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En Malaisie, l'organisme de régulation d'internet désactive son compte Twitter suite à la révélation de tweets offensants

Catégories: Asie de l'Est, Malaisie, Gouvernance, Médias citoyens, Politique
Façade en pierre montrant le logo de la MCMC, un triangle découpé en trois parties, ainsi que le nom de l'organisme en malais et en anglais. [1]

La Commission malaisienne des communications et du multimédia (MCMC). Photo tirée de Facebook.

[Sauf mention contraire, tous les liens de cet article renvoient vers des pages web en anglais, ndlt.]

La Commission malaisienne des communications et du multimédia (MCMC) faisait partie des sujets tendance sur Twitter [2] le 12 janvier. En effet, des internautes ont exhumé des tweets à caractère misogyne et raciste publiés par le compte officiel de la MCMC [3] en 2014. La Commission a ensuite publié une déclaration dans laquelle elle nie leur authenticité, avant de désactiver son compte Twitter.

Après que le gouvernement malaisien ait déclaré l’état d’urgence en réponse à l’augmentation du nombre des cas de COVID-19, la MCMC a recommandé aux internautes, et en particulier à ceux qui étaient opposés à la nouvelle directive, de rester polis dans leurs commentaires sur les réseaux sociaux. Elle a prévenu que la publication de propos diffamatoires qui touchent «à la race, à la famille royale et à la religion» entraînerait des sanctions [4] [ms]. Elle a également incité les citoyens à signaler les internautes qui publient des remarques désobligeantes.

Or, quelques heures plus tard, le hashtag #MCMC est devenu une tendance Twitter suite à des captures d’écran de tweets datant de 2014, émis par l'organisme, qui ont fait surface sur la Toile. Ces tweets révèlent des insultes et des grossièretés à l’encontre des femmes et des minorités raciales. La MCMC a rapidement fermé son compte, puis a publié une déclaration selon laquelle des hackers seraient à l’origine des tweets en question, et a fini par désactiver le compte.

Certains sont sceptiques quant à l’affirmation que le compte aurait été piraté. Alexander Wong a écrit sur SoyaCincau.com  [5]:

Looking at the timestamps, the offending tweets are actually old. If it was indeed hacked, it looks like the perpetrators have the ability to turn back time. From what we know, it isn’t possible to backdate tweets but you are able to schedule future tweets.

D’après leur horodatage, les tweets offensants ne sont effectivement pas récents. S’il s’agit réellement d’un piratage, l’auteur aurait alors le pouvoir de remonter le temps. A notre connaissance, il est impossible d’antidater des tweets. On peut, par contre, les programmer pour une date à venir.

Malay Mail a également signalé que le compte de la MCMC aurait appartenu à un adolescent [6] jusqu’en 2015, date à laquelle il l’aurait vendu pour la somme de RM 1 300 (320 dollars américains).

C’est trop hilarant. Le compte Twitter de l'organisme malaisien de régulation d'Internet est un rebranding du compte personnel de l’utilisateur @Nazrulllhakim (peut-être acheté pour récupérer ses followers? Comment? Pour quelle raison? Où est passé l’argent?) mais mieux encore, ils n’ont même pas pris la peine de supprimer les anciens tweets du compte.

La lumière n'a pas encore été faite sur les raisons qui ont poussé cet adolescent à créer un identifiant Twitter qui a par la suite été utilisé en tant que compte officiel d’un organisme gouvernemental, ni sur la façon dont cela s'est produit. On ignore toujours comment la «vente» d’un compte Twitter a pu avoir lieu étant donné que cela va à l'encontre des conditions générales d'utilisation de la plateforme.

L’utilisateur Twitter @NazruiHakim [9], qui affirme être le propriétaire initial du compte de la MCMC, s’est excusé pour ses tweets offensants  [10]:

I apologize for the things I said in the past. The tweets were old and I don’t even remember what happened. It was 7 years ago. It’s my fault the tweets were there. I apologize to everyone involved.

Je m'excuse pour les choses que j'ai dites par le passé. Les tweets datent d’il y a longtemps et je ne me souviens même pas de ce qui s’est passé. Cela fait 7 ans. C'est ma faute si les tweets existent. Je m'excuse auprès de toutes les personnes concernées.

Il a ajouté qu’il ne s’attendait pas à ce que le compte tombe entre les mains d’un organisme gouvernemental.

Dans son article pour le site web Juice, Ameera Rosli a souligné la responsabilité qui incombe à la MCMC [11] :

The glaring element of this story is MCMC’s lack of awareness as an internet regulator.

It’s baffling how MCMC, a government body that is in charge of monitoring our use of the internet, allegedly forgot to scrub private data and information from the account they obtained.

Le plus flagrant dans cette histoire, c’est le manque de conscience dont a fait preuve la MCMC en tant que régulateur d'internet.

C’est incompréhensible que la MCMC, un organisme gouvernemental chargé de contrôler l’usage d'internet, ait prétendument oublié de supprimer les données et les informations privées du compte qu’ils ont acquis.

L’échange de compte auquel s'est livrée la MCMC est une violation des conditions générales d'utilisation de Twitter, un élément qui n'aurait pas dû échapper à leur attention.

Ce qui s'est passé avec le fiasco de la MCMC, qui a acheté un compte à des gens sans effacer les anciens tweets, pue l'incompétence. C’est choquant qu'ils aient enfreint les conditions d'utilisation de Twitter en se procurant le compte d'une personne qui n'avait aucune honte de son racisme, de sa misogynie, de ses attaques anti-calvitie.

La MCMC a accusé des hackers [13] d’être à l’origine des tweets offensants.

People are advised not to be influenced with such suspicious, vile and defamatory messages that have been uploaded through the account.

Il est conseillé de ne pas se laisser influencer par de tels propos soupçonneux, odieux et diffamatoires publiés par l'intermédiaire de ce compte.

La MCMC s’est engagée à enquêter [14] sur l'affaire qui a mené à la décision de désactiver le compte. Le ministre de la Communication et du Multimédia, Datuk Saifuddin Abdullah, dont le portefeuille comprend la supervision de la MCMC, a déclaré dans un communiqué de presse  [15]:

I view seriously the viral issue of indecent old tweets which originated from 2014 that linked to MCMC's official Twitter account.

Je prends très au sérieux le débat viral relatif aux tweets scandaleux datant de 2014 et impliquant le compte officiel de la MCMC.