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Appels à libérer Zhang Zhan, journaliste citoyenne emprisonnée en Chine

Catégories: Asie de l'Est, Chine, Etats-Unis, Droit, Droits humains, Liberté d'expression, Médias citoyens, Portrait de blogueur, Advox

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Copie d'écran de la chaîne YouTube de Zhang Zhan [1] [zh].

[Sauf mention contraire, tous les liens renvoient vers des pages web en anglais.]

Depuis plusieurs mois, les groupes internationaux de défense des droits humains exhortent la Chine à relâcher Zhang Zhan, journaliste citoyenne incarcérée. Le gouvernement américain est venu se joindre à cet appel [2] le 9 novembre alors que son état de santé se dégradait et que la journaliste pourrait ne pas survivre à un hiver en prison.  

Au mois de février 2020, cette journaliste citoyenne âgée de 38 ans a mis en ligne plus d'une centaine de séquences vidéo [3] [zh] réalisés à Wuhan, en Chine, pendant les premières semaines de l'épidémie de COVID-19. Elle a été arrêtée en mai 2020 [4].

Dès le début de la pandémie, la ville de Wuhan a été placée en quarantaine pendant plus de trois mois. Seuls les médias affiliés à l'État pouvaient rendre compte de la politique gouvernementale quant à la pandémie, avec pour conséquence une couverture assez unilatérale qui saluait unanimement les efforts des autorités. Les reportages des journalistes citoyens constituaient donc un moyen essentiel permettant au grand public de comprendre ce qui se passait réellement dans la ville. Au moins trois d'entre eux, dont Chen Qiushi [5] [fr] et Fang Bin, ont été interpellés [6] pour leur activité, mais à ce jour, seule Zhang Zhan a fait l'objet d'un procès et d'une condamnation.

Zhang Zhan a entamé une grève de la faim intermittente depuis près de 18 mois afin de dénoncer son incarcération. En décembre 2020, un tribunal de Shanghai l'a condamnée à quatre ans de prison au motif qu'elle aurait « provoqué des querelles et des troubles », accusation courante à l'encontre des manifestants et des dissidents politiques en Chine. Dans le dossier de l'accusation, le « trouble » concernait la diffusion de fausses informations ainsi que [7] [zh] des interviews accordées aux médias étrangers.

Selon Amnesty International, la journaliste a été torturée [8] durant plus de trois mois en représailles pour sa grève de la faim, puis a été alimentée de force par une sonde avant le début de son procès. Elle a été conduite au tribunal en fauteuil roulant, le 28 décembre 2020 [9] [zh].

Selon son avocat, Zhang Zhan a refusé de faire appel [10] de la décision du tribunal, n'ayant aucune confiance dans le système judiciaire chinois. Elle a préféré entamer une grève de la faim par intermittence afin de clamer son innocence. En août 2021, elle était hospitalisée pendant 11 jours [11] en raison d'une malnutrition sévère. Le 30 octobre, son frère Zhang Ju a rompu le silence et a écrit sur Twitter que sa sœur ne passerait pas l'hiver si elle était maintenue en prison :

Zhang Zhan mesure 1 mètre 77, aujourd'hui elle pèse moins de 40 kg. Elle risque de ne pas supporter le froid de l'hiver qui approche. J'espère que le monde se souviendra d'elle telle qu'elle était auparavant.
— Ju Zhang (@Jeffreychang81) 30 octobre 2021

En dépit du fait que les autorités chinoises lui ont déconseillé [11] de parler à la presse, la famille a tout de même tenu les médias informés de son état. Ainsi, la mère de Zhang Zhan a confié [14] à un journaliste de Radio Free Asia :

She can't walk unassisted now, and her head keeps drooping as she speaks. She will be in huge danger if they don't release her on medical parole. I cried for several hours straight after I got out [of a call with her].

Aujourd'hui, elle est incapable de marcher sans assistance et sa tête se maintient difficilement lorsqu'elle prend la parole. Elle risque de se retrouver dans une situation très préoccupante si elle ne bénéficie pas d'une libération conditionnelle pour raisons médicales. J'ai pleuré pendant plusieurs heures d'affilée après lui avoir parlé [au téléphone].

À l'heure actuelle, la famille de Zhang Zhan demande une libération conditionnelle pour raisons médicales [15]. Pourtant, lorsque l'avocat Xie Yang a voulu se rendre [16] [zh] à Shanghai pour offrir son assistance juridique à la famille le 6 novembre, son code de santé est brusquement passé au rouge, et il lui a été interdit alors de prendre un vol intérieur. Le système de code sanitaire à trois couleurs s'inscrit dans un dispositif visant à contenir la propagation du COVID-19 en restreignant les déplacements individuels sur la base de l'état de santé de la personne et de ses contacts. Certains dissidents ont indiqué [17] [zh] que les autorités avaient détourné ce système à des fins de contrôle politique.

De fait, depuis décembre dernier, plusieurs organisations internationales ont appelé à la libération de Zhang Zhan. Amnesty International a récemment lancé une pétition en ligne [18] et, dans le communiqué de presse publié par le groupe en novembre, Gwen Lee, chargée de campagne, a souligné [8] que son incarcération allait à l'encontre des garanties internationales en matière de droits humains.

Zhang Zhan is a victim of the Chinese government’s zero-tolerance approach to criticism and opposing views. She has been imprisoned solely for peacefully exercising her right to freedom of expression, and she must be immediately and unconditionally released

Zhang Zhan est victime de la politique de tolérance zéro du gouvernement chinois à l'égard des critiques et des opinions dissidentes. Elle a été jetée en prison pour avoir simplement exercé pacifiquement son droit à la liberté d'expression. Elle doit être immédiatement libérée sans condition.

Human Rights Watch (HRW) suit également avec attention son cas. Après que son frère a fait part de ses inquiétudes au sujet de la santé de Zhang Zhan, HRW a mis en lumière [11] les conditions de vie inhumaines et le taux de mortalité élevé dans de nombreuses prisons chinoises :

Conditions in China’s detention facilities and prisons are poor, usually with minimal nutrition and rudimentary health care. In recent years, a number of prominent dissidents in China have become seriously ill in detention, been denied adequate care, and died either in detention or shortly after being released.

Les conditions de vie dans les centres de détention et les prisons chinoises sont déplorables, avec une alimentation minimale et des soins de santé rudimentaires. Au cours des dernières années, de nombreux dissidents chinois de premier plan sont tombés gravement malades, ont été privés de soins adéquats et sont morts en détention ou peu après leur libération.

Parmi les militants disparus, cités dans la déclaration de Human Rights Watch, figurent le militant tibétain Kunchok Jinpa [19], Ji Sizun [20], militant originaire du Fujian, l'islamologue Muhammed Salih Hajim [21], le lauréat du prix Nobel de la paix Liu Xiaobo [22], le vénéré lama tibétain Tenzin Delek Rinpoche [23] ainsi que la militante des droits humains Cao Shunli [24].

Dans un communiqué publié début novembre, Reporters sans frontières a demandé [25] une action internationale coordonnée pour exiger la libération de Zhang Zhan :

We call on the international community to apply pressure to the Chinese regime and secure Zhang Zhan’s immediate release before it is too late. She was only performing her duty as a reporter and should never have been detained, not to mention receive a four-year prison sentence.

Nous appelons la communauté internationale à faire pression sur le gouvernement chinois pour obtenir la libération immédiate de Zhang Zhan avant qu'il ne soit trop tard. Elle ne faisait que son devoir de journaliste et sa détention n'aurait jamais dû avoir lieu, encore moins sa condamnation à une peine de quatre ans de prison.