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Découverte au Népal : un serpent kukri à deux têtes observé pour la première fois

Catégories: Asie du Sud, Népal, Environnement, Histoire, Médias citoyens
Gros plan d'un jeune serpent à deux têtes dans une clinique vétérinaire. Il est maintenu par un instrument de mesure.

Un serpent “krait commun” à deux têtes. Photo fournie par l'hôpital Kaligandaki et Kamal Devkota, utilisée avec permission.

[Sauf mention contraire, tous les liens renvoient vers des pages en anglais, ndlt]

La bicéphalie [1], affection provoquant chez le serpent la naissance de deux têtes, reste extrêmement rare. Néanmoins, lorsque les villageois du district de Nawalpur [2], dans le centre du Népal, ont capturé un serpent kukri à deux têtes (Oligodon arnenis [3]) en octobre 2018, ils n'ont pas pensé un instant qu'il s'agissait du premier de l'espèce [4] [fr ; pdf]. Un récent rapport publié dans l'édition d'avril 2020 de la Revue de l'IRCF [5] (Fondation internationale pour la préservation des reptiles) confirme cette découverte.

Un serpent à deux têtes, de couleur claire avec des rayures noires sur le corps. Il se tient sur une pierre.

Serpent kukri à deux têtes. Photo fournie par Kasara, Parc national de Chitwan, Népal, via Kamal Devkota. Utilisée avec autorisation.

Les officiers de police ont récupéré le serpent auprès des villageois et l'ont transporté vers la capitale Katmandou [6] [fr] avant de le confier aux gardes du parc national de Chitwan [7] qui ont ensuite relâché [8] le serpent dans son habitat naturel.

La bicéphalie, une anomalie de naissance

Les serpents kukri rayés [3] tiennent leur nom [9] de leurs dents pointues, aplaties et incurvées utilisées pour découper les œufs de reptiles. On les observe au Sri Lanka, en Inde, au Bangladesh, au Pakistan, au Bhoutan et au Népal.

La naissance des serpents à deux têtes s'explique par des raisons diverses [1], comme la division incomplète de l'embryon, la fusion de deux embryons, la température, les facteurs environnementaux et bien d'autres encore. Cette pathologie ne concerne qu'un serpent sur 100 000 dans la nature, et un serpent sur 10 000 né en captivité.

Puisque les serpents ont deux têtes, ils disposent chacun de deux cerveaux et de deux personnalités distinctes, et dans la plupart des cas, une tête dominera l'autre. Les serpents bicéphales ont peu de chances de survivre dans la nature puisque les têtes pourraient se battre entre elles pour la nourriture. En outre, les deux têtes le rendent moins agile lorsqu'il chasse des proies et plus vulnérable face aux prédateurs [10].

Serpent à deux têtes
on appelle cela la bicéphalie
elle survient lorsqu'un embryon aux premiers stades de son développement se scinde, probablement en raison de brusques changements de température,
de la pollution de l'environnement ou de la consanguinité.
quelle qu'en soit la cause,
ces créatures infortunées ne vivront pas longtemps.

[image] Plan serré sur les deux têtes d'un serpent. Il est de couleur jaune. On distingue les yeux.

Si l'on trouve souvent des images et sculptures de serpents ornant les temples et les jets d'eau, dans la vallée de Katmandou [13], les serpents à deux têtes restent incroyablement rares. Le kukri à deux têtes [14] [pdf] est le troisième serpent à deux têtes répertorié au Népal. En 1983, Mishra et le Shah ont recensé le premier serpent bicéphale, un serpent marin juvénile à damier (Fowlea piscator) et, en mai 2018, le deuxième, un krait commun (Bungarus caeruleus), a été identifié dans la municipalité de Kawasoti, dans le district de Nawalpur, au centre du Népal. Ce fut le premier signalement de bicéphalie d'un krait au Népal, qui a été étudié par Kamal Devkota, membre du conseil d'administration de l'Association de Toxinologie du Népal et responsable du projet « Save the Snakes » (Sauvons les serpents), avec son équipe.

Un serpent à deux têtes, étiré de tout son long.

Krait commun à deux têtes. Photo fournie par l'hôpital Kaligandaki et Kamal Devkota, utilisée avec autorisation.

Kamal Devkota s'est entretenu avec Global Voices sur le caractère exceptionnel de la découverte d'un serpent à deux têtes :

Herping [15] [searching for snakes] is not an easy task. In my decade-long career, I have found other interesting cases of snakes but you always don't get what you want. Likewise, these dicephalic snakes are found opportunistically while surveying snakes rather than following any specific methods.

L’herpétologie [15] (la recherche des “animaux rampants”) est loin d'être une tâche facile. En dix ans de carrière, j'ai rencontré d'autres cas passionnants de serpents mais vous n'obtenez pas toujours ce que vous voulez. Par ailleurs, ces serpents bicéphales sont découverts par hasard dans le cadre de l'étude des serpents et non pas en appliquant des méthodes spécifiques.

Au Népal, selon Kamal Devkota, jusqu'à 90 espèces de serpents ont été recensées par plusieurs chercheurs, parmi lesquelles 18 sont jugées venimeuses. Si de nombreuses personnes, en particulier dans les basses terres du Népal, succombent chaque année à des morsures de serpent, ce dernier occupe une place à part dans l'écosystème, a précisé Kamal Devkota, dont les travaux ont permis d'atténuer les conflits entre humains et serpents.

[A snake] plays a vital role to maintain the food web in nature. It also helps to increase the farmer's productivity in the field by eating mice, frogs and other harmful insects. From snake venom, we can produce many different types of medicine, including anti-venom.

Dans la nature, [le serpent] contribue au maintien de la chaîne alimentaire. Il permet également de renforcer la productivité de l'agriculteur dans les champs en se nourrissant de souris, de grenouilles et d'autres insectes nuisibles. Son venin nous permet de fabriquer différents types de médicaments, notamment des anti-venins.