- Global Voices en Français - https://fr.globalvoices.org -

Des pasteurs angolais se retirent de l'Église universelle du royaume de Dieu

Catégories: Angola, Brésil, Manifestations, Médias citoyens, Religion
[1]

La branche angolaise de l'Église universelle du royaume de Dieu cherche à se désolidariser de la direction brésilienne. Le bandeau en bas de l'écran indique : « Des hommes armés et des pasteurs brésiliens s'introduisent dans la cathédrale de Morro Bento. » Capture d'écran d'une vidéo YouTube de la chaîne TPA [2], réalisée le 27 juin 2020 par Dércio Tsandzana

[Sauf mention contraire, tous les liens renvoient vers des sources en portugais, ndlt]

L'affaire remonte à novembre 2019, quand un groupe de pasteurs angolais s'était insurgé contre des problèmes de gestion concernant la branche angolaise de l’Église universelle du royaume de Dieu [3] [fr] (EURD), l'une des plus importantes congrégations néo-pentecôtistes au monde.

Les pasteurs angolais avaient alors signé une lettre ouverte accusant leurs homologues brésiliens de corruption et de racisme, et dénonçant la pratique obligatoire de la vasectomie.

En juin 2020, un contingent de pasteurs angolais a formellement rompu avec l'EURD brésilienne, et constitué l'Église universelle angolaise. Le groupe affirme contrôler 42 % des temples du pays.

La BBC Brésil [4]rapporte que la branche angolaise de l'Église universelle du royaume de Dieu a réagi à cet événement par un communiqué officiel :

Alguns templos no país foram invadidos por um grupo de ex-pastores desvinculados da Instituição por práticas e desvio de condutas morais e, em alguns casos, criminosas e contrárias aos princípios cristãos exigidos de um ministro de culto.

Certains temples en Angola ont été saisis par un groupe d'anciens pasteurs déchus de l'Institution en raison de leurs pratiques déviantes et de manquements à la conduite morale et, dans certains cas, d'activités criminelles et contraires aux principes chrétiens qu'un ministre du culte se doit d'observer.

La police angolaise a été appelée en renfort [5] pour assurer la sécurité des églises dans plusieurs villes et l'affaire fait désormais l'objet d’une enquête criminelle [6] ouverte par les pouvoirs publics.

Le 23 juin, le pasteur Agostinho Martins da Silva, porte-parole de la Commission fondatrice de l'Église universelle du royaume de Dieu réformée d'Angola, a déclaré au quotidien Jornal de Angola [7] :

Os angolanos continuam a testemunhar actos de discriminação racial, castração, abortos forçados às esposas dos pastores angolanos e usurpação das competências da assembleia geral de pastores.

Tivemos uma reunião com a liderança brasileira, que prometeu fazer reformas em relação ao racismo, evasão de divisas, bem como a inserção de pastores angolanos e das respectivas esposas em postos de maior destaque na igreja, mas sem sucesso.

Os nacionais parecem estrangeiros e os estrangeiros tomaram o lugar dos nacionais no nosso próprio território.

Há pastores angolanos há mais de 18 anos na obra e com 40 anos de idade impedidos de casar por recusarem a vasectomia

Les Angolais continuent à témoigner d'actes de discrimination raciale, de castration, d'avortements forcés pratiqués sur les épouses des pasteurs angolais, et d'abus de pouvoir de la part de l'Assemblée générale des pasteurs.

Nous avons eu une réunion avec la direction brésilienne, qui a promis des réformes concernant le racisme, l'évasion fiscale, ainsi que la nomination de pasteurs angolais et de leurs épouses à des postes plus élevés dans la hiérarchie de l'église, sans succès.

Les Angolais sont comme des étrangers dans leur propre pays, tandis que les étrangers prennent leur place.

Il y a des pasteurs angolais qui servent depuis plus de 18 ans et à qui l'on refuse le droit de se marier, même à l'âge de 40 ans, parce qu'ils ont refusé de subir une vasectomie.

Le groupe de pasteurs dissidents affirme que l'Église universelle d'Angola sera prise en charge [8] par le pasteur Valente Bezerra Luiz, l'ancien vice-président de l'EURD.

Le 26 juin, ils ont annoncé la fermeture des églises dans tout le pays, étant dans l'impossibilité d'assurer la sécurité des pasteurs et des fidèles.

Dans une vidéo publiée sur Twitter le 28 juin, un pasteur angolais déclare que les Brésiliens encouragent des pratiques contraires aux droits humains et à la constitution angolaise :

Les jeunes de l'Église universelle d'Angola revendiquent une réforme de l'église.

Pasteurs de l'Église universelle chassés des temples en Angola.
Ils ont dû prendre leurs jambes à leur cou, et nombre d'entre eux sont dans la rue.
Ils veulent rentrer au Brésil.
Mais bien sûr, charlatans.

Le 6 juillet, Agência Pública a indiqué qu’ Edir Macedo [13], le plus haut dirigeant de l'EURD, attribuait l'origine de cette « prise de pouvoir » à deux anciens pasteurs brésiliens en poste en Angola :

Em uma live anunciada como “meditação com pastores” publicada nas redes sociais no sábado, 27 de junho, o líder máximo da Igreja Universal do Reino de Deus (IURD), Edir Macedo, culpou os ex-bispos brasileiros João Leite e Alfredo Paulo por um “golpe” em Angola, que teria levado, há 15 dias, religiosos africanos a se rebelar e assumir o controle de 220 dos cerca de 300 templos da instituição no país.

Dans une vidéo diffusée en direct sur les réseaux sociaux le samedi 27 juin, et présentée comme une « méditation avec des pasteurs », le plus haut dirigeant de l'Église universelle du royaume de Dieu (EURD), Edir Macedo, a tenu pour responsables deux anciens pasteurs brésiliens, João Leite et Alfredo Paulo, pour cette « prise de pouvoir » en Angola. En l'espace de 15 jours, des religieux africains se seraient révoltés et auraient pris le contrôle de 220 temples sur les 300 que compte l'EURD dans le pays.

Retracer l'origine des problèmes

Fondée au Brésil à la fin des années 1970, l'EURD s'est établie en Angola au début des années 1990 et est aujourd'hui l'une des plus importantes congrégations religieuses du pays. Cette église détient le réseau de diffusion brésilien RecordTV, qui compte 150 filiales dans le monde, dont une en Angola.

En février et mars 2013, l'EURD a fait face à une suspension de ses activités suite au décès de dix personnes par asphyxie et par piétinement [14], au cours d'un service qui se déroulait dans un stade bondé.

La chercheuse Teresa Cruz e Silva a expliqué qu'au Mozambique, l'arrivée de l'EURD en 1992 coïncidait avec un contexte de crise [15] faisant suite à la guerre civile, ce qui a contribué à l'adhésion massive à cette église.

Il est également de notoriété publique que les différends se multiplient dans d'autres pays lusophones, comme par exemple au Mozambique [17] et à São Tomé-et-Príncipe [18].