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Comment YouTube a permis à une manifestante de Hong Kong de rejoindre le camp des partisans de Trump

Catégories: Amérique du Nord, Asie de l'Est, Chine, Etats-Unis, Hong Kong (Chine), Élections, Médias citoyens, Politique, Relations internationales
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Steve Bannon, ancien conseiller à la Maison Blanche, et Elmer Yuen, un célèbre commentateur de YouTube sur les relations entre Hong Kong, la Chine et les États-Unis. Capture d'écran prise sur la chaîne YouTube d'Elmer Yuen. 

Le billet suivant est une traduction partielle d'un article publié [2] sur Stand News le 2 novembre 2020. Il est publié sur Global Voices dans le cadre d'un accord de partage de contenu. 

Sauf mention contraire, tous les liens renvoient vers des pages web en anglais.

Un certain nombre d'articles publiés sur les médias anglophones [3] analysent la tendance qu’ont les militants prodémocratie de Hong Kong à soutenir la réélection du président américain Donald Trump. 

Chan Lai Chung, 61 ans, fait partie de ce groupe. Voici son histoire. 

Lorsque les manifestations contre le projet de loi d'extradition ont éclaté en 2019, Chan vivait avec ses sœurs dans la ville de Zhongshan en Chine. Dès qu'elle en a eu l'occasion, elle est retournée à Hong Kong pour participer aux manifestations – elle n'avait plus remis les pieds dans la région depuis longtemps. 

Chan a non seulement participé aux manifestations, mais elle est également devenue une observatrice judiciaire et a fréquemment rendu visite aux manifestants détenus dans les établissements pénitentiaires. C’est avec amertume qu’elle parle des arrestations : « Nous n'avons ni fusils ni canons à Hong Kong, donc si la communauté internationale n’agit pas, nous ne pouvons rien ». 

L’idée de faire du lobbying international a commencé à séduire Chan en septembre 2019, lorsque les activistes Joshua Wong et Denise Ho ont assisté à des audiences au Congrès américain concernant le Hong Kong Democracy Act [4], une loi qui oblige le gouvernement américain à imposer des sanctions à la Chine pour les violations commises à Hong Kong.

Quand les manifestations ont perdu de leur intensité en 2020, elle a commencé à passer plus de temps sur les plateformes de réseaux sociaux. Il y a quelques mois, elle a découvert la chaîne YouTube « Father Yuen, Yuan Gong Yi Political and Economic Commentary  [5]». Avec des débats politiques sur les États-Unis, la Chine et Hong Kong en langue chinoise, la chaîne a engrangé 175 000 abonnés depuis sa création au mois de mai. 

Le « Père Yuen » est un homme d'affaires de 71 ans, Elmer Yuen Gong Yi [6], dont la fille Erica Yuen est la présidente du People Power (en français : Pouvoir du peuple), un parti politique prodémocratie fondé en 2011, qui s'est appuyé sur la radio en ligne et les réseaux sociaux pour communiquer avec ses partisans. Début juin, Elmer Yuen a quitté Hong Kong pour Washington, D.C., où il a fait la connaissance des personnalités politiques américaines en tant que lobbyiste diplomatique privé. 

Bien qu'il n'ait pas été un activiste de haute stature à Hong Kong, Yuen a facilement eu accès aux milieux politiques américains, rencontrant d’importants activistes politiques  [7]tels que Wei Jingsheng, Miles Yu, le consultant en politique chinoise de Mike Pompeo, et Steve Bannon, l'ancien conseiller de Trump à la Maison Blanche. 

Quand la loi sur la sécurité nationale a été promulguée à Hong Kong en juillet, Miles Yuen a décidé de rester à l'étranger. En août, il comptait plus de 100 000 abonnés sur sa chaîne YouTube, dont Chan. 

« J'aime beaucoup écouter le père Yuen », dit-elle. « Il a élaboré une feuille de route et m'a guidée. » Chaque jour, en plus d'assister aux procès des manifestants dans les tribunaux, Chan passe son temps à regarder des débats politiques sur des chaînes YouTube, ajoute-t-elle. 

Lorsqu'on l'interroge sur les élections américaines, Chan répond : « Trump soutient Hong Kong, Biden soutient la Chine. » Lorsqu'on lui demande de s'expliquer, elle déclare : « Trump s'est montré dur envers avec la Chine en déclenchant une guerre commerciale, tandis que Biden dit qu'il va supprimer les droits de douane imposés à la Chine. »

En août, dans une interview accordée à NPR, Biden a été interrogé sur ses intentions quant au « maintien des droits de douane imposés par Trump sur les produits fabriqués en Chine », ce à quoi il semble s'être refusé [8].

Selon Chan, pour vaincre le Parti communiste chinois et sauver Hong Kong, les Hongkongais doivent soutenir la réélection de Trump. 

Ses recommandations sur YouTube comprennent des reportages de The Epoch Times [9], Voice of Hope [10], and Radio Free Asia (RFA) [11]. Les deux premières chaînes sont des médias de langue chinoise financés par Falun Gong [12] [fr], un groupe chrétien de Chine contraint à l'exil par le gouvernement chinois dans les années 1990.

Une enquête récente du New York Times  [13]a révélé que le soutien de l’Epoch Times à Trump a renforcé son influence auprès des lecteurs de droite aux États-Unis. 

Lorsqu’on l’interroge sur les informations récentes qu'elle a apprises sur l'élection américaine, Chan cite un reportage de la chaîne YouTube de l’Epoch Times. Le titre de ce reportage de 25 minutes [14] est « Le pot-de-vin de 5 millions de Biden / Joe Biden espionne son fils et son frère, la famille est dans le chaos / Le New York Times a-t-il été infiltré ? / Xi Jinping tente de subvertir les États-Unis avec 600 organisations ! / Le patient 0 est-il l’œuvre de l'homme ? Histoire de l'épidémie de Covid 19 au Xinjiang» et son contenu est truffé d'affirmations non vérifiées, de conspirations et de désinformation. 

Interrogée sur sa connaissance de Joe Biden, Mme Chan déclare que « le fils de Biden flirte avec sa nièce », faisant probablement allusion à un canular qui prétend à tort que des photos inappropriées de la petite-fille de Joe Biden, Natalie Biden, âgée de 16 ans, ont été trouvées sur le disque dur de l'ordinateur de Hunter Biden, le fils du candidat à la présidence. 

Le New York Post, un tabloïd conservateur américain, a récemment rapporté  [15]qu'il avait obtenu de l'avocat personnel de Trump, Rudy Giuliani, un disque dur d'ordinateur censé appartenir à Hunter Biden, contenant des courrierélectroniques privés montrant une implication de Joe Biden dans les affaires de Hunter en Ukraine. 

La plupart des grands médias américains ont mis en doute la crédibilité de l'histoire et n'ont pas donné suite à cette affaire. Le Wall Street Journal, un journal pro-républicain qui a également eu accès au disque dur [16], n'a publié qu'un court article affirmant que les allégations contre Biden n'étaient pas fondées.

Mais sur la chaîne YouTube de Yuen, Giuliani  [17]a été félicité, le contenu du disque dur étant qualifié de « preuve ». L’Epoch Times a également publié un certain nombre de vidéos s’appuyant sur les courriers électroniques comme preuves tangibles de l'implication de Joe Biden dans les affaires de Hunter en Ukraine. 

« Le Père Yuen a déclaré que la majorité des médias aux États-Unis avaient supprimé les informations contenues dans le disque dur »rapporte Chan. D’après elle, près de la moitié des médias américains, y compris CNN, « ont été achetés par la Chine »Chan dit qu'elle n’écoute jamais les informations en langue anglaise. 

À quelques jours de l'élection présidentielle américaine, Yuen a cité Trump dans sa vidéo publiée sur YouTube et intitulée « La Chine possédera les États-Unis si Biden est élu.  [18]». En effetimmédiatement après le lancement de sa chaîneYuen a affirmé [19] que le président chinois Xi Jinping avait mis à la disposition du fils de Biden la somme de 1,5 milliard de dollars.

Chan déclare partager le point de vue de Yuen, lequel affirme que Trump « ne peut pas perdre ». Elle est heureuse que le père Yuen l'ait aidée à comprendre les questions géopolitiques et pense qu'il devrait être la tête de proue dans la « libération » de Hong Kong vis-à-vis de la Chine.