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Mongolie : une sensibilisation à la pollution nécessaire pour éviter de plus grands dommages

Catégories: Asie Centrale et Caucase, Mongolie, Economie et entreprises, Environnement, Médias citoyens

Vue d'un coucher de soleil sur le désert de Gobi, Mongolie. Image de Khaliun Ganbaatar, avec la permission de The Nature Conservacy. Utilisation autorisée.

Avec une superficie de 1,5 million de kilomètres carrés, la Mongolie occupe la 18e place [1] sur la liste des plus grands pays du monde. Son vaste territoire renferme des forêts boréales vierges, des écosystèmes montagneux et plusieurs types d'étendues d'herbes sauvages, aussi connues sous le nom de steppes. Avec une démographie de 3,3 millions d'habitants [2], la Mongolie est aussi l'un des pays les moins peuplés du monde ; ce qui en fait un excellent choix pour la préservation de la biodiversité.

Cependant, au cours des trente dernières années, l'environnement de la Mongolie a été confronté à de multiples menaces, dont l'exploitation minière [3] et le développement des infrastructures, le surpâturage [4], l'exploitation des énergies fossiles [5], la désertification [6] et le changement climatique [7], qui se manifeste par des augmentations sans précédent de la température de l'air et par des fluctuations anormales dans les schémas de précipitations.

Le changement climatique entraîne des conséquences sur les réserves fourragères [8], la composition des plantes et la diversité des pâturages [9]. De même, il engendre un nombre toujours plus élevé de catastrophes naturelles, comme des sécheresses et des dzuds [10], ces hivers caractérisés par des conditions climatiques très difficiles, qui causent la mort en masse du bétail, ce dernier se retrouvant incapable de survivre face à la famine ou aux températures négatives extrêmes.

À ce contexte s'ajoute une nouvelle source de pollution : les activités quotidiennes des habitants et leur approche de l'environnement.

Lit d'une rivière jonché de bouteilles en verre et en plastique. Photo d'Amedeo Bastiano. Utilisation autorisée.

Par exemple, il n'est pas rare de trouver en été des bouteilles de vodka vides dans le lit asséché des rivières. Sur les collines, on rencontre des autels constitués d'emballages plastiques et de canettes à côté des véritables autels érigés pour prier le dieu Tenger [11], un personnage central dans les croyances chamaniques mongoles. En dehors des villages, au milieu de la steppe, on peut tomber sur des décharges à ciel ouvert.  À seulement quelques kilomètres de leurs maisons, les habitants amassent les déchets qu'ils produisent pendant l'hiver et les brûlent. Aux alentours, il est ensuite possible d'apercevoir des résidus de plastique déformés pendant de nombreux mois.

Selon une experte locale, la cause à l'origine de cette pollution est le manque de sensibilisation de la population mongole à l'environnement. Batsuren S. est une ingénieure en environnement de 37 ans qui a obtenu son diplôme dans l'une des meilleures universités de Mongolie. Elle a suivi des études spécialisées dans un célèbre établissement d'Asie du Sud, dans lequel elle travaille désormais en tant que chercheuse. Elle a demandé à ce que son nom de famille et son nom de jeune fille restent confidentiels. Elle explique que :

En Mongolie, les habitants ne se rendent pas compte que leurs actions ont des conséquences. S'ils laissent une bouteille dans une prairie, celle-ci pourrait finir dans une rivière ou être mangée par un yak, qui en mourrait. Mais les gens ne sont pas éduqués pour penser de cette manière. Ils disent simplement « j'ai envie de boire une bière », ou de la vodka, ou de l'eau, puis ils boivent et laissent la bouteille dans l'herbe.

Le peuple mongol est un jeune peuple [12], ce qui signifie qu'il n'est pas complètement conscient de son impact sur le plan social et qu'il ne comprend pas véritablement à quel point la nature est vulnérable, affirme Batsuren S. en mettant en relation le problème avec le changement récent de mode de vie :

 Il y a seulement quelques dizaines d'années, les gens d'ici étaient presque exclusivement nomades. Ce n'est que récemment qu'ils ont commencé à se rassembler dans des villes et, même aujourd'hui, environ la moitié de la population suit toujours le mode de vie traditionnel nomade. Dans le passé, les déchets des nomades pouvaient être abandonnés dans la nature sans trop de risque. Il s'agissait de carcasses d'animaux, de fourrures, de bois, et de tissu naturel utilisé pour les vêtements. Après quelques semaines, les agents environnementaux se chargeaient de les dégrader et ils retournaient à leur état d'origine, sans que le sol n'ait subi aucun dommage.

De nos jours, les déchets ont changé de nature et se sont transformés en verre, en plastique, en métal, en essence et en produits chimiques. Cependant, pour ceux qui ne connaissent pas leur danger, il n'est pas simple d'appréhender les conséquences qu'engendre leur abandon dans la nature.

Selon Gala Davaa, directeur de l'ONG The Nature Conservancy [13], la plupart des personnes sont, dans une certaine mesure, conscientes du changement climatique. C'est particulièrement le cas de la jeune génération. Comme il l'explique :

Une partie de la nouvelle classe dominante en Mongolie exprime une inquiétude particulière à ce sujet. Les communautés d'éleveurs se rendent également compte que des changements sont en train de s'opérer. Ils observent la nature chaque jour et constatent qu'elle ne se comporte plus de la même manière qu'avant. De nombreuses informations circulent sur Internet. Cependant, les institutions ne communiquent pas systématiquement avec la population et, alors que les habitants reconnaissent l'importance de protéger la nature, ils n'ont encore qu'une connaissance limitée des moyens pour le faire.

Il ajoute qu'en 1998, le gouvernement mongol avait approuvé un Programme public d'éducation à l'écologie [14], qui devait être mis en oeuvre entre 1998 et 2005. Néanmoins,  personne n'avait préparé de plan pour le traduire en actions concrètes qui permettraient d'atteindre des objectifs à long terme. En conséquence, les résultats positifs, mais inégaux obtenus à l'origine s'estompent aujourd'hui peu à peu.

Selon Gala Davaa :

Entre 2019 et 2020, le gouvernent a désigné 32 nouvelles zones protégées, soit un total de 4,9 millions d'hectares. Il s'est également engagé [15] à mettre sous protection nationale 30% du territoire du pays. Il est déjà parvenu à en protéger [16] 21%, ce qui équivaut à presque 33 millions d'hectares. À cela s'ajoutent 31 millions d'hectares supplémentaires désormais désignés [17] comme zones localement protégées. Prendre l'ensemble de ces mesures a demandé un effort considérable. Pourtant, à cause de l'absence d'un programme institutionnel pour diffuser les informations, de nombreuses personnes restent ignorantes, même parmi la communauté scientifique. Il manque au pays une approche de la préservation de la nature basée sur la science et la population tend à trop simplifier les questions relatives à l'environnement.

Pour Batsuren S. comme pour Gala Davaa, il n'y a qu'un seul moyen d'améliorer la situation : changer la mentalité des habitants. Pour ce faire, les institutions et le gouvernement doivent s'engager à suivre une politique visant à dispenser une meilleure éducation environnementale.

Pour conclure, Batsuren S. déclare qu’ « ils [le gouvernement] doivent continuer à lancer des campagnes d'information massives, à sensibiliser plus uniformément et systématiquement la population et à pousser cette dernière à prêter plus d'attention à l'environnement. »