Selon des militants des jeunes, une politique nutritionnelle adéquate est essentielle pour l'avenir de la Jamaïque

Des écoliers en Jamaïque. Photo de Jake Brewer sur Flickr, CC BY-NC-ND 2.0.

Après deux ans de fermeture, les écoles de Jamaïque ont pu rouvrir en présentiel le 7 mars dernier. Vu les problèmes auxquels les familles ont été confrontées depuis le début de la pandémie de COVID-19, cette décision fut la bienvenue. Mais les difficultés d'apprentissage ne sont pas le seul défi à relever — la nutrition est également un enjeu majeur.

Jamaica Youth Advocacy Network (JYAN), une ONG qui défend les droits des enfants et des jeunes en Jamaïque, s'est attaquée à cette préoccupation de longue date, primordiale pour la santé future des Jamaïcains. La faim est une réalité et pour de nombreux enfants, le repas qu'ils reçoivent à l'école est souvent le seul de la journée.

L'ONG a lancé une pétition sur Internet demandant au ministère de l'Éducation de finaliser et de mettre en oeuvre le plus rapidement possible sa politique nationale en matière de nutrition et de bien-être à l'école. Cette politique vise à contrôler l'offre alimentaire dans les établissements scolaires, notamment par le biais du Programme national d'Alimentation scolaire et du Programme d'Avancement par la Santé et l'Éducation (PATH), un programme de transfert conditionnel en espèces permettant d'octroyer des aides financières aux foyers les plus démunis :

Whether our children are purchasing food at school, or are provided with lunch via subsidies, they deserve healthy, nutritious meals that will encourage positive food habits.

Que nos enfants achètent de la nourriture à l'école ou qu'ils reçoivent leurs repas grâce à des subventions, ils méritent des plats sains et nutritifs qui encouragent de bonnes habitudes alimentaires.

Dans cette optique, JYAN a présenté une liste de recommandations parmi lesquelles : l'interdiction de franchises de restauration rapide dans les écoles, la création des jardins potagers scolaires, l'encouragement des enfants à adopter un mode de vie sain et à pratiquer une activité physique. Mais l'ONG est surtout préoccupée par le fait que le gouvernement jamaïcain prévoit de céder Nutrition Products Limited, l'entreprise publique qui prépare et distribue les repas scolaires :

The National School Feeding Programme, run by the Government of Jamaica through Nutrition Products Limited (NPL), is undoubtedly one of the fondest school meal traditions that many Jamaicans have. The programme is also partly responsible for the fact that child malnutrition did not increase during the 1970s, in an environment of general economic decline.
[The government's divestment of] the manufacturing and distribution aspects of NPL, signal[s] the end of a state run and funded school feeding programme. In an environment where 70% of Jamaicans do not have resources or access to safe and nutritious food, and recognizing the importance of the school feeding tradition in encouraging attendance and boosting performance, especially among the nation’s most disenfranchised, what will our future look like? What will be provided as food options for students? How will we guarantee that healthy products will be provided? Will students now have to pay for the food provided under this programme? How much will they be required to pay?

Le Programme national d'Alimentation scolaire géré par le gouvernement jamaïcain par l'intermédiaire de l'entreprise Nutrition Products Limited (NPL) est très apprécié par de nombreux Jamaïcains. C'est en partie grâce à ce programme que la malnutrition infantile n'a pas augmenté au cours des années 70 dans un contexte de déclin économique.
La volonté du gouvernement de céder les activités de préparation et de distribution de NPL marque la fin d'un programme d'alimentation scolaire géré par l'État. Alors que 70 % des Jamaïcains n'ont pas accès à une alimentation saine et nutritive, et si l'on considère le fait que l'alimentation scolaire permet d'améliorer la présence des élèves et leur apprentissage, en particulier parmi les plus démunis, à quoi ressemblera notre avenir ? Quelle offre alimentaire sera proposée aux élèves ? Comment pourrons-nous leur garantir des produits sains ? Les élèves devront-ils dorénavant payer pour les repas proposés dans le cadre de ce programme ? Si oui, combien ?

Cette décision souligne l'importance de la mise en place d'une politique efficace en matière de nutrition et de bien-être à l'école, afin de pouvoir définir des recommandations alimentaires et surveiller les produits livrés par les fournisseurs de repas scolaires. Le gouvernement a pour sa part évoqué un problème de rentabilité et d'efficacité opérationnelle. Le programme d'alimentation scolaire dont bénéficient pas moins de 136 000 élèves répartis dans 836 écoles coûte environ 780 millions JMD [près de 5 millions d'euros]. L'idée est de « travailler avec des fournisseurs privés pour faire face aux coûts d'investissement » et améliorer l'offre de repas.

Il serait également question d'une mauvaise gestion financière. Le rapport du vérificateur général pour l'exercice 2020-21 a révélé d'importantes irrégularités dans la gestion de Nutrition Products Ltd. entre 2015 et 2021, notamment des paiements abusifs à des personnes extérieures. La ministre de l'Éducation, Fayval Williams, a déclaré soutenir une investigation complète sur ces abus. Faisant référence au projet de privatisation, elle a affirmé que le système de repas scolaires devait être réformé.

Estimant cependant que l'actuelle absence de politique nutritionnelle « constitue une situation intenable », Rashaun Stewart, étudiant en médecine et membre de JYAN a répondu :

The main constituents of the Western Pattern Diet all increase the risk of chronic illness, especially NCDs [non-communicable diseases]. From a nutritional perspective […] public health and public institutions have to combine to correct this issue before our children fall ill to preventable diseases, and we lose our vision of having a stable and healthy population […] Now, more than ever, our children’s future depends on it.

Les principaux aliments du régime occidental favorisent les maladies chroniques, en particulier les MNT (maladies non transmissibles). Les institutions doivent prendre en compte la santé publique pour résoudre ce problème avant que nos enfants développent des maladies qui pourraient être évitées et que nous perdions l'espoir d'avoir une population stable et en bonne santé […]. Maintenant plus que jamais, l'avenir de nos enfants en dépend.

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