Tanya Plibersek, la ministre australienne de l'Environnement, a rejeté un projet de mine de charbon à ciel ouvert dans l’Etat de Queensland, marquant une rare victoire pour l’environnement. L'exploitation minière, ou l’excavation à ciel ouvert, est un processus par lequel les roches et les minéraux sont extraits d’une grande fosse à ciel ouvert, susceptible d'impacter la végétation, le sol, la roche-mère et les réservoirs d’eau avoisinants. Selon le type d’exploitation minière employé et de minéraux excavés, il peut également émettre des polluants nocifs.
Le projet de la mine de charbon dans l'État de Queensland se trouve aux abords de la Grande Barrière de corail, inscrite au Patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 1981. La décision fait suite à une consultation publique après que le projet ait fait l’objet d’une première évaluation au mois d’août 2022. Plus tôt dans l’année, le ministère de l’Environnement et des Sciences du Queensland a publié un communiqué indiquant que le projet de la mine « présente un certain nombre de risques inacceptables et ne doit pas être poursuivi ».
Le récif de la Grande Barrière est au cœur d'une controverse depuis plusieurs années, les changements climatiques n'étant que l'un des nombreux facteurs le menaçant. En 2021, l’UNESCO a proposé de l’inscrire sur la liste des sites « en péril ».
L’opposition au projet minier repose sur les « risques de dommages pour le récif, les criques d’eau douce et la nappe phréatique ». L'impact négatif éventuel de la mine sur les changements climatiques n'a pas été pris en compte dans la décision.
Dans un geste assez inhabituel, la ministre de l'Environnement a annoncé sa décision sur les réseaux sociaux plutôt que par le biais d’un communiqué de presse. La vidéo qui l'accompagne est devenue virale :
An update on the proposed Central Queensland Coal project. pic.twitter.com/byAXTPLRB4
— Tanya Plibersek (@tanya_plibersek) February 8, 2023
Nouvelles concernant le projet de la mine de charbon dans l’État de Queensland.
— Tanya Plibersek (@tanya_plibersek) 8 février 2023
Le ministère de l’Environnement a publié une brève annonce officielle de la décision, y compris les motifs législatifs, en vertu de la loi de 1999 sur la protection de l'environnement et de conservation de la biodiversité (EPBC) :
Les réseaux sociaux ont réagi d’une manière plutôt chaleureuse à la déclaration de Pilbersek.
Kate Wylie, présidente du groupe « Climat et environnement » du Royal Australian College of General Practitioners (organisme professionnel pour les médecins généralistes en Australie), rejoint le sentiment de nombreux utilisateurs de Twitter :
Well done!! It’s the right decision. We need to protect our environment to protect human health and biodiversity. 👏🏽👏🏽👏🏽
— Kate Wylie (@thewyliekate1) February 8, 2023
Bravo !! C’est la bonne décision. Nous devons préserver notre environnement afin de protéger la santé humaine et la biodiversité.
— Kate Wylie (@thewyliekate1) 8 février 2023
De même que sur Twitter, la vidéo publiée sur sa page Facebook a suscité de nombreux commentaires positifs, mais aussi quelques critiques.
Jo Jackson King est plutôt euphorique:
Tears in my eyes. Thank you Minister and all those working alongside you.. This is a beautiful act for our beautiful imperiled planet.
J'ai les larmes aux yeux. Merci madame la ministre et tous ceux qui travaillent à vos côtés…Quel bel acte pour la survie de notre magnifique planète.
En revanche, William Monteith n'est pas convaincu :
Funny, only yesterday, I watched a programme on the Great Barrier Reef, where the scientists and people who actually work on the Reef say it is thriving and in great condition.
Who is telling the truth, as only a few years ago we were being told the Reef was dying.
I am no expert but from what I understand this proposed mining is nowhere near the Reef, can someone tell me how many kilometres is it from the Reef.
C'est drôle, pas plus tard qu'hier, j'ai regardé une émission sur la Grande Barrière de corail, dans laquelle les chercheurs et les personnes qui y travaillent la disait florissante et en excellent état.
Qui dit la vérité, car il y a quelques années seulement, on nous disait que le récif était en train de mourir.
Je ne suis pas un expert, mais d'après ce que j'ai compris, ce projet d'exploitation minière est très loin de la Grande Barrière de corail. Quelqu'un peut-il me dire à combien de kilomètres se trouve le récif ?
Des groupes communautaires tels que Lock the Gate, une coalition nationale qui lutte contre l’exploitation minière, ont également salué la nouvelle. Ellie Smith, coordinatrice de l’État de Queensland, a déclaré :
We welcome Minister Plibersek’s decision to reject this coal mine. It was an outrageous proposal that would have carved up farmland and bushland, draining local groundwater and dumping toxic mine water into the reef.
…The reality of climate change is that no government anywhere in the world can open new coal and gas projects if we want to avoid the most catastrophic consequences of anthropogenic global warming.
Nous nous félicitons de la décision de la ministre Plibersek de s’opposer au projet de cette mine de charbon. Il s'agissait là d'une proposition scandaleuse qui aurait morcelé les terres agricoles et le bush, drainé les eaux souterraines locales et déversé l’eau toxique de la mine dans le récif.
…La réalité des changements climatiques est telle qu’aucun gouvernement au monde ne peut justifier l’adoption de nouveaux projets d’exploitation de charbon et de gaz si nous voulons éviter les effets les plus désastreux d’un réchauffement climatique d’origine anthropique.
Beaucoup d’Australiens souhaiteraient que des mesures ministérielles soient prises afin de stopper d'autres projets d’énergies fossiles. Cependant, la professeure agrégée Justine Bell-James, une universitaire spécialisée en droit de l’environnement et des changements climatiques, est plutôt pessimiste quant à l’utilisation future de ces pouvoirs fédéraux, et ce en particulier dans les cas liés aux changements climatiques.
…persuading the federal minister […] will not be easy. That’s because the law contains no explicit requirement for the minister to consider the climate change impacts of a proposal.
… convaincre le ministre fédéral […] ne sera pas facile. En effet, la loi n’exige pas explicitement que le ministre prenne en compte les impacts d’une proposition sur les changements climatiques.
Elle soutient que modifier la loi en tenant compte des enjeux climatiques n’aiderait probablement pas non plus :
Such arguments are difficult to run. That’s partly because they string together a number of causal links. In other words, they rest on the assumption that one action is definitively responsible for another, and so on down the chain.
De tels arguments sont difficiles à faire valoir, en partie parce qu'ils établissent un certain nombre de liens de causalité. En d'autres termes, ils reposent sur l'hypothèse qu'une action est définitivement responsable d'une autre, et ainsi de suite.
La décision du ministre a créé des tensions. À l’origine du projet, le milliardaire Clive Palmer tient un rôle controversé et de premier plan au sein de la scène politique australienne. Il dirige le parti de droite australien (United Australia Party (UAP)) auquel l’une de ses sociétés minières a fait don de 116 millions de dollars australiens (soit 81 millions de dollars US) avant les élections fédérales de 2022. Le parti compte un sénateur au parlement australien.
« Bin Chicken », un utilisateur de Mastodon, n’est visiblement pas un fan de Clive Palmer :
La ministre de l’Environnement Tanya Plibersek dit non au projet de mine de Clive Palmer dans l’État de Queensland.
C’est la première fois dans l’histoire de l’Australie que le projet d’une mine de charbon est bloqué en vertu des lois environnementales du pays. Nous avons enfin un ministre avec suffisamment de courage pour protéger l’environnement de Clive Palmer et du vieux cartel de charbon polluant.
Selon le site Internet du magazine Australian Mining, Palmer a indiqué qu'il intenterait une action contre le rejet du projet minier :
There will be action taken. I can’t really talk about it. I’m not the sort of person who doesn’t do anything, as you’ve probably realised from my history.
Des mesures seront prises. Je ne peux pas vraiment en parler. Je ne suis pas le genre de personne à rester sans rien faire, comme vous l'avez probablement constaté par le passé.
D’autres utilisateurs sur Facebook, comme Craig Lankester, soutiennent Palmer :
Pay back to Palmer. The reef is 100km away, only listening to anti mining advocates. The real hypocrisy is the feel good banning mining in Australia and watching that same mining occur overseas. No net gain for the environment just a loss of income to Australia and a substantial increase in virtue signaling.
C’est l’heure de la revanche pour Palmer. Le récif est à 100 km, et ce sont seulement les détracteurs de projets miniers que l’on entend partout. Éprouver un sentiment de satisfaction face à l’interdiction minière en Australie, et voir cette même industrie minière se développer à l’étranger, n’est que pure hypocrisie. Aucun gain net pour l'environnement, juste une perte de revenus pour l'Australie et un phénomène d'étalage de vertu qui s'amplifie.
Pendant ce temps, à l’autre extrémité du spectre politique, le parti écologiste est prêt à soutenir devant le Sénat le gouvernement et sa législation sur le climat, en échange de l’arrêt de tous les nouveaux projets d’exploitation de charbon et gaz. Adam Bandt, chef du parti écologiste écrit dans un tweet que :
The Greens have made an offer to the government – we'll pass their Safeguard Mechanism changes with just one amendment:
To stop new coal and gas projects.
— Adam Bandt (@AdamBandt) February 15, 2023
Les Verts ont fait une offre au gouvernement : nous adopterons les modifications du Mécanisme de Sauvegarde avec un seul amendement :
L’abandon de tous les nouveaux projets d’exploitation de charbon et de gaz.
— Adam Bandt (@AdamBandt) 15 février 2023