Retour sur le Mayan Languages Digital Activism Summit 2023

Activistes numériques au sommet de l'ADLM à Mérida, au Mexique. Photo par Rising Voices.

En janvier 2023, des activistes numériques et leurs communautés, ainsi que des locuteurs de langues mayas, se sont réunis pendant cinq jours à Mérida, au Mexique, lors du Sommet de l'activisme numérique des langues mayas. Cet événement visait principalement à créer un espace pour mettre en avant les réalisations enregistrées grâce au recours à Internet, aux médias numériques et à la technologie afin de promouvoir les langues mayas dans les espaces numériques, mais également de renforcer les réseaux d'apprentissage par les pairs pour réfléchir collectivement sur les défis à relever pour ces langues en ligne, et la manière de collaborer ensemble.

Le Sommet s'inscrivait dans le cadre du projet Mayan Languages Digital Activism (ADLM est son acronyme en espagnol) mis en œuvre par l'initiative Rising Voices de Global Voices, avec le concours de la Fondation W.K.Kellogg. Le Sommet a proposé des activités pour tout le monde, y compris les enfants, la cohorte 2022 de boursiers ADLM, les militants numériques émergents et les membres de la communauté, qui ont tous manifesté leur intérêt à s'impliquer davantage dans ce mouvement.

Organisé par le Grand Musée du Monde Maya, l'événement s'est concentré sur le rôle joué par l'activisme numérique dans la promotion et la revitalisation des langues mayas au sud du Mexique et au-delà. Tandis que l'événement s'est déroulé dans la région de la péninsule du Yucatán au Mexique, où se trouve le Yucatec Maya, l'événement visait à inclure toutes les langues mayas, notamment le tsotsil, le tsetsal, le ch'ol et bien d'autres qui peuvent être parlées dans toute la Méso-Amérique. Les participants sont venus des États mexicains de Chiapas, Quintana Roo, Campeche et Yucatán, ainsi que du Guatemala et du Belize.

Rassemblement des boursiers.ières

Lancé en mai 2022, dix candidats de l'État mexicain du Chiapas et de la péninsule du Yucatan ont été sélectionnés pour rejoindre la première classe de Digital Activism Fellows. Au cours des neuf mois qui ont suivi, ils ont participé à un réseau d'apprentissage par les pairs en assistant à des réunions virtuelles mensuelles avec des conférenciers invités, en participant au processus d'élaboration de l'agenda et en partageant leurs expériences et leurs compétences. Ils ont également obtenu une bourse pour mener un projet d'activisme numérique communautaire dans le but de répondre aux besoins de leur communauté et de les impliquer tout au long du processus.

Groupe de boursiers ADLM 2022 et mentors pairs au sommet ADLM. Photo de Luis Flores pour Rising Voices.

Les boursiers se sont réunis en personne pour la première fois lors du Sommet pour partager les hauts et les bas de la gestion d'un projet; ce qui était une expérience d'apprentissage en soi. Au cours de cette rencontre de deux jours, ils ont réfléchi à l'expérience de la mise en œuvre de leurs projets, planifié des activités futures et partagé ce qui les a motivés à se porter candidat pour l'obtention de la bourse en premier lieu.

Atelier d'activisme numérique

Pour la première fois, l'atelier « Renforcer votre langage sur Internet grâce à l'activisme numérique » a été proposé en présentiel lors du Sommet. Ce format a rendu la dynamique plus interactive, ce qui a permis aux participants de mieux apprendre les uns des autres et de partager leurs points de vue en face à face.

En plus de permettre de comprendre comment utiliser des outils spécifiques pour créer du contenu en langue autochtone, l'atelier a encouragé les participants à prendre du recul pour réfléchir aux motivations, aux ressources et aux compétences qu'ils souhaitent développer et à planifier l'activisme numérique pour leur langue. Incorporant des éléments de la boîte à outils d'activisme numérique en langue autochtone, une ressource créée par Rising Voices en partenariat avec l'UNESCO, cet atelier de deux jours a présenté une série de tactiques visant à aider les participants à réfléchir sur les stratégies personnelles et les motivations de leur activisme numérique. Construite comme une feuille de route plutôt qu'une solution miracle, la boîte à outils fournit des exemples de projets ou de campagnes similaires, permettant aux participants de mieux se concentrer sur leur parcours personnel en tenant compte de leur contexte local.

Groupes de discussion lors d'un atelier sur l'activisme numérique. Photo de Luís Flores pour Rising Voices.

Dirigé par les co-facilitateurs Miriam Hernández, une locutrice ch'ol du Chiapas et Cecilia Tuyuc, une locutrice kaqchikel du Guatemala, l'atelier a également réuni Genner Llanes-Ortiz, le chercheur principal du projet de boîte à outils. Plus de 25 participants venus des quatre coins de la péninsule dont un groupe d'étudiants de langue maya de l'Université de l'Est de la ville de Valladolid y ont pris part.

Juana Pinzon, une locutrice maya de la communauté de Mesatunich située dans la péninsule du Yucatán, a dressé l'observation suivante : « L'atelier […] m'a aidée à imaginer et à renforcer mes capacités et mon désir de poursuivre le combat pour revaloriser et préserver la langue maya au sein de ma communauté. [Cela] m'a permis de rencontrer plus de gens qui m'ont motivé et m'ont donné la confiance nécessaire pour agir et sauver ma langue.»

Atelier de hip hop

Le Sommet a également été l'occasion d'échanges inter-régionaux et inter-culturels. Grâce à un partenariat avec l'ambassade du Canada au Mexique, un atelier intitulé « Revitalisation et représentation linguistiques par le hip hop et l'audiovisuel » a réuni le groupe canadien N'we Jinan, qui travaille avec des jeunes des Premières Nations pour créer leur propre musique et des vidéos comme moyen d'expression culturelle. Les animateurs de ce groupe, Butta Beats et Skye Spence ont collaboré avec Killbeat, artiste hip hop local, ainsi que Diana Ek et Pedro Dzidz du collectif Fototeca Tuzik’.

@fototecatuzik

Resultado del taller de hip hop donde colaboramos con artistas de Merida y Canada, en el marco de la Cumbre de Activismo Digital en Lenguas Mayenses 2023 llevada a cabo en Merida, Yucatán del 11 al 14 de enero. #ADLM23 #fototecatuzik #granmuseodelmundomayademerida

♬ sonido original – fototecatuzik

Pour de nombreux étudiants, il s'agissait de leur première venue au Gran Museo, qui proposait une visite personnelle des expositions. Par la suite, les étudiants se sont rendus au théâtre Mayamax, bercés par le rythme de la musique hip hop et ont été invités à découvrir leur langue et leur culture à travers les arts. Ils ont appris le beatmaking, l'écriture de paroles et la photographie, et ont terminé la journée par une présentation de leurs propres créations dans chacune de ces compétences.

Conférence publique

Au cours des semaines précédant la conférence publique des 13 et 14 janvier, un appel ouvert a été lancé aux participants pour proposer des sessions, des ateliers et des panels. La majorité de la conférence a été animée par des locuteurs de langues mayas qui ont eu l'occasion de partager leur travail avec un public plus large.

Parmi les orateurs principaux figuraient Llanes-Ortiz, qui a donné un aperçu du projet de boîte à outils ; Ezer May May, qui a parlé de la représentation maya dans les médias ; Maria Elisa Chavarrea Chim du Secrétariat de la Culture, qui a évoqué leur travail de promotion des langues mayas ; et Andrés ta Chikinib, qui a partagé son activisme numérique pour la langue tsotsil.

Discours d'Andrés ta Chikinib lors de la conférence publique. Photo de Luís Flores pour Rising Voices.

Les panels ont couvert des thèmes tels que les plateformes en ligne pour l'enseignement et l'apprentissage des langues mayas, la création de conditions propices à l'activisme numérique et la manière dont des problématiques tels que la santé mentale et la culture financière sont produits en langues mayas en ligne. Les présentateurs ont présenté leur travail avec des autocollants en maya, la création d'un corpus linguistique de la langue maya pouvant être utilisé pour l'apprentissage automatique, la recherche sur le besoin de ressources de sécurité numérique en langue maya kaqchikel et les projets Wikipédia en langues mayas. Des ateliers ont enseigné la manière d'élaborer des cartes numériques et des applications Web simples afin de créer du contenu en langue autochtone.

Deux programmes en ligne faisant la promotion de la langue maya, Radio Yúuyum et Chóoltej du Centre culturel Miatsil Kuxtal, diffusés en direct du Sommet, ont interviewé des boursiers et d'autres participants sur leur travail. Les boursiers ADLM ont également présenté leurs projets, pour le plus grand plaisir et les encouragements du public.

Programa Especial – Cumbre de Activismo Digital de Lenguas Mayenses

Ba’ax meyajil taak a beetik wa a kanik ka’achij 🤔

Posted by Miatsil Kuxtal Centro Cultural on Friday, January 13, 2023

L'offre de services d'interprétation maya/espagnol par Maaya Kaambal a été l'élément essentiel de la conférence publique. L'événement s'est clôturé par la présentation par le groupe San Pedro Chimay du jeu traditionnel maya Pok ta Pok.

Illustrateurs mayas

Invoquant le pouvoir des arts visuels pour sensibiliser en ligne à la diversité linguistique, le Sommet a présenté une exposition intitulée « Arte-vismo », qui a invité des illustrateurs mayas du Mexique et d'Amérique centrale à soumettre des pièces à exposer pendant le Sommet. Un groupe de juges a sélectionné trois gagnants, et 15 autres ont reçu une mention honorable – qui ont tous été sélectionnés pour être exposés.

Visite de la communauté

Grâce à une collaboration avec Teresa Pool Ix, professeure émérite de langue maya, qui a organisé une rencontre à la Casa de Cultura dans la communauté de Conkal à l'extérieur de Merida, les boursiers ont eu l'occasion de rencontrer et de partager leur travail avec des membres de la communauté, dont beaucoup ont raconté leur expériences personnelles de refus du droit de parler leur langue. Alors que tout le monde dégustait des tamales et des empanadas, des plats typiques de la région, les membres de la communauté ont encouragé les boursiers à poursuivre leur travail.

Et après ?

Juana Díaz, une locutrice de Tsotsil qui représentait l'organisation Nenemi Paxia, a déclaré que le sommet l'avait inspirée et motivée : « Cela nous encourage beaucoup en tant que projet, car vous vous rendez compte qu'il y a beaucoup plus de personnes qui travaillent sur la même chose, et vous obtenez pour partager des réalisations et des difficultés similaires… vous vous identifiez à leurs expériences. Ce Sommet nous permet de former des réseaux collaboratifs pour renforcer le travail [en cours] de réalisation. C'est une graine cultivée qui, pour peu qu'on en prenne soin, produira d'excellents fruits. »

Vicente Canché Móo, locuteur maya et promoteur culturel, a ajouté : « Cela nous a permis de rencontrer d'autres personnes et de renforcer notre âme. Souvent, nous avons le sentiment de travailler seuls, mais c'était gratifiant de voir qu'ailleurs et dans d'autres langues ou variantes, des gens qui travaillent dur et ont plus d'expérience pour nous orienter et nous aider.»

Veuillez consulter le compte Instagram de Rising Voices pour voir les moments forts du Sommet.

Global Voices remercie les autres sponsors et partenaires, tels que le Centre culturel espagnol au Mexique et l’Institut national des langues autochtones du Mexique, pour leur soutien. Rising Voices prépare actuellement une autre série d'ateliers virtuels pour le Chiapas et la péninsule du Yucatan, qui sera suivie d'un appel ouvert à participation à la série de boursiers 2023, en vue d'organiser un autre sommet au Chiapas début 2024. Pour vous tenir informé de ces évènements, inscrivez-vous à notre newsletter mensuelle en espagnol, « G'ichin » ou suivez-nous sur Twitter (@ActLenguas).

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