Hong Kong : un vaste coup de filet mène à l'arrestation d'une cinquantaine de politiciens pro-démocratie

L'image montre les visages des 57 personnes interpellées à Hong Kong. On distingue des hommes et des femmes de tous âges. Un bandeau rouge apparaît au bas de l'image avec des inscriptions en caractères chinois. Sur la droite du bandeau, on lit le logo de Stand News.

Plus de 50 personnes interpellées à Hong Kong. Photographie tirée du site Stand News, reproduite avec autorisation.

[Sauf mention contraire, tous les liens renvoient vers des pages en anglais, ndlt.]

Plus de 50 militants ont été arrêtés à Hong Kong le 6 janvier dernier, en vertu de la loi sur la sécurité nationale [fr] et ce, pour avoir participé l'année dernière aux primaires du camp pan-démocratique en vue des élections du Conseil législatif (LegCo) de 2020. Ce scrutin a finalement été reporté.

Les arrestations concernent notamment Benny Tai, responsable des primaires, Andrew Chiu, porte-parole de Power of Democracy (« Force de la démocratie », un organisme de coordination des primaires), et les anciens législateurs James To, Wu Chi-wai, Andrew Wan, Lam Cheuk-ting, Helena Wong, Au Nok-hin, Chu Hoi-dick, Alvin Yeung, Kwok Ka-Ki, Jeremy Tam et Gary Fan. Les candidats qui avaient pris part aux primaires ont également été appréhendés, à savoir Lester Shum, Clarisse Yeung, Tiffany Yuen, Ventus Lau, Gwyneth Ho, Fergus Leung, Owen Chow, Winnie Yu, Jeffrey Andrews, Sam Cheung et Ben Chung.

L'avocat John Clancey, qui occupait le poste de trésorier de Power for Democracy, a également été interpellé et le cabinet d'avocats auquel il était affilié a été perquisitionné par la police. Le domicile de Joshua Wong a également été perquisitionné puisque le militant, qui est actuellement en prison [fr], avait également pris part aux primaires.

Holmes Chan, journaliste indépendant, a partagé sur Twitter une liste de personnes interpellées :

Mise à jour 14h15 : voici la dernière liste. Aucune nouvelle arrestation n'a été signalée, cependant le statut de certains noms a été modifié pour indiquer [que leur arrestation était] « vérifiée ». J'ai également apporté des informations supplémentaires.
— Holmes Chan (@holmeschan_) January 6, 2021

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Document listant les noms, en anglais et en chinois, des personnes interpellées à Hong Kong. On peut lire aussi leur affiliation, profession, leur candidature aux primaires de 2020. Ces informations sont indiquées comme étant vérifiées, et leur source est également notifiée dans le document.

Par ailleurs, Robert Chung et Chung Kin-wah, respectivement directeur général et directeur général adjoint de l'Institut de recherche sur l'opinion publique de Hong Kong (Hong Kong Public Opinion Research Institute, PORI), lesquels avaient fourni la logistique nécessaire au déroulement des primaires, ont été convoqués par la police en vue de faciliter l'enquête. Un certain nombre de médias pro-démocratiques, notamment Apple Daily News, Stand News et inmediahk (plate-forme citoyenne de médias animée par un groupe de bénévoles à Hong Kong), ont reçu des injonctions du tribunal leur enjoignant de remettre aux autorités des documents relatifs aux enquêtes de police en cours.

La police hongkongaise a sommé les organes de presse indépendants, @StandNewsHK @inmediahk @appledaily_hk, de lui livrer des documents « relatifs à des affaires de sécurité nationale sous sept jours ». @RSF_inter dénonce ce harcèlement et insiste pour que la liberté de la presse soit pleinement restaurée sur le territoire.
— RSF in English (@RSF_en) January 6, 2021

Plus de 600 000 Hongkongais ont voté lors des primaires de juillet 2020 pour désigner les candidats qui se présenteraient à l'élection du LegCo en septembre. Le camp pro-démocratie avait pour objectif de remporter plus de 35 sièges afin que leurs représentants disposent d'un pouvoir de veto sur le budget du gouvernement.

Au terme des primaires, la cheffe de l'exécutif de Hong Kong, Carrie Lam, a déclaré [zh] que l'objectif des primaires étant d'entraver la mise en œuvre de la politique gouvernementale, cette action pouvait être assimilée à de la « subversion » au regard de la loi sur la sécurité nationale, alors nouvellement promulguée.

En outre, le bureau de liaison de Pékin dans la ville de Hong Kong, a publié une déclaration accusant Benny Tai de vouloir s'emparer du pouvoir du gouvernement. Carrie Lam a ensuite fait usage des dispositions d'urgence prévues dans le cadre de l'épidémie de COVID-19 pour repousser les élections.

John Lee, secrétaire à la sécurité de Hong Kong, a commenté ce vaste coup de filet en faisant écho aux déclarations précédentes de Carrie Lam et de Pékin. Citant le commentaire de Benny Tai, paru dans l’Apple Daily, sur les développements politiques de 2020 à 2022, John Lee a déclaré :

The people involved are suspected of making use of what they call a 35+ plan and a ten-step mutual destruction scheme to someway [sic] paralyse the Hong Kong government.

Les personnes mises en cause sont soupçonnées d'avoir fait usage de ce qu'elles appellent un plan 35+ [stratégie visant à obtenir une majorité lors des élections du Conseil législatif composé de 70 sièges, ndlt] et un programme de destruction mutuelle en dix étapes destiné à paralyser d'une manière ou d'une autre [sic] le gouvernement de Hong Kong.

En avril 2020, Benny Tai avait émis un pronostic selon lequel la loi sur la sécurité nationale ne serait pas appliquée avant la fin de l'année 2021, mais Pékin a fait adopter la loi 18 mois plus tôt afin de réprimer les forces démocratiques présentes à Hong Kong.

Au cours d’une conférence de presse, le président du Parti civique, Alan Leong, a précisé que les parlementaires avaient le droit constitutionnel de voter contre le budget. Le président du Parti démocratique, Lo Kin-hei, a également déclaré avoir la conviction que les arrestations constituaient des représailles contre les politiciens soutenus par le peuple.

Le camp pro-démocratie de Hong Kong affirme que les autorités se vengent clairement des politiciens soutenus par le peuple, et se demande pourquoi la police a mis tant de mois à réagir lors de leurs primaires du Legco, si ces dernières représentaient un crime aussi grave.
— RTHK English News (@rthk_enews) January 6, 2021

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Plan moyen d'Alan Leong, président du Parti civique.

Maya Wang, spécialiste des questions relatives à la Chine au sein de l'organisation de défense des droits humains Human Rights Watch, a commenté :

Hong Kong a déjà atteint un point de non retour avec l'arrestation d'un avocat et la perquisition de son cabinet. L'année 2021 promet d'être longue.
— Maya Wang 王松莲 (@wang_maya) January 6, 2021

De nombreuses personnes, parmi lesquelles on compte l'artiste militant Baidiucao, ont critiqué l'Union européenne pour avoir signé un accord d'investissement avec la Chine au mépris de la répression politique appliquée par Pékin à Hong Kong :

Sans les garanties récemment offertes aux autorités de Pékin par l'Union européenne, il n'y aurait pas eu d'arrestation massive à l'encontre de plus de 50 personnes prônant la démocratie, aujourd'hui à Hong Kong.
— 巴丢草 Badiucao (@badiucao) January 6, 2021

Nathan Law, militant en exil, a formulé cet appel au Parlement européen :

En réaction à la répression politique de Hong Kong, je prie avec insistance le Parlement européen de suspendre l'accord d'investissement UE-Chine et je demande à l'Union Européenne de sanctionner les fonctionnaires de Chine et de Hong Kong responsables de ces arrestations. Retweeter si vous êtes d'accord pour que les députés européens appliquent un VETO et que l'UE agisse. Soutenez Hong Kong.
— Nathan Law 羅冠聰 ? (@nathanlawkc) January 6, 2021

Antony Blinken, qui est pressenti pour le poste de secrétaire d'État par le président américain élu Joe Biden, s'est hâté de garantir au peuple hongkongais le soutien de l'administration Biden-Harris :

La vague d'arrestations des manifestants pro-démocratie constitue une agression contre ceux qui militent courageusement en faveur des droits universels. L'administration Biden-Harris se rangera du côté du peuple de Hong Kong et contre la répression de la démocratie par Pékin.
— Antony Blinken (@ABlinken) January 6, 2021

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L'image montre un policier armé jusqu'aux dents, plan en légère contre plongée. Il se protège avec un bouclier sur lequel on lit l'inscription « police » ainsi que des caractères en chinois. Il semble se trouver dans un centre commercial et est entouré d'autres policiers. On aperçoit de nombreuses personnes aux étages, observant la scène. Toutes les personnes portent un masque de protection faciale.

Enfin, l'investisseur militant David Webb a fait un parallèle entre la répression de la démocratie et la pandémie :

Je n'aurais jamais imaginé voir le jour à Hong Kong où il y aurait plus de citoyens pan-démocrates arrêtés qu'il n'y a de cas de COVID-19. Après tout, l'objectif du gouvernement est de parvenir à zéro cas. Le drame est que la majorité de la population a déjà été contaminée et qu'il n'y a pas de vaccin permettant de sauver la démocratie.
— Webb-site (@webbhk) January 6, 2021

À Hong Kong, au 6 janvier 2021, le nombre de cas de COVID-19 nouvellement confirmés s'élevait à 20.

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