Recyclage des bouteilles et flacons en plastiques au Burundi : le chemin est encore long

Photo du site www.ibihe.org utilisée avec autorisation

Cet article est repris sur Global Voices dans le cadre d'un partenariat avec www.ibihe.org . L'article original est à retrouver sur le site Ibihe.org .

A trois semaines de l'interdiction des bouteilles et des flacons récupérés, la politique de récupération des bouteilles et flacons en plastique dans les entreprises burundaises est quasi-inexistante. Certains emballages sont réutilisés sans respect des normes d'hygiène, d'autres jonchent le sol, disposés ainsi en danger la santé publique et l'environnement.

Chaque jour, Thierry Nahimana, collecteur des bouteilles passe, sacoche au dos, d'une boutique à l'autre à Nyakabiga, dans la commune Mukaza, Mairie de Bujumbura, la capitale économique du Burundi. Il demande aux tenanciers des boutiques s'ils ont conservé les bouteilles emballant les boissons fabriquées par MERU Investments, entreprise de fabrication de boissons ultra alcoolisées afin de les acheter.

Depuis que les boutiques ont appris qu'ils peuvent revendre les bouteilles de marque MERU, le regard a changé. La collecte des bouteilles a du pain sur la planche. D'autres jeunes commencent à s'y intéresser. Ils rivalisent d'ailleurs en collectant les bouteilles de marque MERU. Les boutiques offrent leurs produits au premier venu ou au plus offrant s'ils s'y croisent.

J'achète aujourd'hui cette bouteille parfois à 400 FBu (0,192 dollars USD) et je la revends à 500 FBu (0,2401 dollars USD) à l'entreprise MERU. Avant que la demande en bouteilles de marque MERU grandisse, leurs prix variaient entre 300 et 350 FBu (0,144 et 0,168 dollars USD), annonce Thierry.

La demande en bouteilles de marque MERU monte en flèche de jour en jour. Même à l'intérieur du pays notamment en province Rumonge (située au sud-est du Burundi à 72 km de l'ex capitale Bujumbura ) la collecte des bouteilles de marque MERU est fréquente. Selon Jean Marie un autre collecteur, le prix de la bouteille varie entre 200 et 250 Fbu (0,096 et 0,12 dollars USD). Il atteste :

Pour tirer profit de cette collecte, je collecte environ 1000 bouteilles avant de descendre sur Bujumbura les revendre. Chez nous à Rumonge, les gens viennent parfois me les vendre à la maison. Les bouteilles de marque MERU ne jonchent pas le sol comme les bouteilles des autres marques de boissons.

Au marché des bouteilles à Ngagara (situé dans la ville de Bujumbura) où MERU Investments fabrique les boissons, Thierry Nahimana a avoué y avoir rencontré les vendeurs des bouteilles MERU d'autres provinces comme Muramvya, etc.

D'après Thierry Nahimana qui a travaillé à l'entreprise MERU Investments, cette entreprise recycle les bouteilles avant de les réutiliser.

Au-delà du commerce, l'entreprise MERU a mis en place une politique efficace de gestion des bouteilles émises en les achetant à ses clients par l'intermédiaire des collecteurs. Politique qui semble échapper à un grand nombre d'entreprises burundaises.

Les jeunes semblent y trouver aussi leur compte dans le pays où le chômage bat tous les records dans la communauté Est Africaine.

Jeter les déchets un peu partout : une pratique courante au Burundi

Parallèlement, les Burundais continuent à jeter un peu partout les bouteilles ou flacons en plastiques des autres marques. Et surtout dans les caniveaux.

Jean Noël, rencontré à Bwiza, quartier populaire de la Commune Mukaza en Mairie de Bujumbura a jeté le flacon en plastique dans le cachet proche de lui. Pour lui, l'absence des poubelles publiques justifie son action. Cette pratique est courante à Bujumbura comme en province.

D'autres bouteilles ou flacons en plastique forment au sol juste par manque de politique de recyclage des fabricants.

En octobre 2020, le ministère de l'environnement a annoncé qu'un individu qui jettera ces emballages en plastiques n'importe où sera frappé d'une amende de 2 000 à 5 000 FBu (0, 9602 à 2, 4006 dollars USD) . S'il s'agit d'une personne morale, ce sera une amende qui varie entre 50 000 et 100 000 FBu (24,0059 à 48,0118 dollars USD).

A la suite de ces mesures, l'État, les entreprises privées et les Organisations non gouvernementales ont équipé le centre-ville de Bujumbura en poubelles publiques. Cependant, cela n'empêche pas que les Burundais jettent les bouteilles ou les flacons en plastiques dans les caniveaux.

De plus, ces mesures n'ont jamais été appliquées, alors qu'un emballage en plastique met entre 100 et 400 ans pour se dégrader biologiquement. Selon l'expert en environnement, Célestin Nkunzimana :

Il faudrait une conscientisation de masse sur la gestion des bouteilles ou flacons en plastique.

En province, les poubelles publiques restent une perle rare

Les poubelles publiques restent une perle rare dans les quartiers éloignés et dans les provinces dans le pays. Les caniveaux se muent en poubelles publiques. A travers tout le pays, ils sont bouchés par toutes sortes de déchets solides.

Les conséquences ne tardent pas à s'exposer. A chaque fois qu'il pleut en abondance, les inondations sont récurrentes au Centre-ville de la Mairie de Bujumbura. La route devient également impraticable pour les piétons et pour les véhicules.

Pour l'expert en Environnement Célestin Nkunzimana :

Ces inondations sont la conséquence des caniveaux évacuant les eaux des pluies bouchées par toutes sortes de déchets. Ces eaux doivent alors se trouver un chemin si leurs chemins, les caniveaux, sont bouchés.

Si l'érosion charrie ces déchets plastiques, ils finissent dans le Lac Tanganyika . Sur les plages du lac, les déchets plastiques jonchent un peu partout. A titre d'exemple, à Kumase ( non loin du Lac Tanganyika ), au quartier Ngagara, les déchets plastiques s'y sont amassés en grand nombre.

Selon la Banque mondiale, le monde génère chaque année 2 milliards de tonnes de déchets solides municipaux. Ce chiffre devrait atteindre 3,4 milliards de tonnes en 2050.

Sur 630 tonnes de déchets produits quotidiennement en Mairie de Bujumbura, environ 51 tonnes sont des déchets plastiques. Néanmoins, sa gestion pose problème jusqu'à aujourd'hui.

En 2018, le président burundais a décrété une loi interdisant la fabrication, l'importation, le stockage, la vente et l'utilisation de tous les sachets et d'autres emballages en plastique. L'article 7 du décret stipule :

Les déchets en plastiques, y compris les bouteilles et les flacons en plastiques sont retournés chez les fournisseurs qui en assurent le stockage, le recyclage ou la valorisation.

Les émetteurs de ces déchets plastiques ne les récupèrent pas. Bien au contraire. Ils sont récupérés par les particuliers les produits liquides comme l'huile de palme et de coton et d'autres entreprises fabriquant les jus pour emballer à leur tour leurs produits.

Emballage de récupération, origine des maladies graves ?

Pour Severin Sindayikengera, Directeur Général du Bureau Burundais de Normalisation :

Si on conserve l'huile de palme dans les flacons de récupération pendant toute une semaine, ce produit tombe en désuétude, parce que ces flacons ne sont pas nettoyés selon les règles d'hygiène.

Toujours selon le même directeur, les flacons en plastique présentent des risques pour les consommateurs selon la nature des produits. Des risques qui vont jusqu'à attraper les maladies graves comme le cancer.

Selon Ir. Désiré Rudaragi, expert en sécurité sanitaire des aliments :

Les familles qui consomment les produits empaquetés dans les emballages incapables tombent souvent malades. Elles passent ainsi le temps qu'elles nécessitent au travail, à l'hôpital et utilisent les fonds familiaux aux soins médicaux, etc. Somme toute, leurs économies vont decrescendo.

Toute réutilisation des emballages de récupération a été interdite dans tout le pays à partir du 26 février 2023. Un délai de six mois a été accordé pour changer de l'emballage. Le comportement des commerçants burundais qui attend le dernier jour pour mettre en application cette mesure reste le principal défi.

 

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