Cambodge : une vendeuse de vêtements en ligne accusée de pornographie pour ses tenues jugées « sexy »

Vann Rachana escortée par la police après son arrestation. Global Voices a flouté la photo du suspect. Photo tirée de la page Facebook de la police municipale de Phnom Penh.

Sauf mention contraire, tous les liens de cet article renvoient vers des pages en anglais.

La police cambodgienne a engagé des poursuites pour pornographie à l’encontre d’une utilisatrice de Facebook âgée de 39 ans pour avoir vendu des produits en étant vêtue de tenues sexy, ce qui porterait atteinte aux valeurs et à la culture khmères.

Le 17 février 2020, le Premier ministre Hun Sen a participé à la réunion annuelle du Conseil national cambodgien pour les femmes où il a parlé de la nécessité d'enquêter et d'empêcher les femmes de vendre des produits sur Facebook tout en portant des vêtements contraires à la morale ou aux « valeurs des femmes khmères et à la culture khmère ».

Deux jours plus tard, la police a annoncé [km] sur les réseaux sociaux qu'elle avait convoqué Vann Rachana (connue sous le nom de Thai Srey Neang sur Facebook) pour l'interroger et s'informer sur sa page Facebook, sur laquelle on peut trouver des produits tels que des sous-vêtements pour femmes et des accessoires de beauté. Elle est apparue dans une vidéo où elle demande le pardon du public et promet de ne plus porter de « vêtements provocants » sur sa page Facebook.

I am sorry. I hope the leader and public forgive me.

Please, other online sellers, take note of my case. It has caused the public to hate me and affected the honour and morality of women.

Je suis désolée. J’espère que le dirigeant et le public me pardonneront.

S’il vous plaît, les autres vendeurs en ligne, prenez compte de mon affaire. Cela a causé la haine du public à mon égard et a affecté l’honneur et la moralité des femmes.

Le 21 février, la police a déclaré que Vann Rachana avait rompu sa promesse en postant une autre photo « sexy » sur sa page Facebook. Elle a été arrêtée et accusée de pornographie, ce qui enfreindrait la loi cambodgienne contre la traite des êtres humains et l’exploitation sexuelle. Si elle est reconnue coupable, elle risque 15 mois de prison.

Dans une déclaration commune, plusieurs groupes de femmes au Cambodge ont critiqué les remarques du Premier ministre et les actions de la police. Elles ont rappelé aux autorités qu’il n’y avait aucun document légal qui définisse « la valeur des femmes et les valeurs sociales/culturelles khmères » dans le pays. Elles ont ajouté que « punir les femmes pour leur choix vestimentaire fait partie de la cause profonde de la violence, plutôt que d'œuvrer à son élimination, et [cette approche] doit être rejetée ». Elles ont ajouté :

There is much evidence-based research showing that violence against women stems from discriminatory gender stereotypes and a victim-blaming culture – both of which are deeply rooted in Cambodian society – as well as weak law enforcement resulting in a culture of impunity, and is not based on women’s dress, physical appearance or actions.

De nombreuses recherches factuelles montrent que la violence à l'égard des femmes découle de stéréotypes sexistes discriminatoires et d'une culture du blâme des victimes – deux phénomènes profondément enracinés dans la société cambodgienne – ainsi que d'une application insuffisante de la loi, qui se traduit par une culture de l'impunité. Cette violence n'est pas fondée sur la tenue vestimentaire, l'apparence physique ou le comportement des femmes.

Eng Chandy, responsable du programme de plaidoyer et de coordination des échanges pour le Réseau pour le genre et le développement au Cambodge, a déploré les deux poids deux mesures des forces de l'ordre :

What about men selling products online? And many popular singers also wear sexy clothing when they perform. Didn’t they create feelings of sexual arousal? Did anyone file complaints against them? Did anyone say that they damaged Cambodian culture?

This law was written by men and interpreted by men and adopted by men, and men are enforcing the law.

Et qu’est-ce qu'il en est des hommes qui vendent des produits en ligne ? Et beaucoup de chanteurs connus portent des tenues sexy lorsqu’ils se produisent. N'ont-ils pas créé des sentiments d'excitation sexuelle ? Quelqu'un a-t-il déposé plainte contre eux ? Quelqu'un a-t-il dit qu'ils portaient atteinte à la culture cambodgienne ?

Cette loi a été écrite par des hommes et interprétée par des hommes et adoptée par des hommes, et ce sont les hommes qui font respecter la loi.

Amnesty International a publié une déclaration rejetant les accusations de pornographie portées contre Vann Rachana :

These charges rest on the abusive misapplication of a law which was supposedly intended to combat human trafficking, but instead is being used to oppress women.

Ces accusations reposent sur une mauvaise application abusive d'une loi qui était censée lutter contre la traite des êtres humains, mais qui est au contraire utilisée pour opprimer les femmes.

Bunn Rachana, directrice exécutive de Klahaan, une organisation militant pour le progrès de la cause des femmes, a encouragé le gouvernement à prendre l'initiative d'adopter des réformes qui donneront véritablement plus de pouvoir aux femmes au lieu de favoriser la violence :

It’s almost like [officials] are empowering perpetrators to take actions that violate women and girls.

It’s possible to fix [a male-dominated society] if the leadership of the country promotes human rights standards…and takes all necessary steps to correct unfair social norms.

C'est presque comme si [les fonctionnaires] permettaient aux malfaiteurs de prendre des mesures qui violent les femmes et les filles.

Il est possible de reconstruire [une société dominée par l'homme] si la direction du pays promeut les normes des droits humains… et prend toutes les mesures nécessaires pour corriger les normes sociales injustes.

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