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Turquie : violence policière au pique-nique de la Semaine des fiertés

Catégories: Afrique du Nord et Moyen-Orient, Turquie, LGBTQI+, Manifestations, Médias citoyens, Politique, Pride 2021: Growing visibility, increasing attacks
Hommes en salopettes blanches et un masque blanc défilent jouant du tambour et de la trompette.

Capture d'écran d'une vidéo prise lors de la Marche des fiertés dans la ville turque d'Izmir en 2014.  La vidéo est disponible sur YouTube [1].

La police turque a violemment dispersé un groupe de personnes qui célébraient la Semaine des fiertés LGBTI+ au parc Maçka, l'un des derniers espaces verts de la ville, dans le quartier de Şişli, le 22 juin. La police serait intervenue [2] après la publication d'une déclaration du bureau du gouverneur de Şişli interdisant ce pique-nique, au motif qu'il pourrait entraîner des « troubles à l'ordre public ».

Le comité de la Semaine des fiertés d’Istanbul a tweeté qu’une personne avait été détenue et plusieurs passées à tabac par la police.

Aujourd’hui, la police a attaqué notre pique-nique végan à Maçka. Un·e de nos ami·es a été arreté·e, et nombreux·ses sont ceux et celles qui ont été tabassé·es. On ne nous fera pas taire, nous n'avons pas peur, nous n'obéirons pas !

Le romancier turco-britannique primé Elif Şafak a également partagé ces images dans le tweet ci-dessous :

Partager un morceau de pain, fredonner une chanson, une pincée d'amitié et de solidarité, savoir que l'on n'est pas seul dans ce monde… mais ce système est hostile à la beauté. Vous, la police, qui traitez si gentiment les assassins des femmes, vous attendiez quoi de ces jeunes innocents qui pique-niquaient tout tranquillement ?

Selon la plateforme d'information en ligne Gazete Duvar, le pique-nique était initialement prévu à Heybeliada (l'une des îles des Princes, au large d'Istanbul), mais la direction de la police de ces îles l'avait par la suite interdit.

L'intervention de la police a été dénoncée sous le hashtag #PiknikYasaklanamaz [Un pique-nique ne peut pas être interdit].

Journalistes, activistes et autres membres du public ont inondé Twitter d'images et de vidéos de cette opération de police. Un fil de discussion détaillé a été partagé par la plateforme de journalisme citoyen Dokuz8Haber :

La foule qui a organisé le pique-nique de la Semaine des fiertés au parc Maçka s'est retrouvée coincée par la police.

Un membre de la communauté LGBTI+ de l'université Boğaziçi a eu un bras cassé.

Notre ami a eu un bras cassé. Les coupables sont connus.

De même, la branche d'Istanbul de l'Association des avocats progressistes (ÇHD) a signalé que plusieurs de ses membres avaient été agressé·es :

Invoquant la décision d’interdiction illégale du Bureau du gouverneur d’Istanbul, la police a attaqué le pique-nique des fiertés dans le parc Maçka accompagnée de chiens. 1 personne a été détenue, beaucoup de nos collègues LGBTI+ ont été battu·es et torturé·es. On attend toujours au parc Maçka. C'est un crime de haine de la part de la police !

Le bureau du gouverneur de Şişli a aussi informé le comité d’organisation de la Semaine des fiertés d’Istanbul que toutes les activités prévues pour cette semaine étaient interdites pour les 30 prochains jours, selon le journal local [14] [tr] Evrensel.

Ce n’est pas la première fois que des activités célébrant la Semaine des fiertés sont interdites pour des raisons de sécurité publique et de trouble à l’ordre public. En 2015, la police turque a lancé des gaz lacrymogènes et utilisé des canons à eau [15] contre les participant·es à la Marche des fiertés. En 2016, la marche avait été interdite [16] à Istanbul, soi-disant pour « protéger la sécurité et l’ordre public ». En 2017, dans la capitale, Ankara, le gouvernement, invoquant les pouvoirs « d’état d’urgence » qu’il s’était octroyé après le coup d’État militaire de 2016, avait imposé [17] une interdiction générale pour une durée indéterminée sur toutes activités concernant la Semaine des fiertés. Cette même année, la Marche des fiertés à Istanbul avait été interdite [16] pour des raisons de sécurité. L’évènement était encore une fois prohibé en 2018, toujours pour des motifs de sécurité, bien que de nombreuses personnes aient défié [18] l’interdiction et défilé dans la ville avant que les  forces de l'ordre ne débarquent [19] avec des gaz lacrymogènes et des canons à eau. En 2019, la police est intervenue alors que la foule célébrait la 17ᵉ Marche des fiertés. L’année dernière, la marche avait été annulée à cause des restrictions liées à la pandémie de COVID-19.

La dernière marche autorisée [20] par les autorités s’est déroulée en 2014.