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Les autorités biélorusses bloquent l'accès aux médias indépendants jugés extrémistes

Catégories: Europe Centrale et de l'Est, Biélorussie, Censure, Élections, Liberté d'expression, Manifestations, Média et journalisme, Médias citoyens, Politique, Advox, Le Bélarus dans la tourmente
access denied blocked websites belarus [1]

Image : accès refusé par Creative Stall [2] issu de The Noun Project. CC-BY 3.0.

[Sauf mention contraire, tous les liens renvoient vers des articles en anglais, ndlt.]

Au cours de l'année dernière, les médias locaux indépendants en Biélorussie ont subi une pression considérable suite aux troubles persistants [3] qui ont eu lieu après l’élection présidentielle contestée. Qualifié·es d'« extrémistes », plusieurs de leurs journalistes ont été placé·es en détention [4] et arrêté·es [5] [fr], leurs sites web ainsi que leurs réseaux sociaux ont été bloqués [6] et leur matériel confisqué. Désormais, les médias étrangers indépendants couvrant la Biélorussie sont ciblés par les autorités du pays, de même que le public qui les suit.

Le 28 octobre, le ministère biélorusse de l’Information a bloqué l’accès [7] au site de Deutsche Welle, une chaîne internationale financée par l’État allemand, ainsi que de Current Time, un réseau russe géré par RFE/RL et financé par le gouvernement américain en coopération avec Voice of America. En compagnie du site journalistique biélorusse Novy Chas, tous auraient été bloqués pour avoir diffusé [8] des informations contenant des liens considérés par les tribunaux biélorusses comme « extrémistes ». Le premier vice-ministre de l’Information, Andrey Kuncevic, a déclaré [9] à l’agence de presse d’état BelTa que le gouvernement « a l’intention de continuer à prendre des décisions visant à protéger l’espace d’information du pays ».

Le directeur général de Deutsche Welle, Peter Limbourg, a qualifié [7] ce blocage de « totalement ridicule », tandis que le président de RFE/RL, Jamie Fly, a également condamné la décision de bloquer Current Time.

Le 29 octobre, le gouvernement biélorusse a qualifié d'extrémistes trois des chaînes d’opposition les plus populaires sur Telegram dirigées par une initiative populaire opérant en Pologne, NEXTA, qui a répondu [10]par un tweet enjoué, saluant ses lecteurs et lectrices avec le message suivant : « Bonjour, extrémistes ».

1,4 million d’extrémistes de plus sont apparu·es aujourd’hui en Biélorussie.

Le ministère de l’Intérieur a jugé les chaînes NEXTA, NEXTA Live et LUXTA comme des « formations extrémistes ». Cela signifie que des poursuites pénales peuvent être engagées envers des créateurs, créatrices, administrateurs, administratrices et contre les abonné·es en #Biélorussie [11]. pic.twitter.com/nVLdlXPvID [12]

— NEXTA (@nexta_tv) le 29 octobre 2021 [13]

Le 3 novembre, le ministère de l’Intérieur a annoncé [14] [ru] que la chaîne indépendante polonaise BielsatTV, ses employé·es et ses téléspectateurs et téléspectatrices « uni·es grâce aux ressources en ligne de Bielsat », ont été reconnu·es comme extrémistes et qu'il leur « est interdit de poursuivre leurs activités dans la république du Bélarus ». Cette description imprécise fait probablement référence aux abonné·es de Bielsat sur les médias sociaux ou aux lecteurs et lectrices de son site internet, et laisse entendre que ces personnes pourraient être poursuivies [15] pour avoir partagé leur contenu. Le site de Bielsat avait déjà été qualifié d'extrémiste vers la fin juillet 2021.

Le conseiller principal du leader de l’opposition Sviatlana Tsikhanouskaya, Franak Viačorka, a déclaré [16] que ces mesures sévères témoignent de la notoriété et du succès de la chaîne en Biélorussie.

Pour la première fois dans l’histoire, le régime a qualifié toute la chaîne télévisée Bielsat TV de groupe extrémiste. Ladite étiquette s'applique à la fois aux téléspectateurs, téléspectatrices et journalistes. 940 000 personnes au total. D’un côté, c’est un outil menaçant, de l’autre c’est la preuve du succès de la chaîne. pic.twitter.com/Y1SDjNSLoJ [18]

— Franak Viačorka (@franakviacorka) le 3 novembre 2021 [19]

Les journalistes biélorusses ont déjà été sanctionné·es pour leurs leins avec des médias qualifiés d’extrémistes. Le 1er novembre, les tribunaux biélorusses ont reconnu coupables [20]deux journalistes, Iryna Slaunikava et Syarhei Niarouny. Le couple avait été accusé d’avoir propagé l’extrémisme lors de prétendues interactions avec les pages Facebook de Bielsat et de Tut. Selon l’Association des journalistes biélorusses (BAJ), également interdite dans le pays, Slaunikava a été condamnée [21] à 15 jours de prison, tandis que Niarouny a dû payer [22] une amende de 580 roubles biélorusses (environ 210 €).

La coordinatrice du programme Europe-Asie centrale du Comité pour la protection des journalistes, Gulnoza Said, a déclaré [23] que, par ces nouvelles mesures répressives, les autorités biélorusses « ont touché le fond, même en tenant compte de leur longue campagne contre la presse indépendante ». Le CPJ les a appelées [23] à « mettre fin à cette censure médiatique » et à cesser de sanctionner les citoyens, citoyennes et journalistes qui interagissent avec leur contenu informatif.