » a-t-elle ajouté. D'après elle, cela nécessiterait un changement culturel car les Trinidadiens ont tendance à exprimer leur affection par le toucher.
Alors que la plupart des personnes susceptibles de contracter le COVID-19 présenteront des symptômes bénins de type grippal, Dr. Trotman a averti que les personnes âgées et celles souffrant de troubles immunitaires devaient être prudentes. Elle a également indiqué que le ministère avait mis au point un questionnaire visant à faciliter le dépistage de cas potentiels et que la population devrait se sentir confiante quant à la préparation du système de santé public et aux capacités d'accueil. Dans l'état actuel des choses, les cas suspects sont testés par le biais de prélèvements nasopharyngés.
Les services d'urgences (A&U) de la plupart des grands hôpitaux ont désormais des systèmes de triage permettant de traiter les patients présentant des symptômes similaires à la grippe. Situé dans la capitale, l'hôpital général de Port-d'Espagne dispose depuis le 15 mars d'une zone de triage séparée pour les personnes susceptibles de souffrir du COVID-19. Le ministère porte également une attention particulière à la santé et à la sécurité du personnel médical, qui sera en première ligne dans la lutte contre l'épidémie.
Les heures de visite des hôpitaux publics ont été restreintes ; si les visiteurs reçoivent l'autorisation, ce sera généralement un·e par un·e. D'autre part, un seul parent ou responsable légal est autorisé à rester auprès des patient·e·s du service pédiatrique.
En outre, l'archevêque catholique Jason Gordon a suspendu toutes les messes à partir du 14 mars.
Responsabilité individuelle
Tout en insistant clairement sur le fait que les gens ne devraient pas se comporter d'une manière pouvant entraîner la mise en danger d'autrui, le ministre de l'Intérieur, M. Stuart Young, qui a également pris la parole lors de la conférence de presse, a déclaré que la « responsabilité individuelle et sociale » étaient des facteurs cruciaux dans la lutte contre le COVID-19.
Compte tenu du fait que les deux cas de la maladie à Trinité-et-Tobago sont arrivés de l'extérieur, Mr Young a expliqué que les déplacements liés aux activités du gouvernement avaient cessé, tout en ajoutant que les voyages de ses concitoyen·ne·s devraient se limiter aux déplacements « essentiels » ou en cas « d'urgence ». Concernant les personnes devant absolument voyager, le ministre a expliqué que ces dernières devraient immédiatement se mettre en quarantaine de leur propre chef dès leur retour. Les 13 membres de l'équipage du vol Caribbean Airlines (CAL) ont ainsi suivi cette règle dès qu'il a été établi que l'un des passagers – qui est décédé plus tard – avait été testé positif pour le COVID-19.
Si la conférence de presse n'a pas totalement permis de lever le voile sur la manière dont la directive de quarantaine spontanée allait être appliquée, le médecin en chef du comté et responsable du plan de quarantaine nationale, le Dr. Roshan Parasram, a cependant expliqué que la loi sur la quarantaine permettait aux officiers de police de s'assurer du respect de la loi par l'usage de la force si nécessaire. La loi autorise également la police à pénétrer dans des locaux, navires ou avions sans mandat et d'arrêter toute personne (encore une fois sans mandat) suspectée d'être en violation de cette législation. Dans l'état actuel des choses, toute personne faisant « obstacle à l'application » de la loi sur la quarantaine est passible d'une condamnation à une amende de 6 000 dollars de Trinité-et-Tobago (soit approximativement 800 euros) et d'une peine de six mois d'emprisonnement.
La compagnie aérienne Caribbean Airlines a mis en place une équipe d'urgence et fourni à son personnel des kits de protection, contenant des équipements de protection individuelle (EPI), du matériel de nettoyage et des informations sur les protocoles d'hygiène. Une ligne téléphonique d'urgence 24h/24h a également été ouverte pour les employé·e·s qui ont besoin d'assistance et d'informations concernant le COVID-19. Malgré les révélations du ministre Stuart Young, selon lesquelles les aéroports feraient partie des lieux les plus risqués à fréquenter, la conférence de presse n'a pas expliqué jusqu'où pourraient s'étendre les mesures de précaution de la compagnie régionale. Quand CAL assure un vol jusqu'à New York, par exemple, son personnel de bord reste dans le comté de Nassau, un comté qui a récemment déclaré l'état d'urgence alors que le nombre de personnes infectées par le coronavirus continue d'augmenter à Long Island .
Bataille de l'information
Le ministre Terrence Deyalsingh, tout en exhortant ses concitoyen·ne·s à être responsables, a déclaré que la « première décision raisonnable » que la population devrait prendre était d'ignorer les réseaux sociaux, qui selon lui « causent plus de dommages que le coronavirus à l'heure actuelle ».
Le ministre Stuart Young s'est rangé derrière cette opinion, accusant les gens de faire l'usage des réseaux sociaux pour commettre des méfaits, semer la peur et diffuser de fausses informations « à des fins politiques ». Les prochaines élections législatives trinidadiennes doivent se tenir en septembre 2020 [fr]. Seules deux « sources d'informations officielles » existent concernant le COVID-19, a souligné M. Young : « le ministère de la Santé et le ministère des Communications ».
Le service de police de Trinité-et-Tobago a depuis lancé un avertissement indiquant qu'en vertu de la loi sur les infractions sommaires [pdf], les citoyen·ne·s pouvaient désormais être condamnée·s à une amende ou une peine d'emprisonnement pour avoir partagé de fausses informations.
Tout en ajoutant que les réseaux sociaux avaient transformé une pandémie en une « panique endémique », le Dr. Trotman a exhorté les internautes à utiliser les plateformes de réseaux sociaux pour transmettre des informations véridiques sur le COVID-19 et pour aider les autorités sanitaires à « combattre et vaincre » le virus. « Le comportement de la population fera évoluer la situation », a-t-elle ainsi déclaré.
Découvrez le dossier spécial de Global Voices consacré à l'impact international du COVID-19 (en anglais).